Gonet: l'actualité des marchés au 30 mai

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow, +1,00%, S&P500 +1,30%, Nasdaq +2,19%, Russell 2000 +1,05%, SOX +6,26%, Eurostoxx -0,40%, SMI +0,96% (NB: performances de vendredi 26 mai, hormis l’Eurostoxx ouvert hier).

À l’approche d’un long weekend, Wall Street reste vendredi sous le charme de l’intelligence artificielle, la nouvelle phéromone du marché. On ignore superbement l’indice PCE (Personal Consumption Expenditure, l’indicateur favori de la Fed pour évaluer l’inflation) qui ressort au-dessus des attentes, on ne daigne prêter attention à l’Allemagne, qui entre en récession, on fait mine de ne pas voir la spirale baissière qui frappe de plein fouet le compartiment des métaux industriels. En cause, des données économiques mitigées en provenance de Chine, une hausse du billet vert et un certain retour de l'aversion au risque. Le cuivre s'échange désormais à 7900 USD la tonne métrique au LME alors qu'il tutoyait le seuil des 9000 USD il y a un peu plus d'un mois. Même dynamique pour le zinc, le nickel et l'étain. L'or, lesté par la progression du dollar américain, ne parvient pas à reprendre de la hauteur. La relique barbare glisse à 1936 dollars par once. Prochain support d’importance 1830$. Le dollar est donc en forme, la paire eur/usd passe sous la barre des 1.0700. Elle s’approche doucement de son territoire survendu, mais a encore un peu de marge sur cette partie. La zone de 1.0500 – 1.0490 constitue un support solide en apparence.

Wall Street est donc sous le charme de Nvidia et de l’IA en général, et vendredi la rumeur enfle en parallèle que Joe Biden et Kevin McCarthy auraient trouvé un accord sur l’épineux problème du financement du gouvernement américain, rumeur qui sera confirmée par la suite (j’y reviens). L’indice S&P500 (SPX) clôture au-dessus de 4200 points pour la première fois depuis août 2022. Les mastodontes de la tech continuent de tenir le rôle de locomotive du marché (l’ETF Mega Cap Growth progresse de 1,9% alors que son compère SPX Equal Weight ne gagne que 0,8%). Les semi-conducteurs sont en forme olympiques, grâce à Marvell (MRVL +32,4%) qui publie des résultats et des perspectives au-dessus des attentes. Sur la semaine, l’indice SOX (semis) gagne 10,7%, il est en hausse de 18,4% sur le mois (sell in May…). Sur l’année, le SPX progresse de 9,53%, alors que le SPX P 493 ne gagne que 1%. Le SPX P 493, c’est le SPX moins Meta (META), Amazon (AMZN), Apple (AAPL), Microsoft (MSFT), Google (GOOGL), Tesla (TSLA) et Nvidia (NVDA). Ces 7 titres sont collectivement en hausse de 44% depuis le premier janvier. Dans un tel contexte, l’heure est plus que jamais à la sélectivité, on observe d’ailleurs que les volumes d’échanges se font surtout à la baisse sur le NYSE ces jours, Nvidia et ses copains constituent en fait un gigantesque arbre qui cache une forêt pas forcément en grande forme, la question est de savoir combien de temps cela peut durer ainsi.

Les statistiques macro-économiques de vendredi forcent les Fed Funds à augmenter leurs prévisions d’une hausse de 25 points de base par la Fed lors de sa prochaine réunion du 14 juin.

Joe Biden et Kevin McCarthy annoncent dimanche soir un accord qui suspendrait le plafond de la dette fédérale jusqu'au 1er janvier 2025, c'est-à-dire juste après l'élection présidentielle de novembre 2024. Le Congrès votera sur cet accord demain mercredi 31 mai. Le Trésor indique que le 5 juin est la date la plus probable. L'accord devrait être adopté mais il subsiste un certain risque d'échec, car certains membres du groupe d'extrême droite Freedom Caucus à la Chambre des représentants pourraient faire valoir que les réductions de dépenses sont trop faibles et on ne peut exclure que certains progressistes démocrates d'extrême gauche votent contre le projet de loi, peut-être en raison des exigences accrues en matière de travail pour certaines prestations de programmes sociaux. Si le projet de loi est adopté, les marchés devraient se concentrer sur la réunion du FOMC du 14 juin (et peut-être un peu aussi sur Roland-Garros).

