Noël est-il sauvé?

Steven Bell, BMO Global Asset Management

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Les entreprises reprennent des couleurs, les retards se résorbent et Boris Johnson évite la catastrophe.

©Keystone

La reprise économique mondiale s'est accélérée malgré les pénuries d'approvisionnement et la flambée des prix de l’énergie. Aux Etats-Unis, la croissance pourrait même atteindre un taux de 8,2% annualisé, si l’on en croit le modèle de prévision GDPNow de la Banque fédérale de réserve d'Atlanta. La situation est donc totalement différente de celle qui prévalait en septembre. Le rythme de la croissance ayant alors fortement ralenti, une correction de 5 à 10% du S&P 500 était à craindre. De fait, cette dernière a atteint les 5,3% en mesure intrajournalière.

La reprise a le vent en poupe

Une meilleure croissance signifie également des bénéfices plus élevés pour les entreprises et c’est une tendance qui peut s’observer dans l’indice des perspectives de bénéfices Bloomberg. L’indice en lui-même est très volatil mais il reste précieux car il mesure quand les entreprises considèrent les prévisions des analystes comme trop basses (ou trop élevées). 

Les retards commencent à se résorber dans de nombreux secteurs.

Il est certain que les entreprises disposent de meilleures informations relatives à leurs bénéfices que les analystes financiers et ce d’autant plus en période de COVID. La moyenne de l’indice était de 40 avant la pandémie, signalant un biais systématique dans les prévisions formulées par les analystes. Avec l’installation de cette spectaculaire reprise postpandémique, les chiffres ont bondi et sont venus soutenir le marché des actions. Lorsque l’économie américaine a commencé à ralentir en septembre dernier, l’indice est retombé entre 40 et 50 mais s’est depuis redressé, la moyenne mobile des dernières semaines se situant autour de 60 et tendant encore à la hausse. 

La reprise devrait encore se renforcer sur les prochains mois. Les retards commencent à se résorber dans de nombreux secteurs et le bond en novembre des exportations coréennes, reflétant en partie la fin des vacances d’octobre, devrait permettre de réduire encore les arriérés. Les exportations chinoises ont démontré une vigueur similaire. L’embouteillage causé par les navires attendant d’être déchargés dans les ports de la côte ouest des Etats-Unis commence également à s’estomper. Une fois passée la fièvre des fêtes, les entreprises seront en mesure de reconstituer des stocks devenus dangereusement bas pour certaines d’entre elles. «L’épargne COVID» des consommateurs n’a de loin pas été entièrement consommée et les dépenses en capital sont en plein essor. Certes, les taux d’intérêt vont sans doute augmenter au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. Mais cette augmentation sera très lente, voire trop lente, et les actions résistent généralement bien à la hausse des taux lorsque l’économie est en pleine croissance. 

L’Europe du Nord va certainement au-devant de quelques semaines de nervosité mais leur impact sur l’activité économique ne doit pas être surestimé.
Des risques à relativiser

La flambée des cas COVID en Allemagne peut en partie s’expliquer par une immunité naturelle plus faible due à un respect plus strict des mesures de confinement. L’Espagne et l’Italie, à l’inverse, sont relativement épargnées. L’Oktoberfest pourrait avoir également contribué à la situation. En effet, même si l’évènement officiel a été annulé, de nombreux adeptes se sont entassés dans les brasseries locales créant leurs propres mini-évènements de super propagation. Tous les regards sont désormais tournés vers ce pays où le nombre d’hospitalisations par million d’habitants a doublé depuis l’Oktoberfest. Il a été multiplié par quatre aux Pays-Bas. L’Europe du Nord va certainement au-devant de quelques semaines de nervosité mais leur impact sur l’activité économique ne doit pas être surestimé. La faiblesse actuelle de l’euro s’explique plutôt par le contraste avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni.

Boris Johnson a, quant à lui, évité le pire la semaine dernière en décidant de ne pas déclencher l’article 16 du Protocole sur l’Irlande du Nord. Son projet était, à l’origine, de donner un préavis d’un mois pour que le sujet soit mis à l’agenda de la réunion de décembre du Conseil Européen. Mais l’Europe aurait probablement riposté en annonçant la suppression de l’Accord de commerce et de coopération. Cela aurait nécessité un temps de transition de 6 à 12 mois, mais les autorités françaises auraient pu immédiatement renforcer les contrôles à Calais. A raison ou à tort, toute pénurie de cadeaux de Noël aurait été imputée à Boris Johnson. Le Royaume-Uni pourrait toujours déclencher l’article 16 une fois la nouvelle année arrivée, mais il serait plus avantageux pour le pays d’accepter l’offre de l’Union européenne d’alléger les contrôles à la frontière.

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