La volatilité s’installe

Axel Botte, Ostrum AM

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Des poches de volatilité indiquent une nervosité accrue des marchés.

©Keystone

Les marchés d’actions sont entrés dans une forme de consolidation horizontale avec un surcroît de volatilité et des rotations sectorielles violentes en lien avec l’évolution des taux longs. La question essentielle reste la politique monétaire de la Fed alors qu’un tournant monétaire a déjà eu lieu dans plusieurs régions confrontées aux pressions inflationnistes. Les marchés paraissent ainsi prisonniers d’un cycle initié par l’augmentation des anticipations d’inflation, poussant les taux longs américains à la hausse suivi d’un décrochage des indices boursiers. L’ajustement des valeurs de croissance limite en retour les pressions sur les taux au détriment, finalement, du dollar. La baisse du billet vert réamorçant alors un rebond des actifs risqués. Ce cycle de sentiment détermine dans une dérive latérale des cours caractérisés par une forte volatilité. Le VIX s’échange régulièrement au-dessus du seuil de 20%.

Le marché des cryptomonnaies continue de faire les gros titres

La décision de Tesla de ne plus accepter les paiements en Bitcoin prouve sans doute que le jeton n’est pas une monnaie. La Chine bannit son utilisation. Sa volatilité interdit d’en faire une réserve de valeur, l’un des attributs essentiels d’une monnaie. A l’inverse, on peut s’étonner de l’absence quasi-totale de volatilité sur les marchés du crédit. Les indices de CDS répondent à peine à la volatilité des actions et les spreads obligataires évoluent dans une fourchette toujours plus étroite.

La discussion sur le tapering est engagée,
quoi qu’en disent certains membres du FOMC.
Une issue qui dépendra de la politique de la Fed

Le compte-rendu de la réunion d’avril indique que la discussion sur le tapering est engagée, quoi qu’en disent certains membres du FOMC. Jackson Hole, à la fin du mois d’août, fait consensus pour l’évoquer avant une annonce formelle en septembre. 

Le risque pour la Fed est que l’économie américaine bute prématurément sur des contraintes d’offre. Le niveau du chômage incompressible est probablement plus élevé que les 3,5% qui prévalaient avant la pandémie. Le taux de participation peine à se redresser et les transferts aux ménages ravivent les oppositions idéologiques alors que les programmes d’infrastructures sont en débat au Congrès. L’incertitude tient également à l’évolution des déficits budgétaires et à la capacité des marchés à absorber les émissions de Treasuries. Le taux réel à cinq ans (-1,80%) a perdu 140pb depuis un an. 

A ces niveaux, les tensions autour des adjudications ne sont pas à exclure. Un engorgement du primaire risquerait d’impacter le marché du repo sur lequel les primary dealers se refinancent. C’est pour cette raison que la Fed étudie la possibilité de maintenir une facilité de repo permanente ouverte aux banques et aux institutions financières internationales. L’expérience des tensions en septembre 2019 et mars 2020 milite pour une assurance. L’évocation du tapering dans les minutes du FOMC a néanmoins amorcé une correction des taux réels, réduisant quelque peu les points morts d’inflation. Le T-note à dix ans cherche une direction entre 1,60 et 1,70%.

En zone euro, l’accélération du PEPP reste énigmatique tant la BCE semblait un temps laisser filer le Bund. L’emprunt allemand s’est approché de -0,07%. Un commentaire de Philip Lane écartant le risque d’inflation, appuyé par Mario Draghi, inversera finalement la tendance pour ramener le Bund vers -0,13% en clôture hebdomadaire. Les spreads souverains ont bien réagi, le BTP italien repassant sous le seuil des 120pb. Le niveau de 1% sur le 30 ans continue de susciter des intérêts institutionnels. Les émissions SURE de l’UE pèsent sur les marchés de dettes supranationales, dont les spreads pointent à la hausse depuis quelques semaines. L’emprunt SURE de 14 milliards d’euros sur deux maturités de huit et 25 ans a rencontré une demande de 90 milliards d’euros. Le besoin de couverture des émissions de l’UE participe au resserrement des swap spreads. Le swap spread à dix ans s’échange à 30pb.

Le marché primaire reste actif avec près
de 20 milliards d’euros d’émissions cette semaine.

Concernant le crédit en euros, les spreads IG (84pb contre Bund) affichent un léger écartement sur la semaine. Le marché primaire reste actif avec près de 20 milliards d’euros d’émissions cette semaine. Le primaire n’offre plus de prime par rapport à un marché secondaire pourtant marqué par un certain manque d’appétit pour le risque. Le segment BBB bénéficie des perspectives économiques et de l’amélioration des notations. Les segments à fort beta tendent à s’écarter, notamment les dettes hybrides ou les subordonnées bancaires. Les foncières sont également chahutées. Le high yield européen est stable à 304pb au-dessus de l’emprunt allemand. L’activité primaire s’est finalement ralentie après le déluge d’émissions depuis le début de l’année. Les spreads des indices de CDS demeurent inertes malgré un début d’écartement sur le Crossover (259pb). En Asie, les déboires de Huarong, entité systémique soutenue par l’Etat chinois, risque d’affecter la perception de la classe d’actifs.

Les marchés d’actions européens enregistrent une hausse de 0,2% (Euro Stoxx 50) malgré une semaine de volatilité. Sur le plan sectoriel, les prises de profit sur les cycliques liées aux matières premières s’opposent au rebond de la consommation de base. L’hypothèse d’un retour de l’offre iranienne réduit les prix du brut en fin de semaine, d’où un décrochage des valeurs pétrolières. Les flux continuent d’alimenter la thématique value alors que la croissance décollecte. Les anticipations d’inflation et la réouverture de l’économie, confirmée par les enquêtes PMI de mai dans les services, permettent un redressement des valeurs liées au tourisme en fin de semaine.

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