Depuis la refonte récente du droit des marchés financiers suisse, la responsabilité relative aux informations communiquées aux investisseurs est régie par l’article 69 de la Loi sur les services financiers (LSFin)1.
Celui-ci vise toute situation sur le marché primaire ou secondaire dans laquelle la loi exige la publication d’un prospectus. Autrement dit, il s’applique lorsque des actifs mobiliers sont offerts au public ou admis à la négociation sur une plateforme telle que définie par la LSFin. Les actifs mobiliers comprennent notamment des titres de participation (p.ex. actions, bons de jouissance), obligations, produits structurés ou dérivés, jetons digitaux et parts de placements collectifs.
L’engagement de la responsabilité suppose que les informations en question soient diffusées à l’aide d’un prospectus, d’une feuille d’information de base ou d’une communication semblable. Concept indéterminé et donc sujet à débat, une telle communication peut inclure des renseignements donnés, sous forme écrite ou orale, dans un cadre officiel (p.ex. assemblée générale) ou publicitaire (p.ex. insertion promotionnelle).
Le comportement appréhendé par le législateur consiste à présenter des indications inexactes, trompeuses ou non conformes aux exigences légales. Les informations viciées doivent porter sur un point qui est objectivement susceptible d’influer sur la décision de l’investisseur d’acquérir l’instrument financier en question.
La loi ne vise que les auteurs des supports d’information précités, à l’exclusion des personnes qui ont simplement participé à leur création ou qui se sont limitées à les distribuer sans pouvoir influencer leur teneur. De plus, pour pouvoir engager sa responsabilité, il faut avoir agi sans la diligence requise. L’envergure de cette diligence dépend toujours des circonstances concrètes. Son contenu se détermine à la lumière des normes légales ou réglementaires ou, le cas échéant, des normes analogues émises pas des associations privées ou semi-publiques (p.ex. Asset Management Association Switzerland). En principe, le rédacteur des communications visées par la LSFin peut se fier aux déclarations d’autres personnes impliquées, dont notamment les avocats ou l’organe de révision de l’émetteur de l’instrument financier. Cela dit, il doit rester attentif à tout indice concret qui pourrait commander des vérifications ou d’autres mesures de prudence.
L’investisseur potentiel est en présence d’indications inexactes lorsqu’elles donnent à ce dernier une fausse représentation de la réalité, soit en mentionnant, soit en omettant un ou plusieurs éléments pertinents. Les indications sont trompeuses lorsque, par des procédés plus ou moins astucieux, elles dissimulent ou minimisent des faits essentiels. Par exemple, il peut s’agir d’un prospectus qui contient un conglomérat d’informations équivoques et difficilement compréhensibles, susceptibles de porter à confusion ou d’occulter un élément important.
Enfin, la non-conformité des indications aux exigences légales nécessite que le contenu d’un instrument d’information requis par la loi ne corresponde pas à celui commandé par la réglementation. Dès lors, seuls le prospectus et la feuille d’information de base entrent ici en ligne de compte. De surcroît, dans la mesure où le prospectus est soumis à un contrôle de conformité préalable, uniquement la feuille d’information de base peut poser un problème en pratique. D’après la loi, elle doit contenir les informations qui permettent de prendre une décision d’investissement fondée et de comparer différents instruments financiers entre eux.
Le nouveau régime prévoit deux règles particulières qui concernent le résumé du prospectus, d’une part, et les perspectives principales, d’autre part. S’agissant du résumé, la responsabilité se limite aux cas où les informations qui y figurent sont trompeuses, inexactes ou contradictoires par rapport aux autres parties du prospectus. Les indications sont trompeuses et inexactes à l’aune des autres parties du prospectus, notamment puisqu’elles sont articulées de manière différente que dans ces autres parties. Les informations contenues dans le résumé sont, en revanche, contradictoires lorsqu’elles contredisent celles formulées dans le reste du prospectus. Pour ce qui est des perspectives principales, la responsabilité est restreinte aux cas où les indications qui se révèlent inexactes ou trompeuses ont été fournies ou diffusées sciemment ou sans mentionner l’incertitude liée aux évolutions futures. Par «perspectives principales», il faut entendre notamment les perspectives d’activités de l’émetteur de l’instrument financier et d’éventuels donneurs de garanties ou de sûretés, y compris les risques et les litiges principaux.
En vertu de l’article 69 LSFin, l’acquéreur originaire ou subséquent d’un instrument financier qui subit un dommage en s’appuyant sur des informations entachées d’un vice au sens de la loi peut agir contre les seuls producteurs des supports susmentionnés, pourvu qu’il parvienne à prouver un lien de causalité entre celles-ci et ledit dommage.
1Basé sur le Code des obligations, le régime de responsabilité antérieur se limitait aux informations concernant les titres émis par une société anonyme suisse.