Gonet: l'actualité des marchés au 4 août

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +1,29%, S&P 500 +1,56%, Nasdaq +2,59%, Russell 2000 +1,41%, SOX +2,65%, Eurostoxx +1,30%, SMI +0,55%.

On n’en parle plus depuis de nombreux mois, on n’ose même plus y penser, voire en rêver, mais le FOMO serait-il en train de nous rendre une petite visite de courtoisie? Le FOMO est un des acronymes préférés de tout taureau qui se respecte sur cette planète, il signifie Fear Of Missing Out, la peur de «ne pas en être». Il se trouve pourtant que le cocktail du moment a un potentiel certain de faire de belles étincelles. Voyons de quoi il est fait: Nancy Pelosi s’est rendue à Taiwan, la majorité des banquiers centraux américains rivalise de commentaires faucons, l’Opep ne fait aucun effort pour augmenter sa production de brut (bon, ça on en a l’habitude…), l’inflation semble toujours perchée et la croissance en berne (sauf en Suisse, je sors…). La guerre en Ukraine est passée au second plan de l’attention des financiers, mais elle fait bel et bien toujours rage. Dans un tel contexte, un marché au sentiment fragile se ferait manger tout cru par un ourson. La séance boursière d’hier est révélatrice de ce petit quelque chose qui change, ou a changé, dans l’esprit des intervenants, qui semblent voir le verre à moitié plein depuis quelques semaines déjà.

Il faut dire que le retour en force (croissante) des taureaux est compréhensible, hier par exemple l’indice américain ISM des services décolle à 56,7 pour le mois de juillet, il bat les attentes et de beaucoup. En parallèle, sa composante des prix recule pour le troisième mois consécutif, elle passe de 80,1 en juin à 72,3 en juillet, on n’avait plus vu une telle baisse depuis bien longtemps. La macro d’hier nous dit donc que la croissance se porterait mieux que prévu alors que le niveau général des prix ralentirait, ô soulagement! Et ce n’est pas tout ! les résultats de sociétés du jour sont bons, tels qu’illustrés par CVS Health (CVS +6,30%), PayPal (PYPL +9,25%), Starbucks (SBUX +4,25%), Regeneron Pharma (REGN +5,88%) et Moderna (MRNA +15,97%). Au registre de la Fed, ses membres ont beau crier à qui veut l’entendre que le combat contre l’inflation est loin d’être terminé, le marché est déjà en train de scruter le «moment pivot», il s’attend en l’état à une hausse de 50 points de base le 21 septembre, puis 25 pbs en novembre. Cerise sur le gâteau des taureaux, le prix du pétrole qui glisse et revient à 90,82 dollars le baril de WTI Light Crude.

Il n’en faut pas plus au sentiment pour convier l’appétit au risque à sa table, hier la journée est portée vers le haut et les indices terminent leur séance proches de leur plafond du jour. L’indice S&P500 (SPX) se hisse confortablement au-dessus de sa moyenne mobile à 100 jours, il peut désormais s’attaquer à sa 200 jours, qui se situe à 4341 points (clôture hier soir à 4155). Je note qu’hier chaque trou d’air est utilisé par les intervenants pour entrer dans le marché, c’est là une indication d’un potentiel retour du FOMO, à vérifier lors des prochaines séances. Le Nasdaq100 (NDX) n’est pas en reste, qui se permet le luxe de clôturer à son plus haut niveau depuis le mois de mai. En regardant dans le rétroviseur, on constate que le SPX et le NDX ont récupéré 13% et 20% depuis leur bas de la mi-juin. Les volumes de trading restent limités, la totalité de la planète finance n’est donc pas de retour avec ses tickets bleus (d’achat), en revanche le breadth (l’écart entre les titres clôturant en hausse par rapport à ceux en baisse), est impressionnant avec un 11 à 5 sans appel pour la hausse, sur le NYSE et le Nasdaq. Les mastodontes de la technologie sont également recherchés, ce qui ne peut qu’aider les indices tellement leur poids y est élevé.

