Rester attentif aux opportunités d’acquisitions

Yves Hulmann

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Philipp Rickenbacher, directeur de Julius Baer, anticipe aussi un regain d’activité de la part de la clientèle en Asie dès que la pandémie s’affaiblira.

En 2021, Julius Baer a vu ses résultats progresser à pratiquement tous les niveaux. Un bénéfice net record de 1,08 milliard de francs, en hausse de 55% comparé à l’an précédant, le tout accompagné d’un dividende relevé de 49% à 2,6 francs par action. Porté par un afflux net d’argent frais de 19,6 milliards, pratiquement deux fois plus élevé qu’en 2019, les actifs sous gestion ont augmenté à 481,7 milliards de francs à fin décembre, en hausse de 11% sur un an. Après avoir clôturé son programme de rachat d’actions à hauteur de 450 millions de francs fin décembre, le gérant de fortune zurichois a annoncé mercredi vouloir démarrer un nouveau programme pouvant aller jusqu’à hauteur de 400 millions. A la bourse, les chiffres 2021, globalement en ligne avec les attentes, ont été néanmoins accueillis fraîchement par les investisseurs, l’action Julius Baer ayant clôturé la séance de mercredi en baisse de 5,7% à 56,42 francs. Le point avec Philipp Rickenbacher, directeur (CEO) de Julius Baer.

En janvier, les marchés ont été caractérisés par une forte volatilité et un haut degré d’incertitude. Est-ce bon ou mauvais pour vos affaires – quelles sont les premières tendances qui se dégagent pour l’année 2022? 

Nous avons débuté l’année dans un environnement de marché caractérisé par d’importants défis, en particulier concernant la manière avec laquelle les banques centrales vont continuer d’adapter leur politique monétaire. Comment sera-t-il possible de lutter contre l’inflation? Comment peut-on retirer des liquidités sans risquer d’entraîner une récession? L’environnement actuel est marqué par un haut niveau d’incertitude et nous devrons continuer à vivre avec celle-ci. Hormis les taux et l’inflation, il faut aussi compter avec les incertitudes de nature politique, il suffit de penser à la situation en Ukraine. S’y ajoutent aussi les incertitudes à long terme concernant l’évolution économique en général qui ne vont pas disparaître du jour au lendemain, même si la pandémie s’atténue.

«Dans une pure optique d’évolution des affaires, je dirais que le contexte de marché actuel peut être considéré comme constructif.»

En termes d’investissements, un tel environnement s’accompagne typiquement d’une volatilité élevée. Et une volatilité élevée engendre, dans le domaine de la gestion de fortune, normalement non seulement une activité de la clientèle plus élevée mais également une demande en conseils plus importante de la part des clients.

Dans une pure optique d’évolution des affaires, je dirais que le contexte de marché actuel peut être considéré comme constructif. Je suis confiant que 2022 sera marquée par un environnement de marché stimulant pour nos activités.

Si l’on revient aux chiffres de Julius Baer l’an dernier, on observe que les entrées nettes d’argent frais ont certes augmenté avec 19,6 milliards de francs en 2021 comparé à 2020 (15,1 milliards) mais que la dynamique a quelque peu ralenti au deuxième semestre avec 9,7 milliards, contre 9,9 milliards au premier semestre. A quoi attribuez-vous ce léger ralentissement en seconde partie d’année? 

Il est toujours très difficile de trouver une seule cause. Il peut y avoir des facteurs en rapport avec des évolutions spécifiques à certaines régions géographiques, d’autres qui sont de nature plus structurelle ou liés à l’évolution des devises. Il faut aussi tenir compte du fait que l’afflux d’argent avait précédemment déjà été très élevé au second semestre 2020.

Sur le plan géographique, Julius Baer souligne que les contributions ont été élevées de la part des clients domiciliés en Europe de l’Ouest ainsi qu’en Asie, spécialement à Singapour, au Japon et en Inde. Vous ne citez toutefois pas la Chine, ni Hong Kong. Cela signifie-t-il que la clientèle chinoise a été moins active l’an dernier? 

Non, la clientèle chinoise n’a pas été moins active l’an dernier. Il faut toutefois tenir compte du fait que le pays a été pratiquement fermé pendant deux ans à partir de janvier 2020. Dans cette région, nous opérons principalement à partir de Singapour et de Hong Kong. La situation sanitaire liée au COVID a considérablement compliqué la conduite de nos activités sur ces marchés, et cela explique que le marché chinois n’a pas atteint des sommets en 2021.

«Nous sommes parvenus à réduire nos coûts grâce à une meilleure efficience sur le plan opérationnel.»

Maintenant, cela ne veut pas dire que les fortunes n’ont pas continué de croître en Chine pendant cette période. Il y a eu de nombreux nouveaux millionnaires en Chine durant ces deux dernières années. Les perspectives de croissance restent excellentes pour la clientèle chinoise dès lors que la situation s’améliorera sur le front de la pandémie.

Le ratio coûts/revenus s’est sensiblement amélioré à 63,8% en 2021, comparé à plus de 71% en 2019. Est-ce parce que Julius Baer a réduit ses investissements durant la pandémie ou a amélioré son efficacité opérationnelle?

Il est important de souligner que nous avons continué à effectuer d’importants investissements au cours des deux dernières années, notamment dans le domaine de l’informatique (IT). Nous avons aussi augmenté nos effectifs l’an dernier à hauteur de plus de 120 emplois équivalent à plein temps. En revanche, nous sommes parvenus à réduire nos coûts grâce à une meilleure efficience sur le plan opérationnel.

Julius Baer a entièrement intégré la société immobilière Kuoni Mueller & Partner (KMP) en octobre 2021. En parallèle, vous avez annoncé début janvier la vente du gestionnaire de fortune Wergen & Partner. En matière d’acquisitions, quel devrait être le profil des sociétés rachetées à l’avenir?

C’est une vaste question. La première caractéristique devrait être que la société rachetée apporte quelque chose dans les marchés clés où nous souhaitons croître. 2021 n’a pas été une année où de grandes transactions ont été réalisées en lien avec la gestion de fortune. Je pense que nous allons voir davantage d’opportunités au cours des prochaines années. Nous allons continuer de suivre l’évolution de la situation avec attention et évaluer les opportunités d’acquisitions qui correspondent à notre modèle d’affaires. Les conditions à remplir est que ces transactions doivent permettre de créer des synergies avec nos activités existantes et générer de la valeur ajoutée, à la fois pour notre clientèle et pour les actionnaires.

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