- La prédominance des États-Unis sur l’échiquier mondial est remise en question par la montée du protectionnisme, les déséquilibres budgétaires et le recul de la demande pour le dollar et les bons du Trésor.
- La croissance mondiale devrait ralentir pour s’établir à 2,75%-3%, tandis que l’inflation devrait rester supérieure à l’objectif à court terme avant de diminuer en 2026. Les banques centrales devraient dans l’ensemble continuer à réduire leurs taux, et notamment la Fed et la Banque d’Angleterre, qui devraient les abaisser progressivement en 2025 et 2026.
- Aviva Investors conserve un optimisme prudent pour le reste de l’année, adoptant les positions suivantes: légère surpondération des actions, positionnement neutre vis-à-vis des obligations souveraines, prédilection pour le crédit européen et large sous-pondération du dollar américain.
Aviva Investors, la division de gestion d'actifs internationale d’Aviva PLC («Aviva»), estime que la prédominance des États-Unis à l’échelle mondiale continuera d’être mise à mal. La montée du protectionnisme, les déséquilibres budgétaires ainsi que le recul de la demande pour le billet vert et les bons du Trésor sont autant de freins importants qui entretiendront la volatilité du paysage économique, largement tributaire des décisions du locataire de la Maison-Blanche.
Les droits de douane resteront déterminants, de nouveaux impôts devant être imposés sur les produits pharmaceutiques, les semiconducteurs et les importations connexes. Le taux effectif des droits de douane pourrait certes fluctuer (à la hausse ou à la baisse) au cours des semaines et des mois à venir au gré des accords commerciaux conclus, mais il ne devrait pas changer radicalement selon nous. Si la lumière se fait peu à peu sur le niveau définitif des droits de douane, il est par contre encore impossible de prédire les conséquences sur l’économie américaine et mondiale d’une multiplication par six (environ) des tarifs douaniers américains, qui atteindront des niveaux inédits depuis les années 1930.
Les perspectives d’inflation se maintiennent globalement à un niveau supérieur à l’inflation cible, mais qui se dirige progressivement vers le seuil d’environ 2%. Aux États-Unis, l’inflation a reculé dans une mesure plus importante que prévu ces derniers mois, et l’effet des droits de douane n’est pas encore visible. Il ne devrait toutefois pas manquer de se faire sentir dans les prochains mois, avec une reprise de l’inflation tant globale que sous-jacente, qui devrait augmenter à quelque 3,5%-4%.
L’équipe d’investissement table sur une croissance mondiale d’environ 2,75% à 3% en 2025-2026, moyennant toutefois un environnement économique toujours volatil et dicté par les décisions du président D. Trump. Ce scénario, bien qu’il n’envisage pas de récession dans les grandes économies, représenterait cependant le rythme de croissance mondiale le plus lent de ces dernières décennies, si l’on exclut les récessions majeures.
Le ralentissement de la croissance économique sera particulièrement marqué aux États-Unis, où elle devrait diminuer de moitié cette année pour ressortir à 1,4%. La hausse des droits de douane devrait entamer le revenu disponible des ménages ainsi que les marges des entreprises, entraînant un ralentissement des dépenses de consommation et des investissements. Ce choc induit une situation de stagflation, qui devrait inciter la Réserve fédérale à se montrer prudente dans ses baisses de taux et à conserver une politique monétaire légèrement restrictive au cours de l’année à venir.
En parallèle, le démarrage en force observé au Royaume-Uni début 2025 devrait ralentir, la croissance sous-jacente s’avérant sensiblement plus faible que ne le suggère le PIB global. Si la hausse récente de l’inflation due aux prix appliqués et à l’indexation ne vient pas bousculer les anticipations d’inflation, la Banque d’Angleterre devrait pouvoir continuer à diminuer ses taux. Toutefois, l’inflation sous-jacente demeure tenace par endroits, et le cycle d’assouplissement pour parvenir au taux définitif de 3,25% prend donc plus de temps que prévu initialement (une réduction par trimestre).
Dans la zone euro, le ralentissement de la croissance salariale devrait se poursuivre, alimentant les moteurs désinflationnistes. L’amélioration de la croissance devrait néanmoins permettre une stabilisation de l’inflation aux alentours de 2%, et notre scénario de base estime par conséquent que la BCE en a terminé avec son cycle d’assouplissement, ou pourrait procéder à une baisse supplémentaire de 25 pb pour atteindre 1,75%.
S’agissant de l’allocation d’actifs, les incertitudes entourant les perspectives persistent, mais l’équipe d’investissement d’Aviva Investors estime que la probabilité d’une politique commerciale hautement perturbatrice et, partant, le risque de récession ont diminué.
Au volet actions, la légère baisse de valorisation observée récemment, la forte croissance du BPA, les bilans sains, les marges élevées et les taux réduits suggèrent un potentiel de légère progression au second semestre, de sorte que l’équipe surpondère cette catégorie d’actifs. En ce qui concerne les obligations, l’équipe adopte un positionnement globalement neutre vis-à-vis des emprunts d’État, préférant surpondérer légèrement les titres britanniques et sous-pondérer leurs homologues américains et allemands d’échéance plus longue, faisant écho à la probabilité de baisses de taux plus rapides de la part de la Banque d’Angleterre et à l’impact d’une politique budgétaire plus souple aux États-Unis et en Allemagne.
Sur les marchés du crédit, les spreads se sont contractés et les obligations d’entreprises se négocient de nouveau à des niveaux historiquement restreints, reflétant des fondamentaux de crédit et des facteurs techniques bien orientés. Les gains potentiels sont toutefois limités face aux pertes pouvant être subies si les risques économiques se concrétisent. L’équipe d’investissement privilégie donc une position neutre, avec un biais en faveur de l’Europe par rapport aux États-Unis ou aux marchés émergents en devises fortes. Sur le front des changes, l’équipe est convaincue que le dollar continuera de faiblir: la trajectoire budgétaire américaine ébranle les participants au marché, lesquels exigeraient donc des rendements plus élevés ainsi qu’un taux de change plus faible pour continuer de prêter aux États-Unis. En d’autres termes, le déclin de l’exceptionnalisme américain entraînera une hausse de la prime de risque dans le pays et devrait rester un frein pour le dollar.
Michael Grady, responsable de la stratégie d’investissement et économiste en chef chez Aviva Investors: «Pendant des décennies, les États-Unis ont affirmé leur suprématie à l’échelle mondiale. Mais l’exceptionnalisme américain perd-il aujourd’hui de sa superbe? L’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche s’est accompagnée d’une augmentation considérable de la volatilité politique, économique et de marché. Le statut du dollar en tant que monnaie de réserve et le rôle joué par les bons du Trésor au sein des portefeuilles sont eux aussi remis en question dans un contexte d’exposition titanesque au niveau mondial. Les déséquilibres des investissements pourraient alimenter une transition vers les actifs hors États-Unis et se solder par un affaiblissement du dollar. À plus long terme, cela dit, il y a des raisons de croire que la performance du marché actions américain pourrait être aussi solide que par le passé. Les investisseurs étrangers, auparavant désireux de conserver une exposition à la performance des actifs sous-jacents ainsi qu’au billet vert, pourraient toutefois aspirer à autre chose aujourd’hui.»
La publication trimestrielle d’Aviva Investors, House View, présente les meilleures opinions collectives de l’entreprise sur l’environnement d’investissement actuel et futur, et explique le processus de réflexion et les raisons sur lesquels se basent nos opinions économiques et décisions d’investissement.
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