Alors certes, les volumes sont plutôt faméliques, mais au final les mouvements se font et les absents, comme me l’on systématiquement dit un bon 99% de mes professeurs, on tort. Ceci dit ne pas s’emballer il faut, la volatilité se prend les pieds dans le tapis hier, qui envoie le VIX à 22 (-8,3%), il semble que de moins en moins de participants ne pensent à protéger leurs positions, la complaisance guette. On dirait bien d’ailleurs que les investisseurs dits «retail» reviennent dans la partie, c’est aussi à suivre, cette population d’investisseur fait montre d’une propension agaçante à laisser ses émotions prendre le dessus. Les volumes traités par les «robinhooders» sont en progression, les achats ayant constamment dépassé la moyenne annuelle au cours des cinq derniers jours. L’accent est mis sur les valeurs technologiques «classiques» comme Tesla, Nvidia, Apple, AMD et Amazon.

Le marché obligataire, toujours plus mature que son petit frère des actions, nous envoie un message bien différent. Regardez la partie courte de la courbe des taux US, le 2 ans rend actuellement 3,1%, il est plus haut que le 5, le 7, le 10 et le 30 ans ! Beaucoup de circonspection de la part de cette classe d’actifs donc, qui préfère endosser le rôle du Saint Thomas de service. Ceci dit la macro d’hier donne raison aux actions, à suivre de près…

La Banque d’Angleterre (BoE) s’apprête à procéder à sa plus importante hausse de taux depuis 27 ans, avec une augmentation de 50 points de base. Elle détaillera également la manière dont elle «annulera» une partie des mille milliards de dollars de mesures de relance injectés dans l’économie depuis plus de dix ans. Il y a aussi un aspect politique. Liz Truss promet des réductions d’impôts si elle devient Premier ministre, ce qui, selon Rishi Sunak, alimenterait l’inflation, forçant ainsi les taux d’intérêt à augmenter. Madame Truss réitère hier sa volonté de modifier le mandat de la BoE.

La Chine donne le coup d’envoi d’exercices militaires autour de Taïwan aux premières heures de ce matin, Taipei indique qu’un drone non identifié a été repéré au-dessus de Kinmen la nuit dernière. Elle minimise l’impact que les exercices de la Chine pourraient avoir sur les vols et la navigation. La Maison-Blanche exhorte les démocrates à ne pas soutenir un projet de loi bipartisan qui désignerait officiellement Taïwan comme un allié majeur non membre de l’OTAN, selon l’agence Bloomberg.

Le principal événement du jour est donc la décision à 13h00 de la Banque d’Angleterre sur ses taux (le marché attend une hausse de 50 points de base). Il y aura aussi deux indicateurs du marché de l’emploi aux Etats-Unis dans l’après-midi.

Adecco: la croissance organique a ralenti à 4% au deuxième trimestre. L’Ebit est en baisse. Bayer: le bénéfice net atteint 3,35 milliards d’euros contre 3,21 milliards au consensus. Booking: le titre perd 3% hors séance après la publication de ses résultats trimestriels. Swisscom: le bénéfice net semestriel est amputé des 72 millions d’euros de l’amende infligée par la Comco. Toyota: les résultats du premier trimestre fiscal sont inférieurs aux attentes. Mais le constructeur relève en partie ses objectifs pour l’exercice clos le 31 mars prochain. Zalando: les résultats sont en forte baisse à l’issue du deuxième trimestre, le second semestre devrait être meilleur. Walmart s’apprête à licencier des centaines de salariés dans ses fonctions support, selon le Wall Street Journal. ABB relance ses projets de cession d’une unité de conversion d’énergie. Le recours de Musk contre Twitter sera rendu public d’ici vendredi.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse, Nancy Pelosi et son avion semblent bien loin, Tokyo gagne 0,69% à la cloche, Hong Kong progresse de 1,64%, Shanghai avance de 0,52% et Séoul monte de 0,47%. Le future SPX se replie de 5 points et l’Europe ouvre en légère progression de 0,2%. Le dollar est plutôt fort, la paire EUR/USD traite à 1,0166 tandis que l’or se maintient à 1771 dollars l’once.

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