Gonet: l'actualité des marchés au 7 décembre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -1,03%, S&P 500 -1,44%, Nasdaq -2,00%, Russell 2000 -1,50%, SOX -2,36%, Eurostoxx -0,44%, SMI -0,76%.

Le sentiment du marché, c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on va tomber… La semaine passée ça ronronnait peinard sur ce front-ci. Tout un chacun s’accordait à penser que la Fed va enfin ralentir le rythme de ses hausses de taux, que l’économie des Etats-Unis est sur le point d’atterrir en douceur, que la Chine va abandonner progressivement sa politique zéro covid et que les prix de l’énergie vont reculer. Cette semaine le vent du sentiment tourne quelque peu, qui met l’accent sur le consommateur américain, on s’inquiète à son sujet. Va-t-il résister aux assauts de l’inflation, combinés à une politique monétaire toujours stricte? Rappelons ici que la  Fed est actuellement bâillonnée, elle doit rester silencieuse durant la période de black-out qui précède le prochain FOMC du 14 décembre. Une «conspiration» de CEOs de grandes banques US en profite, qui prennent la parole à tour de rôle hier. David Solomon, CEO de Goldman Sachs, déclare que les clients réduisent les risques, que le marché de l'emploi reste étonnamment serré et que la concurrence pour les talents est toujours aussi rude. Le patron de Wells Fargo indique que la croissance des cartes de crédit diminue, que les cartes de débit restent stables et que les consommateurs à faibles revenus subissent davantage de stress financier. Jamie Dimon, boss de JP Morgan, affirme sur CNBC qu'une «récession légère à sévère» pourrait survenir l'année prochaine. En bref, ces messieurs nous avertissent que 2023 sera tout pourri, parce que le consommateur américain sera perdu dans la traduction inflationnisto-monétaire et que comme le consommateur contribue à deux tiers de la croissance du PIB, veuillez donc attachez vos ceintures chers passagers, ça va swinger dans les trous d’airs l’an prochain…

Ce scénario «à la Roubini» semble trop simple pour être crédible. Au risque de passer pour un Valaisan borné (le premier qui me parle de pléonasme…), je rappelle ici que c’est avant tout la politique monétaire de la Fed qui montre le chemin au marché. Les résultats de sociétés sont bien évidemment importants, mais Wall Street anticipe toujours tout longtemps à l’avance, quid d’une récession qui serait déjà parmi nous et quid d’un marché qui l’aurait déjà en partie intégrée? Revenons au sentiment si vous le voulez bien (si vous ne voulez pas c’est pareil…). À la mi-octobre, le sentiment des petits porteurs américains (Dumb money) avait atteint un de ses pires niveaux de tous les temps. Depuis lors, il a récupéré du terrain pour repasser au-dessus de 60% la semaine passée, un niveau de confiance élevé pour cette population d’investisseurs. Or, ce phénomène s’est déjà produit cette année et, à chaque occasion l’indice S&P500 (SPX) a perdu du terrain juste après. La semaine passée le SPX est parvenu à progresser vers le haut, malgré le retour en force du sentiment. Les observateurs du marché savent que cela ne relève pas de l’anecdote. Si l’on observe le passé, ce phénomène s’est déjà produit à 7 reprises. Dans 100% des cas, 1, 2 et 3 mois après le SPX traitait en hausse. Conclusion: le débat est ouvert quant à la notion de «bear market rallye».

Rappelons aussi que, depuis 1928, le SPX progresse en moyenne de 1,7% au mois de décembre et qu’il fait encore mieux en janvier.

Ceci dit, si l’on zoome sur la séance d’hier, on constate que le principal indice américain recule pour la 4e séance consécutive, qu’il a rendu 3,8% depuis son top récent et que sa moyenne mobile à 200 jours (4042 points contre un SPX en clôture à 3941 pts) continue de lui faire des misères. Hier la volatilité retrouve des couleurs supplémentaires, le VIX progresse de 6,8% à 22,17. Les volumes d’échanges restent faibles sur le NYSE et les indices parviennent à s’éloigner de leur bas du jour à la cloche, on observe des intérêts acheteurs pour plus de 1,5 milliard de dollars en clôture. Sur le front des monnaies, le dollar reste dans les cordes, même s’il tente de résister. Le Dollar Index (DXY) se bat avec sa moyenne mobile à 200 jours, tandis que la paire EUR/USD reste nettement au-dessus de la sienne et évolue actuellement à 1,0455. Un dollar faible constitue un support important pour les indices boursiers américains, c’est à suivre de près. Le pétrole n’y arrive plus, le baril de WTI Light Crude traite à son plus bas de l’année, actuellement à 73,90 dollars. On ne peut blâmer le billet vert pour cela mais plutôt les craintes d’un ralentissement général de l’économie (pourtant la Chine est en train de «dé-covider» le pays, étrange…) et le cap à 60 dollars du baril de pétrole russe par l’Union Européenne.

