Europe vs USA: ce n’est qu’une question de valeur

George Curtis, TwentyFour Asset Management

2 minutes de lecture

Investir en Europe ou aux USA? La réponse n’est pas si simple.

Investir dans plusieurs devises (fortes) implique la quête permanente d’opportunités de valeur relative dans différentes régions pour trouver la meilleure d’entre elles. En ce moment, l’une des questions qui revient le plus souvent est celle de savoir s’il vaut mieux se positionner sur l’Europe (Royaume-Uni inclus) ou les Etats-Unis.

Avec la problématique du gaz en Europe qui semble nous conduire tout droit vers un rationnement cet hiver, et la Banque d’Angleterre qui prédit cinq trimestres de croissance négative au Royaume-Uni, on pourrait croire à tort que le choix est facile. Il le serait si les rendements étaient les mêmes sur une base couverte contre le risque de change. Dans ce cas, une allocation fortement orientée sur les USA serait une stratégie prudente à l’heure actuelle.  

Une base couverte est importante

Les environnements économiques contrastés de chaque côté de l’Atlantique se sont récemment traduits par des sous-performances sur le marché du crédit européen face à son équivalent américain, mais ces économies sont à notre avis plus connectées entre elle que ne le suggère actuellement le marché; toutes deux sont axées sur la consommation et subissent une inflation galopante qui pèse fortement sur le porte-monnaie. Nous avons déjà eu deux trimestres de croissance négative aux USA, et entendu des membres de la Fed déclarer récemment qu’ils ne pensaient pas pouvoir faire reculer l’inflation sans provoquer une récession (à l’image du président de la Fed de Minneapolis Neel Kashkari, connu pour son orientation accommodante).

Une allocation top-down doit aller de pair avec une sélection bottom-up rigoureuse.

Pour nous, la décision de l’allocation entre l’Europe et les USA revient donc comme toujours à une question de valeur relative sur une base couverte contre le risque de change. Pour être clair, investir en euros avec une couverture en dollars débouche actuellement sur un rendement additionnel de plus de 240 pb.

La relation s’est inversée dans le haut rendement

Si l’on considère la valeur relative sur les marchés à haut rendement, il est intéressant de voir que la relation historique entre l’Europe et les Etats-Unis a pris un tournant significatif durant la période post-COVID. Entre 2013 et 2021, le haut rendement européen se négociait en moyenne 60 pb de moins que haut rendement américain (sur la base du spread ajusté des options), sans doute soutenu par une politique monétaire très favorable en Europe et un indice du haut rendement européen de meilleure qualité qui est nettement moins exposé à des titres mal notés dans les secteurs du pétrole et du gaz.

Depuis début 2022, cette relation s’est toutefois inversée avec un indice du haut rendement européen qui se négocie actuellement 90 pb de plus que l’indice américain. Si ce changement est en partie lié aux risques économiques à court terme en Europe, il faut noter que l’indice du haut rendement européen est à la fois mieux noté (BB- contre B+ aux USA) et plus court (duration du spread de crédit de 3,4 ans contre 4,1 ans), avec un rendement minimum de près de 8,5% en dollars contre 7,4% pour son homologue américain. Historiquement, le haut rendement européen se caractérise également par un taux de défaut beaucoup plus bas (1,8% contre 3,5% aux USA).

Par conséquent, le débat sur l’allocation européenne vs. américaine est complexe et va bien au-delà d’une vision fondamentalement régionale des deux économies.

Les secteurs gourmands en énergie doivent être évités

Au final, il y aura de bonnes opportunités bottom-up dans les deux régions étant donné que les rendements sont nettement supérieurs à la moyenne de long terme. Mais la question de l’allocation régionale pour un investisseur couvert contre le risque de change doit se ramener à la valeur relative, et il est certain que l’Europe présente elle aussi des opportunités attrayantes.

Comme toujours, une allocation top-down doit aller de pair avec une sélection bottom-up rigoureuse: pour nous, cela signifie qu’il faut réduire autant que possible l’exposition aux secteurs les plus gourmands en énergie tels que la chimie, le papier et les emballages, et bien sûr privilégier les entreprises qui disposent d’un fort pouvoir de fixation des prix.

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