Actions suisses: des attentes de bénéfice en hausse pour 2023

Yves Hulmann

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Selon Christian Gattiker, directeur de la recherche chez Julius Baer, le marché helvétique offre des perspectives de gains plus stables qu’en Europe et aux Etats-Unis.

En 2023, l’économie helvétique devrait échapper à une récession. La croissance de produit intérieur brut (PIB) en Suisse devrait atteindre 0,7%, si l’on en croit les prévisions du consensus du Centre de recherches conjoncturelles KOF publiées juste avant Noël. Dans ses prévisions pour 2023, Julius Baer table également sur une croissance du PIB helvétique de 0,7% cette année, soit juste un peu plus que celle attendue aux Etats-Unis (+0,5%) mais un peu moins que dans la zone euro (+0,9%). Pour Christian Gattiker, directeur de la recherche chez Julius Baer, l’économie mondiale s’orientera en direction d’une récession modérée. «En revanche, il est improbable que l’on assiste à une chute brutale de la croissance  en 2023», a-t-il estimé à l’occasion de la présentation des perspectives de Julius Baer pour la nouvelle année.

L’industrie suisse fait preuve d’une bonne résistance

En ce qui concerne la Suisse, Christian Gattiker observe que l’industrie helvétique est parvenue jusqu’ici à résister au ralentissement de l’économie mondiale. Une demande robuste et des goulets d’étranglement au niveau de l’offre caractérisent la situation de l’industrie suisse, observe Julius Baer. «Les principaux problèmes se situent au niveau de l’offre, notamment en raison d’insuffisances de capacités ou en raison de pénurie de personnel dans certains secteurs», analyse-t-il.

Le rendement des dividendes des sociétés du SMI demeure attractif par rapport au marché obligataire.

Et que cela signifie-t-il pour le marché suisse des actions? Selon Philipp Lienhardt, directeur de la recherche pour les actions suisses chez Julius Baer, plusieurs facteurs parlent en faveur des valeurs helvétiques l’an prochain. Certes, la valorisation relative du SMI (rapport cours/bénéfices estimés sur 12 mois) se situe au-dessus de sa moyenne historique. Toutefois, le rendement des dividendes des sociétés du SMI demeure attractif par rapport au marché obligataire. En dépit de la nette remontée du rendement des emprunts de la Confédération à plus de 1% au cours de 2022, ce niveau reste en effet très inférieur au rendement des dividendes offert par les titres du SMI qui dépasse les 3%.

En outre, les perspectives bénéficiaires sont favorables pour le marché suisse des actions. Par rapport à l'Europe et aux Etats-Unis, le marché suisse des actions offre une croissance des bénéfices plutôt stable. Les attentes en matière de bénéfices pour 2023 et 2024 sont même sensiblement plus élevées que pour l’année qui vient de s’achever.

Des estimations de bénéfices en hausse pour les titres du SMI en 2023

Julius Baer anticipe ainsi un net rebond de la croissance des bénéfices estimés des entreprises du SMI qui devrait dépasser les 15% en 2023 en comparaison annuelle, contrastant ainsi avec la quasi-stagnation des bénéfices escomptée pour l’exercice 2022. C’est presque l’exact inverse de l’évolution attendue pour les valeurs incluses dans l’indice Euro Stoxx 50: après une hausse de près de 20% attendue pour 2022, les bénéfices des titres de l’Euro Stoxx 50 ne devraient ensuite pratiquement plus augmenter en 2023. En 2021 et 2022, plusieurs sociétés incluses dans l’Euro Stoxx 50 ont largement profité de la hausse des prix du pétrole et du gaz, ce qui s’est traduit par une forte progression de leurs bénéfices. En 2023, une telle progression ne pourra certainement plus être répétée, ne serait-ce qu’en raison de l’effet de base.

Seul bémol pour les actions suisses: un scénario de large reprise de l’économie et des marchés l’an prochain pourrait réduire l’attrait des valeurs défensives du SMI aux yeux des investisseurs.

Les actions suisses favorites de Julius Baer pour l’an prochain ne font toutefois pas partie de l’indice SMI.
Accelleron profite de la stabilité offerte par ses activités de services

Les actions suisses favorites de Julius Baer pour l’an prochain ne font toutefois pas partie de l’indice SMI. Philipp Lienhardt cite trois valeurs à suivre cette année, qui sont issues de secteurs très différents. La première de ces sociétés est Accelleron Industries. L’ancienne unité d'ABB est active notamment dans les secteurs de la marine, de l'énergie et des rails. Le producteur de turbocompresseurs est leader mondial dans les applications dites «off-highway» et dispose de parts de marché de 40% dans ce segment. La société profite notamment de ses activités de services qui constituent environ 75% de son chiffre d’affaires, lequel croît de manière stable à moyen terme avec un taux situé dans la partie basse d’un taux à un chiffre, tout en promettant une rentabilité en hausse de plus de 20%.

Tecan tire parti de facteurs structurels favorables

Tecan, le fournisseur zurichois d’instruments et de solutions de laboratoire destinés à des entreprises pharmaceutiques et biotechnologiques, des départements de recherche universitaires et des laboratoires de diagnostic, compte aussi parmi les valeurs favorites de Julius Baer. Les marchés dans lesquels la société est active profitent de facteurs structurels qui permettent à ce secteur d’afficher une croissance de son chiffre d’affaires située dans la partie moyenne à haute d’un taux à un chiffre. L’acquisition de la société américaine Paramit, active dans la fabrication d’appareils médicaux, permet aussi à Tecan de développer un nouveau segment d’affaires.

Lindt & Sprüngli: une prime de valorisation entièrement justifiée

Enfin, Lindt & Sprüngli compte aussi parmi les titres favoris de la banque pour l’année qui débute. Depuis 2004, le chocolatier affiche un taux de croissance annuel de 7%, largement supérieur à celui de 2% pour l’ensemble du marché. Son segment des chocolats premium croît aussi davantage que le reste du marché. Le marché des Etats-Unis, qui est depuis peu développé de manière systématique, offre aussi de nouvelles perspectives de croissance à l’entreprise. Certes, l’action Lindt & Sprüngli est déjà chère mais cette prime de valorisation est entièrement justifiée de l’avis de Julius Baer, d’autant plus qu’elle est, en comparaison historique, pas si élevée actuellement, nuance Philipp Lienhardt.

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