La prime offerte sur ce marché illiquide par rapport aux marchés obligataires publics plus liquides attire assurément l’attention des investisseurs.
Les crédits privés sont récemment devenus, pour de nombreux investisseurs et même pour les médias, la classe d’actifs en vogue. La prime offerte sur ce marché illiquide par rapport aux marchés obligataires publics plus liquides, qui a contribué à générer des rendements de 10 à 11% pour les prêts senior de premier rang, attire assurément l’attention des investisseurs. En outre, comme les taux sont susceptibles de rester élevés plus longtemps, les investisseurs sont de plus en plus attirés par la composante taux variable de la classe d’actifs.
Si ces facteurs peuvent justifier l’attention actuelle, la complexité croissante du paysage d’investissement peut toutefois être négligée compte tenu de l’élargissement de l’éventail des opportunités, des nouveaux entrants sur le marché et d’un contexte macroéconomique en constante évolution.
En ce qui concerne le marché, le paysage a évolué cette année en faveur des prêteurs. Au cours des six premiers mois de 2023, lorsque les nouvelles opérations étaient au plus bas, nous avons assisté à une contraction de l’endettement, ce qui n’est pas surprenant compte tenu de la mesure limitée dans laquelle les emprunteurs peuvent s’endetter et se permettre de continuer à couvrir leur dette dans un contexte de hausse rapide des taux. Dans le même temps, la documentation des prêts s’est resserrée et les spreads de la dette senior ont grimpé jusqu’à 650 points de base (pb).
Depuis, le marché est devenu plus concurrentiel. Les spreads de la dette senior se sont resserrés de 50 à 75pb, tandis que l’endettement et la documentation des prêts sont restés globalement stables. Ces facteurs, combinés à des taux de base plus élevés, suggèrent une année en cours particulièrement attrayante. Cela dit, les rendements actuels des prêts senior de premier rang vont devoir se contracter à un moment ou à un autre.
Si les prêts directs présentent de nombreux avantages, la classe d’actifs est également confrontée à des défis. La hausse des taux et l’incertitude macroéconomique accrue ont notamment rendu l’origination de transactions plus difficile. Par exemple, l’activité de fusions-acquisitions financées par des fonds sponsorisés, qui est traditionnellement un moteur important du flux d’opérations de prêt direct, a ralenti cette année. De nombreuses sociétés de capital-investissement enregistrant également une contraction de leurs marges, l’activité de LBO a diminué. Cela a créé un environnement plus difficile pour les gérants qui cherchent à trouver de nouvelles transactions. En particulier, les nouveaux gérants qui tentent d’entrer sur le marché pourraient se retrouver à accepter des opérations moins attractives compte tenu des forces du marché.
Ce devrait être moins le cas pour les prêteurs matures et établis, car ils ont l’avantage de générer des flux de transactions à partir de portefeuilles importants existants. Par exemple, chez Barings, environ 70% de nos transactions en Amérique du Nord proviennent cette année de sociétés en portefeuille existantes, contre 30% habituellement.
Un autre obstacle auquel le marché est confronté est le risque de hausse des défauts. Toutefois, cela devrait avoir un impact sur les entreprises fortement endettées, plus sensibles à la hausse des coûts du service de la dette, ainsi que sur les secteurs cycliques comme la distribution, la restauration et les produits de consommation. Cela dit, et nous l’avons vu tout au long de la pandémie, l’un des avantages des prêts directs par rapport aux marchés largement syndiqués est la capacité des prêteurs à négocier directement avec les sponsors et les emprunteurs pour modifier les conditions ou les structures, dans l’intention d’éviter potentiellement un défaut.
La dynamique du marché des prêts directs est de bon augure, avec des rendements actuels attractifs, un endettement plus faible et une meilleure documentation des prêts. Toutefois, la trajectoire à venir est incertaine et un certain nombre de facteurs pourraient impacter le marché des prêts directs et l’activité de nouvelles opérations à l’avenir.
Chez Barings, nous pensons qu’il est primordial d’adopter une approche prudente et disciplinée en matière de prêts directs, en particulier compte tenu des difficultés liées à l’environnement actuel. Plutôt que de rechercher du rendement par le biais d’un endettement plus élevé ou de clauses restrictives plus souples, nous privilégions les secteurs défensifs et les entreprises fondamentalement solides qui ont une raison d’exister à tous les stades d’un cycle.