Au chapitre des secteurs, on se la joue défensive hier, seules les utilities parviennent à garder la tête hors de l’eau à la cloche. Du côté obscur de la cote, on retrouve l’énergie, les services de communication et la technologie. Le marché obligataire continue de crier à qui veut l’entendre que la récession est à nos portes. La courbe des taux 2 / 10 ans s’inverse encore un peu plus, à 82 points de base. Le 10 ans évolue ce matin à 3,52%, il est donc de retour à son  niveau de vendredi (avant la publication du rapport sur l’emploi aux Etats-Unis). Le 21 octobre, le 10 ans rendait 4,33%, que de chemin parcouru depuis… cela dit les obligations restent intéressantes à ces niveaux de rendements, un portefeuille sous-investi dans cette classe d’actifs pourrait être avantageusement complété aux conditions actuelles de marché.

La Pologne est disposée à accueillir des missiles sol-air Patriot allemands, déclare le ministre de la défense Mariusz Blaszczak, revenant ainsi sur la position antérieure de Varsovie après que l'Allemagne a rejeté l'idée de déployer ces armes en Ukraine. Les pourparlers sur les modalités de travail se poursuivent, la Pologne se préparant à intégrer les lanceurs «dans notre système de commandement», ajoute-t-il. Par ailleurs, les États-Unis n'aident ni n'encouragent les frappes ukrainiennes en territoire russe, déclare Antony Blinken.

Deux des entreprises de Donald Trump sont reconnues coupables de fraude pour avoir évité de payer des impôts sur des avantages payés par l'employeur, notamment des appartements gratuits et des voitures de luxe. C'est la première fois que l'entreprise de l'ex-président est condamnée pour des délits financiers et cela intervient alors qu'il brigue un nouveau mandat.

La Chine assouplit un peu plus ses mesures de contrôle du Covid, en permettant à certaines personnes infectées d'être mises en quarantaine à la maison et en supprimant les exigences de test pour la plupart des lieux.

Le démocrate sortant Raphael Warnock bat le républicain Herschel Walker dans le second tour très disputé de la course au Sénat américain en Géorgie, selon les projections de NBC et CNN. Sa victoire porte l'avantage des démocrates à la chambre à une majorité de 51-49. M. Warnock remporte 50,5% des voix contre 49,5% pour l'ancienne star du football, selon l'agence de presse AP, 93% des votes ayant été comptabilisés.

La production industrielle allemande (sortie à 8 heures, nettement moins mauvaise qu’attendu) et une nouvelle estimation du PIB de la zone euro au troisième trimestre (11h00) sont au programme, avant les inscriptions hebdomadaires au chômage aux Etats-Unis (14h30) et une décision de politique monétaire de la Banque du Canada (16h00). Ce matin, la banque centrale indienne a relevé de 35 points de base son principal taux directeur, pour le porter à 6,25%, comme prévu. Les importations et les exportations chinoises étaient en berne en novembre.

Un tribunal américain rejette les poursuites engagées contre GSK, Pfizer et Sanofi concernant le Zantac en raison de preuves scientifiques invalides. Partners Group est en train d'acheter une participation de 50,3% dans l'horloger de luxe Breitling, qui prévoit de s'introduire en bourse en Suisse en 2027, rapporte Finews. Par ailleurs, Partners Group a conclu un accord pour vendre la plateforme énergétique CWP Renewables en Australie à Squadron Wind Energy Assets. Glencore prévoit une réduction de sa production en 2023 dans un contexte d'inflation galopante. Novartis signe un accord de licence pour le programme de lutte contre le cancer de MorphoSys. Mastercard approuve un rachat d'actions de 9 milliards de dollars et augmente son dividende trimestriel de 16%. Taiwan Semiconductor s'attend à 10 milliards de dollars de revenus annuels grâce aux fabs d'Arizona. Apple revoit en baisse ses ambitions sur son véhicule électrique et repousse son lancement à 2026. Les revenus de Netflix vont rebondir l'an prochain après une année 2022 difficile, estime le co-CEO Ted Sarandos. Tesla fait des soldes en Chine sur certains modèles. La thérapie combinée de Novartis pour le cancer du sein augmente la survie sans progression dans un essai de phase II. Amazon conclut un accord avec la Commission européenne concernant ses politiques anticoncurrentielles présumées, évitant ainsi des accusations formelles et une amende pouvant aller jusqu'à 10% de son chiffre d'affaires mondial, selon le FT. Une décision à venir du régulateur de la vie privée de l'UE devrait imposer de nouvelles restrictions aux publicités ciblées de Meta Platforms, selon le Wall Street Journal. Morgan Stanley licencierait 1’600 employés dans le monde. Shell et BP Plc restructurent leur participation dans le projet Atlantic LNG de Trinidad. Le dernier avion 747 de Boeing doit quitter l'usine d'Everett mardi en fin de journée. ABB fournira un système de gestion de l'énergie au projet de potasse de BHP au Canada.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse. Tokyo recule de 0,72% à la cloche, Hong Kong abandonne 3,2%, Shanghai perd 0,40% et Séoul rend 0,43%. Le future SPX traite à l’équilibre et l’Europe ouvre en légère baisse de 0,1%. Les marchés sont hésitants, comment les en blâmer? Dans un tel contexte, il est urgent de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain, ni de se ruer tête baissée dans la bourse chinoise au prétexte que Pékin abandonne progressivement sa politique zéro covid. En revanche, ajouter des obligations «investment grade» à des portefeuilles sous-investis dans cette classe d’actifs est une idée qui mérite probablement réflexion.

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