Une bonne nouvelle que voici donc? Certes oui. En parallèle, avec probablement 1'000 milliards de dollars de réductions de dépenses, cet accord risque de freiner la croissance des Etats-Unis, et donc du monde, ce qui pourrait potentiellement favoriser la fin du cycle de hausses de taux de la Fed. Le monde est assis sur un niveau de cash élevé, les consommateurs réduisent leurs dépenses comme en Allemagne et thésaurisent (les dépenses du consommateur allemand a baissé de -1,2% entrainant une récession). L’inflation diminue le pouvoir d’achat, augmente le coût des hypothèques et renchérit les prix des produits de consommation. Le bas de laine de tout un chacun s’en trouve appauvri. La Réserve Fédérale des Etats-Unis va devoir sérieusement peser le pour et le contre ces prochains mois, un exercice de style ô combien périlleux et tellement important pour les marchés.

Gardez un œil attentif au rendement de l’emprunt US à 10 ans, qui tente de casser à la hausse. La publication du PCE Core ce vendredi est venu mettre de l’eau au moulin des faucons. Ressorti légèrement supérieur aux attentes en rythme mensuel (+0,4% vs. 0,3% attendu) et annuel (+4,7% vs. +4,6%), il corrobore les mauvaises données de l’inflation britannique publiées plus tôt dans la semaine. La lutte contre l’inflation semble donc loin d’être gagnée. De fait, le rendement du 10 ans américain s’est extirpé de son canal d’accumulation horizontal en débordement des 3,64% ouvrant la voie à une nouvelle dynamique haussière en direction des 4,00% - 4,10%. Ce matin il évolue à 3,75%.

Cette semaine écourtée qui débute nous réserve le sentiment du consommateur américain (cet après-midi à 16 heures), les chiffres sur l'inflation allemande et australienne ainsi que les données sur la création de postes aux Etats-Unis demain, la publication de l'indice ISM manufacturier ainsi que le taux de chômage américain vendredi. Quelques résultats d'entreprises sont à prévoir. Parmi les plus grandes sociétés, nous retrouvons HP, Salesforce, Crowdstrike et Broadcom.

En Turquie, Recep Tayyip Erdogan a rencontré Mehmet Simsek, un ancien ministre des finances favorable au marché, alors qu'il cherche à annoncer un nouveau cabinet dès vendredi, selon des personnes qui lui sont familières. On s'attend à ce que Simsek revienne dans l'administration après que le président ait promis de former une équipe avec une «crédibilité internationale».

Deux enquêtes suggèrent que le secteur manufacturier chinois s'est amélioré ou au moins stabilisé en mai par rapport à avril. Le Livre beige de la Chine indique que «l'activité manufacturière a défié les rumeurs de disparition», la production ayant augmenté de manière notable en mai, tout comme les commandes nationales et étrangères. Par ailleurs, Goldman Sachs fait état d'une reprise de l'indice des directeurs d'achat des industries émergentes.

En Espagne, le premier ministre Pedro Sanchez surprend tout le monde en dissolvant le parlement et en annonçant des élections générales anticipées, après avoir subi une défaite cuisante aux élections régionales dimanche. Le premier ministre semble penser qu’il peut exploiter les bizarreries d’un paysage politique espagnol facturé.

Au menu macro-économique du jour, aux Etats-Unis, l'indice HPI du prix des maisons (15h00) précédera l'indice de confiance des consommateurs du Conference Board. Ce matin, le Japon a fait état d'un taux de chômage en contraction plus marquée que prévu de -2,6%.

La France inaugure la première de ses quatre gigafactories de batteries pour voitures électriques (projet porté en partie par Stellantis, TotalEnergies et Mercedes). Boeing serait sur le point de signer un contrat de 2 milliards de dollars pour fournir des avions cargo à Cathay Pacific Airways. Nestlé change de directeur financier. HSBC va rebaptiser la Silicon Valley Bank UK en HSBC Innovation Banking. Rolls-Royce déclare qu'aucune décision concernant l'évolution de ses effectifs n'a été prise suite à l'article du Sunday Times qui indique que le groupe devrait supprimer environ 3000 emplois. Aryzta enregistre une hausse de son chiffre d'affaires au troisième trimestre fiscal.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en ordre dispersé. Tokyo grappille 0,30% à la cloche, Hong Kong n’y arrive plus et recule pour la 5ème séance consécutive, mais légèrement. Shanghai traite en très légère hausse et Séoul est en forme, l’indice Kospi avance de 1,04% et est proche de revenir en bull market. Le future SPX avance de 11 points mais semble manquer de traction. L’Europe ouvre autour de l’équilibre.

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