Le sommet Building Bridges a permis faire le point sur l’avancée de l'intégration des critères de durabilité dans les processus d’investissement.
Tout le monde, ou presque, s’accorde aujourd’hui sur la nécessité d’intégrer les principes de la finance durable dans les processus d’investissement. La question qui, en revanche, continue de se poser est celle de définir exactement ce qu’est la finance durable – et aussi à quel rythme il faut appliquer les exigences qui en découlent. Le sommet Building Bridges, qui s’est tenu jeudi à Genève, a été l’occasion d’assister à de nombreux débats sur ces questions.
A commencer par celui de la définition des critères de durabilité. «Nous avons aujourd’hui besoin de normes partagées et d’un langage commun en matière de finance durable», a souligné Philipp Rickenbacher, le directeur de Julius Baer. Selon lui, même les critères environnementaux – soit le «E» parmi les critères ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) – ne sont pas encore clairement définis. «Nous avons besoin d’indicateurs communs qui permettent de mesurer véritablement l’impact environnemental des investissement», a ajouté le nouveau directeur de la banque zurichoise depuis septembre.
Pour Sergio Ermotti, le directeur d’UBS, la Suisse devance de nombreux autres pays s’agissant de l’adoption des critères d’investissement durable. En Suisse, un cinquième des montants investis par le secteur financier le sont en conformité avec les critères ESG, comparé à seulement un peu plus d’un dixième sur le plan mondial.
de l’autre, de continuer de financer les énergies fossiles.»
Pour Thomas Vellacott, directeur du WWF en Suisse, il faudra toutefois élargir le périmètre d’analyse des investissements qui sont conformes ou non avec les principes de durabilité. «Jusqu’ici, l’accent a avant tout été placé sur la gestion d’actifs. Il est maintenant nécessaire de considérer l’ensemble des investissements qui sont effectués par le secteur financier. Il n’est pas possible de proposer, d’un côté, des produits disposant de labels ESG et, de l’autre, de continuer de financer en même temps les énergies fossiles», a insisté le directeur qui a lui-même auparavant travaillé dans le secteur financier.
Quelle est la part des montants investis en conformité avec les principes de la finance durable chez UBS? Sans fournir de chiffres précis à ce sujet, Sergio Ermotti, le directeur d’UBS, a estimé que les fonds gérés par la grande banque qui tiennent compte des seuls critères d’exclusion représentent environ le tiers de l’ensemble de la masse sous gestion du groupe qui dépasse les 3 trillions de dollars. En appliquant des critères plus approfondis, les fonds gérés conformes aux critères ESG représentent, eux, le quart du total.
par des agences ou des sociétés d’analyse tierces.
Interrogé en marge de la conférence, Philipp Rickenbacher, le directeur de Julius Baer, a aussi admis qu’il est difficile de mesurer précisément quels étaient les volumes investis en conformité avec les critères ESG ou non par son établissement. «Nous avons essayé d’intégrer cette dimension dans tous nos métiers pour évaluer quelle était la part des actifs investis en conformité avec les principes de l’investissement durable. C’est un exercice qui est très difficile à réaliser car il faut appliquer une méthode de calcul différente pour chaque segment – aussi bien pour les mandats discrétionnaires que pour ceux de conseil. Pour les approches d’investissement plus spécialisées, comme la finance d’impact ou la microfinance, il est plus facile de disposer de données sur les volumes investis», a illustré le directeur de la banque zurichoise. Côté recherche, Julius Baer ne se satisfait pas de s’appuyer sur les données fournies par des agences ou des sociétés d’analyse tierces mais que la banque dispose désormais de sa propre équipe spécialisée dans les questions de durabilité, a précisé son directeur.
Parmi l’ensemble des critères en lien avec la finance durable, les aspects liés à l’environnement ont évidemment occupé une place de choix lors de l’événement. Pour Patrick Odier, associé-gérant chez Lombard Odier et président de la conférence, le secteur financier ne doit plus se limiter à accompagner les entreprises dans le cadre de la transition énergétique mais également soutenir les sociétés qui apportent de nouvelles solutions. «Notre rôle est aussi d’encourager les entreprises qui ont des idées et des solutions créatives pour préserver l’environnement», a-t-il souligné.
qui pourraient résulter d’une transition énergétique trop rapide.
Reste à savoir à quel rythme il est possible de passer d’un mode de fonctionnement qui émet de grandes quantités de CO2 à une économie neutre en carbone. A ce sujet, Sergio Ermotti a averti des éventuels «dommages collatéraux» qui pourraient résulter d’une transition énergétique trop rapide. Si l’on retire trop rapidement certaines sources d’énergie du système de production et de distribution, il y a un risque que l’on déstabilise l’approvisionnement énergétique de certains pays, ce qui serait contreproductif, a avertit le directeur d’UBS.