France: Bruno Le Maire, ministre solitaire ressuscité par l’économie

AWP

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Le second mandat du «capitaine» du «paquebot» Bercy est renforcé avec un portefeuille élargi de numéro deux du gouvernement.

Après déjà un quinquennat à la tête du «paquebot» Bercy, un record, Bruno Le Maire a été renommé vendredi avec un portefeuille élargi de numéro deux du gouvernement, une récompense pour ce transfuge de la droite qui a dû piloter l’économie française en pleine crise sanitaire.

A ceux qui lui prêtaient des ambitions pour Matignon, le nouveau ministre de l’Economie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique répétait sans cesse aimer être à Bercy et vouloir y rester, en cas de réélection d’Emmanuel Macron.

Pari gagné pour ce ministre au regard bleu acier devenu poids lourd du gouvernement, dont la mobilisation pendant la pandémie a été unanimement saluée, des chefs d’entreprises aux syndicats en passant par les économistes et ses homologues européens.

Plus populaire dans l’opinion que la plupart des autres membres du gouvernement sortant, Bruno Le Maire, désormais record de longévité au ministère de l’Economie et des Finances sous la Ve République, voit aussi sa fidélité récompensée.

Pendant cinq ans, il a mis en oeuvre le programme économique, très pro-entreprises, du président de la République, avec son cortège de baisses d’impôts ou encore la loi Pacte sur la croissance et la transformation des entreprises.

Non sans pourfendre l’optimisation fiscale des géants du numérique, se battant à Bruxelles et à l’OCDE pour une imposition minimale sur les bénéfices des sociétés, avec un accord international finalement acté l’an dernier.

Mais ce sont les crises, d’abord le mouvement des +gilets jaunes+ à l’hiver 2018-19, puis l’épidémie de Covid-19 à partir de 2020, qui ont assis la «solidité» du ministre.

Ce partisan d’un Etat moins dispendieux n’a pas hésité à desserrer les cordons de la bourse, un rôle finalement pas si ingrat, tout en promettant qu’il n’y aurait pas de hausses d’impôts.

«Après trois années d’efforts pour réduire la dépense publique (...), où nous comptions chaque million, mon directeur de cabinet me proposait de dépenser en 24 heures 300 milliards d’euros», écrivait le ministre dans son avant-dernier livre, «L’ange et la bête».

Cet admirateur de Michel Houellebecq s’est construit l’image d’un ministre «à l’écoute», lui qui prône un «renouveau démocratique».

Méfiance à l’Elysée

Au gouvernement, on le trouve en revanche «solitaire», selon un ministre, et ses relations avec l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, puis son successeur Jean Castex, n’ont pas toujours été fluides, le ministre n’hésitant pas à afficher certaines frustrations et désaccords, sur les retraites, le décalage envisagé de la réforme de l’ISF ou la taxe carbone.

Avec le président de la République en revanche, pas d’ombre au tableau. Même si, dixit un conseiller, Emmanuel Macron «se méfie» de ce ministre ambitieux, chez qui «on ne voit que des poses».

Défenseur déclaré du patriotisme économique, l’ancien secrétaire d’Etat aux affaires européennes (2008-2009) et ministre de l’Agriculture (2009-2012) de François Fillon a aussi porté le combat à Bruxelles pour une coopération européenne plus intense en matière industrielle, face à la Chine et aux Etats-Unis.

En France, son interventionnisme dans certaines grosses opérations d’entreprises a parfois été mal vu, à l’image de sa sortie publique pour tuer dans l’oeuf le rapprochement entre Carrefour et le canadien Couche-Tard, une attitude jugée «maladroite» par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux.

Ayant rejoint Emmanuel Macron dès le soir de sa victoire en 2017, Bercy lui aura permis de renaître politiquement après son échec cuisant à la primaire de la droite face à Juppé, Fillon ou Sarkozy.

Un choc dans le parcours jusque-là sans accroc de ce brillant élève des beaux quartiers, normalien et énarque, qui a «grandi dans les couloirs des cabinets» ministériels, comme il le dit lui-même.

C’est en 2007, sur les conseils d’un de ses mentors, Dominique de Villepin, dont il a notamment été directeur de cabinet à Matignon, que ce catholique pratiquant se fait élire député pour la première fois dans l’Eure, où sa grand-mère a eu une maison.

Désormais ce père de quatre enfants, marié à une artiste peintre, passe davantage son temps libre dans le pays Basque, d’où il partage sur Instagram photos de footings et cafés en terrasse.

Amoureux des lettres et passionné de musique classique, Bruno Le Maire a fait son DEA sur Proust et publié chez Gallimard nombre d’ouvrages. Dont quatre depuis son arrivée à Bercy, faisant grincer les dents de certains qui jugent qu’il avait mieux à faire pendant la crise sanitaire.

Composition du gouvernement d’Elisabeth Borne

Voici la liste des 17 ministres, 6 ministres délégués et 4 secrétaires d’Etat du gouvernement de la nouvelle première ministre Elisabeth Borne, annoncée par l’Elysée dans l’ordre protocolaire:

Ministres

Economie, finances et souveraineté industrielle et numérique: Bruno Le Maire

Intérieur: Gérald Darmanin

Europe et Affaires étrangères: Catherine Colonna

Garde des sceaux, Justice: Eric Dupond-Moretti

Transition écologique et cohésion des territoires: Amélie de Montchalin

Education nationale et de la jeunesse: Pap Ndiaye

Armées: Sébastien Lecornu

Santé et prévention: Brigitte Bourguignon

Travail, plein emploi et insertion: Olivier Dussopt

Solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées: Damien Abad

Enseignement supérieur, recherche et innovation: Sylvie Retailleau

Agriculture et souveraineté alimentaire: Marc Fesneau

Transformation et fonction publique: Stanislas Guerini

Outre-mer: Yaël Braun-Pivet

Culture: Rima Abdul Malak

Transition énergétique: Agnès Pannier-Runacher

Sports et Jeux olympiques et paralympiques: Amélie Oudéa-Castéra

Ministres délégués

- Auprès de la première ministre:

Chargé des Relations avec le Parlement et de la participation citoyenne: Olivier Véran

Egalité entre les Femmes et les hommes, diversité et égalité des chances: Isabelle Rome

- Auprès du ministre de l’Economie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique:

Comptes publics: Gabriel Attal

- Auprès du ministre de l’Intérieur et ministre de l’Intérieur et de la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires:

Collectivités territoriales: Christophe Béchu

- Après de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères:

Commerce extérieur et de l’Attractivité: Franck Riester

Europe: Clément Beaune

Secrétaires d’Etat

- Auprès de la Première ministre:

Porte-parole: Olivia Grégoire

Mer: Justine Bénin

Enfance: Charlotte Caubel

- Auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères:

Développement: Chrysoula Zacharopoulou

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