L’inflation pourrait rester forte mais les actions devraient encore grimper

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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La courbe des rendements US a enregistré un aplatissement baissier. La croissance des bénéfices, quant à elle, reste plus forte que prévu. Tour d’horizon.

Aux Etats-Unis, en octobre, l’inflation des prix à la consommation est ressortie à 6,2% en glissement annuel, au plus haut depuis novembre 1990. Les prix de l’énergie et de l’alimentation y ont largement contribué mais, abstraction faite de ces postes de dépense, l’inflation sous-jacente s’élève tout de même à 4,6% sur un an.

Par ailleurs, l’écart de rendement entre les titres à trente ans et ceux à cinq ans a diminué de 5 points de base (pb), à 68,5 pb le jour de la publication de l’Indice des prix à la consommation (IPC). Il faut remonter à mars 2020 pour retrouver un écart aussi faible. Désormais, les marchés tablent sur un premier relèvement des taux directeurs de la Réserve fédérale américaine (Fed) dès juillet 2022. L’indice S&P 500 s’est replié mais il a achevé la semaine dernière à seulement 0,4% de son sommet historique.

Chaque publication d’un chiffre d’inflation supérieur aux attentes risque d’engendrer de nouveaux accès de volatilité sur les marchés de taux et d’actions.

Enfin, alors que la saison des résultats du troisième trimestre aux Etats-Unis touche à son terme, le nombre d’entreprises qui ont annoncé des bénéfices plus élevés que prévu est supérieur à la moyenne.

Comment interpréter la situation?
  1. La crainte d’un resserrement monétaire
    Le bref accès de volatilité d’il y a dix jours sur les marchés d’actions et l’aplatissement baissier de la courbe des rendements américains (lorsque les taux courts augmentent davantage que les taux longs) reflètent la crainte d’un resserrement monétaire plus marqué susceptible d’étouffer la croissance. Chaque publication d’un chiffre d’inflation supérieur aux attentes risque d’engendrer de nouveaux accès de volatilité sur les marchés de taux et d’actions.
  2. L’atténuation de l’inflation en 2022
    L’inflation s’avère plus généralisée et plus durable que prévu. Les prochains mois devraient donc encore être marqués par des chiffres supérieurs aux estimations sur ce front. 
    Néanmoins, le scénario de base de la Recherche d’UBS est toujours celui d’une décrue de l’inflation dans le courant de l’année prochaine avec la résorption graduelle du déséquilibre entre l’offre et la demande, la stabilisation des prix de l’énergie, ainsi qu’avec l’accélération du retour des chômeurs sur le marché du travail. Cela atténuera la pression sur les consommateurs, sur les taux d’intérêt et sur les entreprises. Et cela créera également un contexte favorable aux actions.
  3. La patience de la Fed
    Confrontée à un contexte économique incertain, la Fed fera probablement preuve de prudence. Ainsi, elle devrait encore patienter avant de relever ses taux. A l’issue de sa réunion du mois de novembre, la banque centrale a notamment souligné que les données économiques, aussi bien sur le front de l’inflation que sur celui de l’emploi, étaient faussées par la pandémie et que les responsables politiques devaient éviter de surréagir. 
    Par conséquent, même si l’inflation plus élevée mettra à l’épreuve la patience des responsables de la Fed, ces derniers seront soucieux de ne pas pénaliser l’économie avec un resserrement monétaire prématuré qui étoufferait la croissance.
  4. Des bénéfices plus élevés que prévu
    L’approche de la Fed devrait ainsi permettre aux investisseurs de rester focalisés sur les solides fondamentaux des entreprises, ce qui est de nature à entretenir le rebond des actions. 92% des entreprises du S&P 500 ont publié leurs résultats relatifs au troisième trimestre: 80% d’entre elles ont dépassé les prévisions, contre 76% en moyenne sur les cinq dernières années. Malgré les difficultés d’approvisionnement, les chiffres d’affaires sont ressortis en hausse de 17% en glissement annuel et ils se sont avérés supérieurs de 2% (valeur médiane) aux estimations. 
    La solide demande permet aux entreprises de répercuter la hausse de leurs coûts. D’ailleurs, au troisième trimestre, la marge bénéficiaire des entreprises du S&P 500 est restée stable à un niveau historiquement élevé. Dans l’ensemble, les bénéfices du troisième trimestre sont en hausse de plus de 38% sur un an, soit 10 points de pourcentage de mieux que prévu. 
    En Europe, environ 89% des entreprises ont publié leurs résultats et 72% d’entre elles ont annoncé un bénéfice supérieur aux estimations. A l’échelle mondiale, la Recherche d’UBS table sur une progression du bénéfice par action de 43% en 2021 et de 9% en 2022. Compte tenu des solides résultats des entreprises, les actions auront sans doute le vent en poupe sur cet horizon de prévision.
Il est recommandé de privilégier les titres appelés à surfer sur la croissance mondiale.
Qu’est-ce que cela implique pour les investisseurs?

Même si l’indice S&P 500 flirte toujours avec ses sommets historiques, la forte croissance du PIB et des bénéfices, conjuguée aux politiques accommodantes, devrait l’emporter sur l’inquiétude suscitée par l’inflation et entretenir la progression des actions. Il est recommandé de privilégier les titres appelés à surfer sur la croissance mondiale, notamment ceux issus des secteurs de l’énergie et de la finance, les moyennes capitalisations américaines, ainsi que les actions japonaises et celles de la zone euro. 

Alors que l’inflation devrait rester élevée pendant quelques mois encore et que les taux devraient rester bas, la destruction de richesse est une issue probable pour ceux qui détiennent des liquidités ou des obligations de grande qualité. Néanmoins, il devrait être possible d’engranger un rendement réel positif avec les «senior loans» américains, les obligations asiatiques à haut rendement, certaines devises, ainsi qu’avec d’autres sources de rendement non conventionnelles comme la dette non cotée.

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