Il faut davantage de vaccinations, surtout dans les pays émergents

Chris Iggo, AXA Investment Managers

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Une fin de la pandémie contribuerait à rétablir les chaînes logistiques et à éliminer les distorsions pour les entreprises et certains moteurs de l’inflation.

Ce n’est plus «provisoire» 

Le pronostic actuel des économistes relatif à la variation mensuelle de l’indice des prix à la consommation des Etats-Unis s’élève, selon Bloomberg, à 0,7% pour le mois de novembre. Ceci correspondrait à un taux d’inflation de 6,8% par rapport à l’année antérieure. Ainsi, l’inflation totale aux Etats-Unis dépasserait également la marge des six pour cent au début de 2022. La baisse des prix du pétrole contribuera à diminuer le taux d’inflation global. Toutefois, les chiffres devraient confirmer qu’il est nécessaire de supprimer le terme «provisoire» – comme l’a proposé Jerome Powell, président de la Federal Reserve (Fed), la semaine dernière. D’un point de vue général, le taux d’inflation annuel va diminuer l’année prochaine, tout en demeurant la plupart du temps à au moins quatre pour cent. L’inflation et ses conséquences pour les taux d’intérêt, les rendements obligataires et la valorisation des actions vont rester un des soucis principaux des investisseurs. Les rendements attendus pour les obligations individuelles ne semblent pour la plupart pas correspondre au schéma inflationniste annoncé pour l’année prochaine. Les obligations indexées sur l’inflation ou les titres au taux d’intérêt supérieur demeurent la meilleure option.  

Vent de face 

Les taux d’intérêt et l’inflation sont deux des facteurs auxquels les investisseurs doivent faire face. Il y a un troisième facteur, à savoir le variant Omikron qui est capable de semer à nouveau le trouble dans l’activité commerciale. La volatilité du marché des actions a réagi dans le monde entier à l’annonce de nouvelles limitations des déplacements et de la distanciation sociale. La situation pourrait s’aggraver encore avant de voir poindre une amélioration à l’horizon. La combinaison d’une baisse de la croissance et d’une hausse de l’inflation exige des primes supérieures sur les risques, dans toutes les catégories d’actifs. 

Mean Reversion – Retour à la moyenne 

Cette année, l’évolution du marché a reflété la phase reflationniste subie par l’économie mondiale. Les actions à haut bêta ont affiché les meilleurs résultats alors que les obligations sur une longue durée, dont le profil de rendement réagit le plus sensiblement aux modifications des attentes inflationnistes, ont donné les plus mauvais résultats. La différence au niveau du rendement global, entre le S&P Growth Index et le US-Treasury 10-yr plus Index, était de 30%. Néanmoins, l’histoire montre que l’écart devrait être moins important en 2022 – avec un certain retour à la moyenne pour les rendements relatifs. Nous avons toujours souligné que les rendements des obligations caractérisées par une duration élevée et les rendements des investissements à risque, présentent une corrélation négative quand la marge d’action est étroite. L’année prochaine, une approche équilibrée des obligations et des actions pourrait s’avérer fructueuse. Ces deux indices représentatifs montrent qu'au cours des 25 dernières années, les rendements négatifs des actions ont été compensés chaque année par des rendements obligataires positifs.  

Options défensives 

Tous ceux qui ont des doutes quant aux résultats de 2022, peuvent choisir parmi différentes options défensives. Les obligations à taux d’intérêt variable et les obligations à courte duration ont un faible risque descendant, même si, comme les titres adossés à actifs (Asset-Backed Securities) et les titres de créance collatéralisés (Collateralised Loan Obligations, CLO), elles sont fortement associées à un crédit. Nous sommes d’avis que le risque de défaillance reste faible, mais pour les titres à longue duration issus du secteur des obligations d’entreprise, le rendement excédentaire offert par le Credit Spread pourrait ne pas suffire si le composant duration du rendement continue à être volatil. Les rendements des obligations d’entreprise Investment-Grade sont restés pour la plupart inchangés cette année, et nous pensons que ce sera également le cas l’année prochaine. Sauf si les rendements sans risque diminuent fortement. 

