La fusion d’Ethereum: étape clé de l’institutionnalisation du web3

Alexandre Stachtchenko & Stanislas Barthélémi, Blockchain Partner by KPMG

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Chronique blockchain. La transition de la cryptomonnaie de la preuve de travail à la preuve d’enjeu offre une nouvelle «narrative» au secteur financier qui pourrait accélérer son adoption.

L’infrastructure Ethereum est dominante depuis 2015 dans la catégorie des blockchains à smart-contract. A ce jour, la chaîne sécurise environ 700 milliards de dollars (en considérant la somme des valorisations des cryptoactifs circulant dessus), et représente la couche fondatrice de ce que nous pouvons nommer: «Internet de la valeur» et de ses applicatifs allant de la Finance Décentralisée, au NFT, jusqu’au métavers

Ethereum est en cours d’évolution vers une version intitulée 2.0 en plusieurs étapes. Les modifications impliquent divers changements dont une modification du consensus de la blockchain passant de la preuve de travail (compétition mathématiques de puissance de calcul) à une preuve d’enjeu (mécanisme crypto-économique) reposant sur une dynamique de récompenses et de punitions.

Cette fusion offre l’opportunité de devenir un des validateurs du réseau.

Sans rentrer dans le débat opposant en théorie et en pratique la preuve de travail à la preuve d’enjeu (qui mériterait des articles entiers à ce propos), cette transition appelée «fusion» devant s’opérer au Q3 2022 pourrait de manière opportune transformer la manière dont est considérée Ethereum.

Cette fusion offre l’opportunité de devenir un des validateurs du réseau, c'est-à-dire, de mettre en jeu 32 ethers (choix de design) pour «sécuriser» l’infrastructure en étant tiré au sort pour valider des blocs. Ce travail est récompensé par de l’émission monétaire en ether que l’on peut prédire en fonction de quelques paramètres dont le nombre de validateurs. L’infrastructure technique requise afin de devenir validateur est peu coûteuse et donc aisément accessible.

En considérant les quelques facteurs suivants qui accompagnent cette transition, nous pouvons tirer quelques conclusions sur la nature du changement de perception:

  • Une estimation de taux d'intérêt (payé en ether) pour récompenser les validateurs avoisinant les 8-10% après la fusion en l’état du nombre de validateurs (environ 350’000 à fin avril 2021)
  • Une réduction de l’émission monétaire de 90% à partir de la fusion
  • Une potentielle déflation du nombre d’éthers selon le taux d’utilisation de la chaîne en vertu d’un changement de politique monétaire opéré en août 2021 d’environ 1 à 2% avec des hypothèses conservatrices
  • Une baisse de l’énergie requise pour faire tourner l’infrastructure d’environ 99,5%

La difficulté d’investir dans les infrastructures de l’internet tombent avec l’internet de la valeur (aka les cryptomonnaies). Devenir validateur sur Ethereum (passée la fusion) pourrait s’assimiler à un «Internet Bond» ayant pour conséquence positive de contribuer à la sécurité et à la décentralisation du protocole, fondation des usages émergents autour des cryptoactifs et du web3.

Un nouveau marché pour les banques et institutions financières.

Cette obligation est accessible sans exclusion, est transparente et prédictible dans l’estimation du taux d’intérêt, et ne dépend pas d’un état ou d’une entreprise pouvant s’endetter notamment.

En ayant la conviction qu’Ethereum peut réussir sa transition en dépit de l’ambition (et de la complexité technique qui en résulte), miser sur Ethereum est un pari qui revient à parier sur le web3.

Ce pari est à la portée des entreprises qui voudraient diversifier leur trésorerie, investir dans cette nouvelle classe d’actif et du secteur financier plus globalement en ajoutant une dose d’”Internet Bond” dans les allocations de portefeuille.

Dans son dernier billet de blog, Arthur Hayes (ex-CEO de BitMEX) détaille ce raisonnement avec un exemple très illustratif. En prenant l’hypothèse d’un taux d’intérêt de 8% annuel pour les futurs validateurs d’Ethereum, le prix de l’ether pourrait diminuer de 36% à 10 ans que cela équivaudrait à avoir une obligation du trésor américain à 10 ans avec un taux de 2,5% annuel.

Cette opportunité ouvre par ailleurs un nouveau marché pour les banques et institutions financières qui voudraient offrir une exposition à leur client en faisant des partenariats avec des prestataires proposant déjà de mettre en place des validateurs ou d’internaliser ce service.

Nul doute que nous assisterons à partir du deuxième semestre 2022 à une multiplication de communiqués de presse indiquant l’acquisition d’ethers par des entreprises, et par des investisseurs.

L’institutionnalisation du secteur crypto n’est pas prête de s’arrêter …

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