Des risques d’un hiver baissier

Bruno Cavalier, ODDO BHF AM

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L’inflation et la possibilité d’une nouvelle vague épidémique viennent plomber la confiance des consommateurs.

En octobre, l’inflation du CPI est ressortie au-dessus de 6% aux Etats-Unis et de 4% en Europe. Les tensions inflationnistes ne se modèrent toujours pas en amont de la chaîne des prix tant la demande dépasse l’offre. En somme, les ménages se plaignent de l’inflation mais continuent de dépenser. Les carnets de commandes sont bien garnis mais les firmes peinent à produire et livrer rapidement. Et il n’y a pas de solution miracle à court terme. 

Aux Etats-Unis, les informations partielles sur le climat des affaires à la mi-novembre restaient encourageantes. La situation est un peu différente en Europe. Tout d’abord, le cœur industriel du continent, représenté par l’Allemagne et son secteur automobile, souffre beaucoup de la pénurie de composants. De plus, les restrictions sanitaires font leur retour dans différents pays en réponse à l’amorce de la vague hivernale de coronavirus. 

Cette vague de COVID-19 devrait être moins intense que les autres mais il y a malgré tout de quoi dégrader la confiance.

A la différence de l’hiver 2020, une large partie de la population est vaccinée, ce qui est supposé réduire le risque d’infection et plus encore le risque de décès. Cette vague devrait être moins intense que les autres mais il y a malgré tout de quoi dégrader la confiance, surtout dans les services où les interactions sociales sont incontournables. En zone euro, le PMI-composite a passé son pic en juillet dernier, à 60,2 points; en octobre, il pointait à 54,2. Dans l’absolu il s’agit là d’un niveau élevé, associé à une expansion de l’activité économique, mais le momentum de croissance est de toute évidence en train de se modérer au quatrième trimestre.

La confiance plafonne en Europe

Depuis le printemps, les ménages européens ont davantage réagi à l’amélioration des conditions sanitaires et à la hausse de l’emploi qu’à la montée des prix. La confiance avait donc rebondi cet été mais désormais elle plafonne. La nouvelle vague de contaminations a poussé plusieurs pays à réinstaurer de nouvelles restrictions comme des confinements ou une obligation du télétravail. Cela pourrait avoir un effet négatif sur le moral des consommateurs, d’autant que l’inflation reste forte. 

L’économie mondiale continue de connaître de nombreuses perturbations de la chaîne de production et de livraisons. Cela reflète en large partie le boom de la demande, notamment pour les biens manufacturés. Les entreprises engrangent les commandes, ce qui est positif pour le climat des affaires, mais font aussi face à un renchérissement de leurs prix d’input, ce qui est négatif pour leurs marges – sauf répercussion sur le consommateur final. Les PMI ont passé leur pic plus tôt cette année, mais restent encore souvent à des niveaux élevés ou, en tout cas, en zone d’expansion. Certaines branches industrielles, comme le secteur automobile, pâtissent des pénuries. Les activités de services sont maintenant exposées à la résurgence hivernale de l’épidémie de coronavirus. L’Allemagne est exposée à ces deux risques en même temps. Cela peut expliquer pourquoi son PMI-composite ressortait dernièrement à un plus bas niveau (52 points) que les autres grands pays développés (France: 54,7, UK: 57,8, US: 57,6).

Les entreprises françaises sont très optimismes, les firmes allemandes plus inquiètes.

Les deux enquêtes nationales de climat des affaires de l’INSEE et de l’Ifo ont indiqué des résultats quelque peu divergents entre la France et l’Allemagne ces derniers mois. Les entreprises françaises sont très optimismes, les firmes allemandes plus inquiètes. L’Allemagne est en effet plus exposée aux pénuries frappant l’industrie. La France a, quant à elle, jusqu’à présent un peu mieux réussi sa campagne vaccinale, ce qui bénéficie aux services. L’inflation reste cependant le problème principal qui vient peser sur la confiance des consommateurs dans les deux pays.

La Fed reste sous pression

Aux Etats-Unis, le marché immobilier profite de conditions de financement attractives. Les promoteurs font preuve d’un grand optimisme et, malgré des prix élevés, la demande de logements tient toujours à des hauts niveaux. Les commandes sous-jacentes de biens durables ont-elles dépassé en 2021 un plafond qui n’avait pas été approché depuis plus de vingt ans. C’est l’un des effets induits positifs de la pandémie. La forte hausse des dépenses d’investissement est gage d’accélération des gains de productivité futurs. 

En matière d’inflation, deux indices de prix sont publiés chaque mois. D’abord le CPI puis deux semaines après le déflateur des dépenses de consommation (PCE). La Fed préfère le PCE alors que les médias privilégient le CPI. L’écart entre les deux est, en tendance, faible. Il s’est cependant accru en 2021, certains des prix soumis à de fortes perturbations n’ayant pas le même poids dans ces deux indices. En octobre, le CPI avait bondi de 5,4% à 6,2% sur un an. La hausse du PCE est attendue de 4,4% à 5,1%, rythme inégalé depuis 1990. De quoi mettre encore un peu de pression sur la Fed.

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