Après un marché haussier aussi long que fort, faut-il s’attendre à une correction majeure des actions?
Alors que l’heure est à la réflexion sur comment investir en 2022, les sources d’inquiétudes se multiplient. Le variant Omicron est en train de balayer le monde. Des restrictions sont progressivement (ré)-imposées dans de nombreux pays mais les aides étatiques restent faibles. La politique fiscale se resserre et les banques centrales se préparent à durcir leurs propres politiques. La rentabilité des entreprises est menacée à la fois par la hausse des coûts des intrants, par les perturbations des chaînes d’approvisionnement et par les pénuries de main-d’œuvre.
Mais si janvier s’annonce comme un mois mouvementé, les actifs à risque devraient malgré tout continuer à performer. Les conditions financières restent exceptionnellement favorables avec une rentabilité élevée et des bilans solides pour les entreprises. Les finances des ménages sont elles aussi, dans leur ensemble, remarquablement solides. Bien que la croissance économique ait subi un revers durant l’hiver à cause du variant Omicron, celle-ci devrait se redresser dans le courant de l’année. Les actions, elles, ont connu un succès important, les valorisations se sont déjà améliorées mais restent loin d’être excessives compte tenu des conditions financières actuelles.
Les entreprises ont profité des conditions financières favorables pour renforcer leurs bilans. Ces dernières sont désormais riches en liquidités et prêtes à racheter des actions, à augmenter leurs dividendes et à intensifier leurs dépenses en capital. La politique fiscale est en passe d’être resserrée et l’échec du dernier plan fiscal de Joe Biden aux Etats-Unis signifie que le crédit d’impôt pour les enfants est arrivé à son terme, ce qui nuira aux dépenses des ménages pendant les prochains mois. Le gouvernement britannique a annoncé une aide d’un milliard de livres sterling pour les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, mais ce montant paraît bien faible si l’on tient compte de la fin du crédit universel supplémentaire de 20 livres par semaine, des augmentations de la TVA et des augmentations prévues de cotisation à l’Assurance Nationale. La hausse des coûts, dont ceux de l’énergie, compriment les revenus dans tous les pays.
Malgré cela, les consommateurs disposent encore d’un pouvoir d’achat considérable. En effet, une grande partie des soutiens budgétaires des deux dernières années n’a pas été dépensée. Même si seule une partie de ces fonds devait être mobilisée au cours des prochaines années, les dépenses de consommation devraient rester élevées malgré la pression exercée sur les revenus réels.
Si les banques centrales sont effectivement en train de resserrer leur politique, elles le font petit à petit. Le tapering de la Réserve fédérale ne fait que ralentir le rythme de l’assouplissement. Il sera suivi par le relèvement des fonds fédéraux mais les taux d’intérêts, nominaux comme réels, resteront bas. L’histoire montre que les actions demeurent performantes même après les débuts de resserrement de la part de la Réserve fédérale. Les marchés ne deviennent baissiers que lorsque l’économie ralentit ou en cas de crise financière. Ni l’une ni l’autre de ces alternatives ne paraît imminente.
Les perturbations et pénuries de la chaîne d’approvisionnement, quant à elles, sont en train de s’atténuer. Les exportations de semi-conducteurs en provenance de la Corée du Sud et de Taiwan sont robustes et les effets s’en ressentent avec l’augmentation de la production dans de nombreux domaines, comme celui de l’automobile. La fin des fêtes a également amené un relâchement de la pression sur le transport maritime et le fret aérien. Enfin, l’amélioration de la météo dans l’hémisphère nord devrait s’accompagner d’une baisse des prix de l’énergie.
Bien que les actions aient marqué une forte progression l’année dernière, les bénéfices ont augmenté encore plus rapidement. Les valorisations ont ainsi pu s’améliorer et, même si les taux d’intérêt devraient augmenter aux Etats-Unis et au Royaume-Uni en 2022 et les programme d’achats d’obligations se terminer, les rendements des obligations restent à des niveaux historiquement bas par rapport à l’inflation. La valeur fondamentale d’une entreprise correspond à la trajectoire de ses bénéfices futurs actualisés et ce taux d’actualisation est très bas. Ainsi, si les actions ne sont pas bon marché, elles sont loin d’être chères. Malgré les vents contraires et une année qui ne sera sans doute pas exceptionnelle pour les actions, s’attendre à des rendements de 5 à 10% en 2022 paraît tout à fait raisonnable.
Cet optimisme ne s’étend en revanche pas aux marchés émergents. La capacité financière à faire face au Covid-19 y est plus limitée et les taux d’intérêts sont en hausse depuis un an, voire plus, dans plusieurs pays. Si la Chine n’a pas encore vu ses taux grimper, elle fait face à des problèmes bien plus importants. Son secteur immobilier, surendetté, risque de pénaliser l’économie du pays pour de nombreuses années à venir.
Les sociétés à grande capitalisation pourraient continuer à surperformer par rapport à leurs homologues de plus petite taille. Elles bénéficient d’un plus fort pouvoir de fixation des prix et devraient être mieux à même de faire face aux pénuries de main-d’œuvre. Il existe bien une demande refoulée en matière de voyages et de loisirs, mais il n’est pas certain que la confiance des consommateurs puisse se rétablir rapidement face à la peur provoquée par les nouveaux variants.
Les gouvernements, les entreprises et la société dans son ensemble ont fait preuve d’une résilience remarquable durant ces dernières années, face à une pléthore de forces inédites. Les marchés financiers en ont bénéficié et devraient continuer à générer des rendements solides.