Gonet: l'actualité des marchés au 21 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +1,20%, S&P 500 +0,89%, Nasdaq +0,39%, Russell 2000 +1,11%, SOX +1,01%, Eurostoxx +1,34%, SMI +0,28%.

La poussière retombe légèrement sur un secteur bancaire mondial KO debout. Le comportement d’UBS en bourse hier illustre combien les intervenants sont toujours en train de digérer  la plus importante catastrophe bancaire de l’histoire helvétique. UBS réalise un impressionnant swing de 27% sur la séance, elle traite sous l’eau toute la matinée puis passe son après-midi dans le vert, pour clôturer en hausse de 1.26%. Le traumatisme de la faillite de Lehman Brothers est encore bien ancré dans les mémoires, on se dit dans les salles de marchés que les règles mises en places après 2008 (visant à empêcher une trentaine de banques dites systémiques de s’effondrer) ne fonctionnent apparemment pas. En Suisse, on prend conscience de la naissance d’un géant disproportionné par rapport à la taille du pays, c’est sans nul doute un sujet qui sera longuement débattu ces prochaines semaines. Aux Etats-Unis, First Republic Bank (FRC -47%) reste source d’inquiétudes, une rumeur de sauvetage orchestrée par JP Morgan ne parvient pas à stabiliser l’action de la banque. La Fed est aux manettes et fait feu de tout bois, en embrigadant ses consoeurs européenne, suisse, canadienne, anglaise et japonaise pour améliorer la fourniture de liquidités en dollars américains tout en garantissant que «les positions de capital et de liquidité du système bancaire américain sont solides et que le système financier américain est résilient». La BNS a fait plus que sa part dans le dossier Credit Suisse, on sent bien que les banques centrales de la planète ont tiré les leçons de 2008 et qu’elles ont sorti la grosse artillerie pour permettre à la confiance dans le secteur bancaire de revenir aussi rapidement que possible.

À Wall Street, la journée débute plutôt mal avec le future de l’indice S&P500 (SPX) qui recule et vient tester le niveau de 3900 points, avec succès car il récupère 89 points ensuite. Le flux de nouvelles est plutôt mince, on tente de comprendre si les annonces du weekend sont rassurantes ou pas, tout en se disant que la Fed aura un poids énorme sur ses épaules demain soir. À ce propos, les Fed Funds changent sans cesse d’avis. En l’état, ils prévoient 75% de probabilités d’une hausse de 25 points de base. Hier matin ils n’y croyaient pas et j’entends de ci de là que des intervenants s’attendent à une baisse de 25 bps. Bon alors je me permets de penser que cette dernière option est fort peu probable car si peu crédible. Mettons-nous un instant à la place de Jerome Powell. Il y a quelques jours encore, la planète finance ronronnait ou presque, le marché s’attendait à une hausse de 50 points de base demain soir, l’inflation restait le principal sujet de réflexion, accompagné de la croissance. Et puis patatras, le secteur bancaire semble exploser en plein vol, les banques centrales réagissent sans tarder, on connait la suite. Demain soir, si la Fed ne fait rien, le marché pourrait se dire que la situation est plus grave que prévu et le prendre mal. Si la Fed relève ses taux de 50 points de base, le marché pourrait se dire que la situation pourrait s’aggraver de ce fait et le prendre mal. En revanche, si la Fed relève son taux de 25 points de base, le marché pourrait bien le prendre, reste à écouter le discours de Jerome Powell, qui devra trouver les bons mots pour rassurer ses brebis de plus en plus perdues dans la traduction.

On revient à Wall Street, où le SPX récupère sa moyenne mobile à 200 jours en clôture (3951 points contre la 200 dma à 3936 pts). Sa configuration technique reste encourageante, il doit cependant réintégrer son canal haussier entamé en octobre, pour ce faire il devra se hausser à 4100 points. Au chapitre des secteurs, le podium du jour du SPX se compose de l’énergie, qui profite du rebond du pétrole, des materials et des industrielles. La technologie réalise la moins bonne performance du jour, bien que terminant sa séance en légère hausse, les grosse capitalisations sous-performent (MSFT -2.58%, AMD -1%, AMZN -1.25%, GOOG -0.4%), hier marque un certain retour de l’appétit au risque, on vend donc ces valeurs-ci, perdues dans la traduction je vous dis…La volatilité fait du surplace, le VIX évolue à 24, le dollar reste faible, la paire eur/usd repasse au-dessus de 1.0700 tandis que l’or ne parvient pas à se maintenir au-dessus de 2’000 dollars l’once et revient ce matin à 1967$.

