Encore plus de rendement en vue dans les obligations à taux variable

Pauline Quirin, TwentyFour Asset Management

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Les taux d’intérêt augmentent – avec quelles conséquences pour les marchés obligataires?

Ces dernières semaines, la Banque centrale européenne, la Réserve fédérale américaine et la Banque d’Angleterre ont toutes procédé à des hausses de taux substantielles de respectivement 50 pb, 75 pb et 50 pb. La Fed et la BoE sont déjà bien avancées dans leur cycle de hausse tandis que la BCE vient de l’amorcer, mais la dynamique se poursuivra probablement pour toutes les trois. Malgré le dernier relèvement de la BoE, la fonctionnalité WIRP (Probabilité des taux d’intérêt mondiaux) de Bloomberg anticipe une hausse du taux directeur à près de 3% au T1 2023 pour le Royaume-Uni (à partir de leur nouveau niveau actuel de 1,75% aujourd’hui). Aux Etats-Unis, les taux passeront de 2,5% aujourd’hui à 3,5% l’année prochaine et dans la zone euro, ils seront supérieurs à 1% (zéro aujourd’hui).

Hausse des rendements pour les investisseurs nouveaux et existants

Bien sûr, la hausse des taux signifie que les prix des obligations à taux fixe (où les coupons restent identiques pendant toute la durée de vie du titre) se sont ajustés à la baisse, de sorte que leur rendement augmente pour être en phase avec le taux d’intérêt plus élevé. Si c’est une bonne nouvelle pour les nouveaux investisseurs, ce n’est pas le cas pour les investisseurs existants qui sont liés à des rendements plus bas et voient la valorisation de leurs placements diminuer à court terme. La situation est différente pour les obligations à taux variable, puisque les coupons de ces titres augmentent en ligne avec chaque hausse du taux de référence. Cela laisse le prix de l’obligation relativement inchangé, et les détenteurs existants tout comme les nouveaux investisseurs bénéficient de la hausse du rendement à terme. Plus les taux augmentent pendant la durée de vie de l’obligation, plus le rendement sera élevé, mais avec peu ou pas d’impact sur le prix.

Pour une obligation à trois ans, avec quelque 250 jours ouvrés par an, il faudrait donc produire environ 750 estimations futures du taux au jour le jour puis toutes les agréger.
Rendement supplémentaire – comment est-il calculé?

La quasi-totalité des titres émis par les marchés d’ABS et de CLO européens sont des obligations à taux variable. Ensemble, elles représentent le seul marché du crédit à taux variable à grande échelle en Europe, car les autres secteurs sont presque tous dominés par les émissions à taux fixe. Les ABS et les CLO offrent également une vaste gamme d’obligations comprises dans la fourchette des notes AAA jusqu’à B, ce qui permet aux investisseurs de choisir leur degré d’appétit pour le risque crédit en plus de l’avantage d’un taux d’intérêt variable. Avec un taux variable, le calcul du rendement réel implique toujours une certaine estimation. Nous ne savons tout simplement pas quelle sera la valeur exacte de l’indice de référence sous-jacent dans le futur (SONIA, Euribor etc.) pendant la durée de vie de l’obligation – et nous devons donc l’estimer. Ces 10 dernières années, les taux d’intérêt sont généralement restés proches de zéro; légèrement négatifs dans la zone euro et légèrement positifs au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, mais sans variations notables. Par conséquent, nous n’avons pu que partir de l’hypothèse d’un taux de référence qui resterait globalement identique pendant la durée de vie de l’obligation pour calculer un rendement estimé. Ce ne sera jamais parfait, mais étant donné que la plupart des obligations ont des maturités relativement courtes, notre approche s’est avérée suffisamment précise durant cette période pour fournir aux investisseurs une bonne estimation du niveau de rendement auquel ils pouvaient s’attendre.

‘Flat yield’ et ‘forward yield’

Avec la hausse actuelle des taux d’intérêt, nous avons besoin d’une meilleure estimation du niveau qu’ils atteindront pendant la durée de vie de l’obligation afin de pouvoir calculer plus précisément son rendement futur. Il s’agira toujours d’une estimation, mais nous voulons nous assurer que ce soit la meilleure possible. Nous pourrions opter pour une approche vraiment granulaire et tenter d’estimer quel sera le niveau du taux de référence à chaque date future. Au Royaume-Uni, le Libor a été remplacé par le SONIA, un taux d’intérêt au jour le jour composé quotidiennement pour établir les coupons mensuels ou trimestriels. Pour une obligation à trois ans, avec quelque 250 jours ouvrés par an, il faudrait donc produire environ 750 estimations futures du taux au jour le jour puis toutes les agréger.   

La bonne nouvelle est que les marchés des swaps ont déjà fait tout ce travail pour nous. A titre d’exemple, le taux swap à trois ans représente en substance la valeur actuelle (ou moyenne pondérée) de ces 750 projections de taux journaliers. Pour nos obligations, nous pouvons donc simplement nous baser sur le taux swap interpolé en fonction de la maturité du titre, et ajouter le spread de crédit pour calculer notre rendement estimé. Au niveau du portefeuille, nous pouvons faire la même chose pour chaque titre dans sa devise respective (avec un réajustement dans la devise de base si nécessaire), puis calculer la moyenne pondérée afin d’obtenir le rendement à terme attendu pour le portefeuille. Ces rendements à terme sont actuellement intéressants pour les investisseurs à revenu fixe, car comme mentionné plus haut, la dynamique de hausse des taux d’intérêt va se poursuivre. Les marchés ont déjà intégré ces changements dans les obligations à taux fixe (en baissant leur prix et en augmentant leur rendement), mais dans le secteur du taux variable, les rendements continueront à progresser jusqu’à ce que la hausse des taux s’arrête.

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