COP26 et risques climatiques 

Passons à un autre thème qui jouera un rôle de plus en plus important pour les investisseurs, à savoir la réaction au changement climatique. Certes, la COP26 peut afficher un bilan positif, mais le plus important, c’est que: Il n’existe aucune garantie que le monde est capable de limiter la hausse des températures de l’atmosphère à plus de 1,5 degré Celsius d’ici 2050. C’est pourquoi, les risques physiques et transitoires vont devenir plus importants pour les entreprises et les investisseurs. Même si nous sommes loin du pic en matière de réchauffement global, les événements météorologiques extrêmes et les catastrophes climatiques vont probablement apparaître plus fréquemment. Les investisseurs doivent faire face aux pertes dues à ces événements qui se répercutent sur les entreprises. Par ailleurs, les risques transitoires vont augmenter étant donné que nous ne sommes pas encore sur le droit chemin.  

Tarification des risques 

Il devient de plus en plus fréquent et plausible d’identifier ces risques climatiques et de leur attribuer un prix. A cet effet, le recours plus fréquent à la tarification du carbone aiderait, mais les modèles d’évaluation peuvent prendre en compte différents scénarios de valorisation du CO2 pour évaluer la Value-at-risk potentielle. Il est normal et bon que les investisseurs soient à la recherche de rendements potentiels supérieurs pour les valeurs patrimoniales soumises à un risque physique ou transitoire plus élevé. Cette situation pourrait se renforcer si davantage d’investisseurs optent pour des actifs verts et plus rarement pour des actifs marrons. Les stratégies climatiques plus actives et plus ciblées tiendront également compte d’une transition de manière à obtenir davantage de clarté sur les émissions futures et donc sur les risques associés à un portefeuille pour des entreprises données. 

Préparez-vous 

Pour les prochaines années, les investissements devraient respecter deux principes majeurs: la diversification et la gestion du risque associé au carbone. Par ailleurs, il faudra prévoir une protection dans le cas où l’inflation serait plus élevée, avec pour conséquence une érosion des rendements réels ainsi qu’une éventuelle réévaluation des valeurs patrimoniales exigée par la situation politique. Tandis que les problèmes d’offre s’affaibliront probablement, la transition énergétique pourrait entraîner d’autres poussées de l’inflation. Les stratégies inflationnistes sur le court terme resteront donc une option intéressante. En ce qui concerne la croissance, les énergies renouvelables et les technologies axées sur le climat, ainsi qu’un fort engagement dans le secteur des tendances numériques assureront la croissance sur le long terme. Au niveau régional, l’Europe est moins sujette à l’inflation endémique et au resserrement de la politique monétaire que les Etats-Unis. Et pour ce qui est des actions, les actions européennes ont certainement un avantage en matière de valorisation. Au final, la Value Trade pourrait bénéficier l’année prochaine d’une reprise des valeurs patrimoniales asiatiques.  

Davantage de vaccinations au niveau mondial 

Pour l’année 2022, le développement le plus optimiste serait quelque chose capable de mettre fin à la pandémie. Dans les pays émergents, les taux de vaccination doivent augmenter considérablement pour empêcher la propagation d’autres mutations. Il n’y a que très peu de pays qui affichent un taux de vaccination complète de la population supérieur à 80%. Et ce qui est encore plus préoccupant, c’est le fait que dans de nombreux pays émergents, le taux de vaccination est nettement inférieur à 50%– dont, selon les données de «Our World in Data» les pays très peuplés comme l’Indonésie (35,3%), la Russie (39,6%) et l’Afrique du Sud (24,65%). Le fait qu’une coopération internationale soit possible pour tenter de faire face au réchauffement climatique alors que nous semblons incapables de lutter ensemble contre un virus malgré l’existence des moyens et de l’expérience nécessaires, prête à réflexion. Si cette situation persiste, nous devrons continuer à subir d’autres vagues d’infections, d’autres répercussions sur le commerce international et l’activité économique, sans parler d’une augmentation du risque de stagflation. Ceci serait extrêmement mauvais pour les rendements d’actifs. En 2020, le développement de vaccins a permis aux marchés d’aller de l’avant – l’année prochaine, nous devons faire de grands progrès dans la distribution des vaccins afin d’atteindre l’immunité globale et de réaliser une répartition équitable de la prospérité globale.

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