Le marché obligataire est dans tous ses états, prenez le 2 ans US, qui swing de 3.62% à 4.00% ce matin, notez que la 200 jours évolue à 3.91%. Sur le front du 10 ans, retour à 3.49% ce matin, récupération également de la 200 dma qui se situe à 3.47%. Le spread 2 / 10 ans se réduit à -49 points de base, il y a environ une semaine il évoluait à -106 bps. La configuration technique de la courbe des taux US est réellement encourageante, elle demande certes à être confirmée mais Rome ne s’est pas construite en un jour. Le dollar aussi envoie des signes d’espoir, tout comme les indices d’actions, qui font preuve d’une résilience plutôt épatante. Ceci dit ne désespérez pas si vite chers ours, la poussière n’est pas encore totalement retombée et les taureaux semblent désormais tout miser sur la Fed, rendez-vous demain soir à 19 heures à ce sujet.

A propos de la Fed, on prend des nouvelles de son porte-parole officieux, le journaliste du Wall Street Journal Nick Timaraos, qui indique que «La Fed est confrontée à l’une de ses décisions les plus difficiles depuis des années: relever à nouveau les taux d’intérêt pour lutter contre une inflation obstinément élevée ou prendre un temps d’arrêt dans le contexte de la crise bancaire la plus intense depuis 2008. La décision sera difficile à prendre et la communication très délicate».

La disparition en fumée des 16 milliards de dette AT1 (Additional Tier 1) de Credit Suisse fait des victimes : Pimco a perdu environ 340 millions de dollars sur ses avoirs en obligations AT1 émises par Credit Suisse, selon Reuters. Le gestionnaire de fonds détenait environ 807 millions de dollars de ces obligations, tandis qu’Invesco en détenait environ 370 millions, selon l’agence Bloomberg. Les pertes ont pu être partiellement compensées par les obligations bancaires de premier rang, qui ont augmenté. Les courtiers de banques telles que JPMorgan et Morgan Stanley auraient acheté des obligations CS AT1 à environ 2 cents du dollar et les auraient vendues à environ 5 cents. Plus de la moitié des 50 obligations AT1 libellées en dollars émises par les banques de la région Asie-Pacifique relèvent la tête ce matin.

Les responsables du Trésor américain cherchent à savoir s’il existe un moyen légal d’étendre temporairement la couverture de la FDIC à tous les dépôts, bien que pour l’instant ils ne voient pas la nécessité d’une telle action, indique Bloomberg. Les dirigeants d’une coalition de banques affirment que cette mesure était nécessaire pour éviter une crise financière potentielle. Jamie Dimon, de JPMorgan, mène des discussions avec des cadres d’autres grandes banques sur de nouveaux efforts de stabilisation pour First Republic, selon des personnes familières avec le sujet. Le plan consisterait à convertir une partie ou la totalité des 30 milliards de dollars que les banques ont déposés auprès de First Republic la semaine dernière en une injection de capital. First Citizens espère toujours conclure un accord pour l’ensemble de SVB.

Le système FHLB américain (Federal Home Loan Banks), une source clé de liquidités pour les banques régionales, a avancé 304 milliards de dollars la semaine dernière, selon Bloomberg. Les turbulences bancaires américaines ont assombri les perspectives d’un atterrissage en douceur et créé la possibilité d’un «moment Minsky sur les marchés et la géopolitique», selon Marko Kolanovic. Les conditions de crédit devraient se resserrer rapidement sous la pression des marchés et des régulateurs, indique le stratège de JP Morgan. Le moment Minsky est un phénomène macroéconomique par lequel des investisseurs surendettés sont contraints de vendre en masse leurs actifs pour faire face à leur besoin de liquidité, déclenchant une spirale de baisse auto-entretenue du prix de ces actifs et un assèchement de la liquidité.

En France, les motions de censure visant le gouvernement ont été rejetées et la réforme des retraites a été adoptée. En Chine, Xi Jinping et Vladimir Poutine discutent d’un «plan de paix chinois» en Ukraine.

Au menu macro-économique du jour, l’indice ZEW sur le moral des financiers allemand au mois de mars, à 11h00. Aux Etats-Unis, les chiffres de l’immobilier ancien en février seront présentés à 15h00.
Partners Group : les résultats 2022 sont en baisse marquée, mais le dividende est relevé à 37 francs. Amazon annonce la suppression de 9’000 emplois supplémentaires. Volkswagen obtient 1,3 milliard d’incitations publiques pour l’usine américaine de Scout Motors. S&P abaisse la notation crédit long terme d’UBS à «A-». Moody’s assigne la notation crédit long terme «Baa3» à Tesla, sortant le dossier de la catégorie spéculative. Bed Bath & Beyond prévoit d’organiser une assemblée des actionnaires afin d’obtenir l’approbation d’un regroupement d’actions.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en hausse hormis Tokyo, qui est fermée en ce premier jour du printemps. Hong Kong progresse de 1.39%, Shanghai avance de 0.64% et Séoul monte de 0.38%. Le future SPX gagne 12 points et l’Europe ouvre en hausse de 1.1%, menée par son secteur financier.

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