Gonet: l'actualité des marchés au 16 mars

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -0,87%, S&P 500 -0,69%, Nasdaq +0,05%, Russell 2000 -1,74%, SOX -1,09%, Eurostoxx -3,46%, SMI -1,87%.

La crise de confiance dans le secteur bancaire engendrée il y a une semaine par la faillite de Sillicon Valley Bank avait déjà singulièrement impacté le secteur financier autour du globe, hier Crédit Suisse prend le relais et force la BNS a agir dans la nuit, ou plutôt à apporter sur la table une garantie de 50 milliards de francs. Le secteur bancaire européen souffre particulièrement en bourse hier (-12% pour Société Générale, -10% pour BNP Paribas, -9% pour Deutsche Bank, -7% pour Intesa et Banco Santander). Credit Suisse s’effondre de 24% et clôture à 1,69 franc après avoir touché 1,55 franc en séance. Son CDS à 1 an (Credit Default Swap, une assurance que les investisseurs achètent pour se protéger contre un défaut), explose littéralement, le 8 mars il évoluait à 300 points de base, ce matin il se retrouve à 3588 pts, surréaliste. L’action de la banque aux deux voiles ne supporte pas l’annonce de son principal actionnaire saoudien, qui refuse hier matin d’augmenter sa participation (actuellement légèrement moins de 10%). Dans un tel contexte, cela ne surprend personne que la Banque Nationale Suisse (BNS) annonce cette nuit son soutien à Credit Suisse, dont le titre rebondit de 34% dans le pré-marché pour traiter aux alentours des 2,40 francs. Le message a donc été envoyé par la BNS, sera-t-il entendu et suffisant? Le marché tranchera, on est probablement désormais sortis du registre financier, le sentiment du marché est seul à la barre.  

La séance boursière d’hier est contrastée. Les indices européens se prennent les pieds dans le tapis, dans de forts volumes d’échanges, pénalisés par le secteur financier mais aussi par l’énergie, le baril de WTI Light Crude recule à 68 dollars à cause de craintes de ralentissement économique. Aux Etats-Unis cela débute plutôt mal, la pression monte sur les indices, elle vient notamment du marché obligataire (j’y reviens), le secteur bancaire n’échappe pas à l’opprobre générale, l’énergie non plus, les valeurs défensives surperforment logiquement, mais la lumière vient de la technologie, et oui, avec les mastodontes de la cote qui se transforment peut-être actuellement en défensives (NVDA +0.69%, MSFT +1.78%, META +1.92%, AMZN +1.39%). Résultat des courses : un indice Nasdaq100 (NDX) qui progresse de 0.42% sur la séance et clôture au plus haut du jour, tout comme le S&P500 (SPX), qui recule certes mais limite singulièrement la casse. Le SPX ne parvient ceci dit pas à se hisser au-dessus des 3’900 points à la cloche, il regarde désormais sa moyenne mobile à 200 jours qui évolue à 3938 points, clôture à 3891 pts hier soir. La volatilité gagne 10%, le VIX clôture à 26.14, il illustre la nervosité ambiante sur les parquets de trading. Côté monnaies, le dollar endosse finalement son costume de valeur refuge, la paire eur/usd revient à 1.0621. Ceci dit il faut préciser que les investisseurs n’osent plus se réfugier dans le franc suisse, cela en devient presque risible mais c’est ainsi, lorsque dame irrationalité prend les commandes.

Notons au passage que personne ne prête attention à l’indice américain des prix à la production ainsi qu’aux ventes au détail US, qui indiquent un ralentissement potentiel de la croissance et des prix à la production. Les récentes statistiques macro-économiques sont plutôt favorables au marché, qui devrait s’en souvenir lorsque la poussière retombera.

Et puis il y a les banques centrales, sur lesquelles le marché compte à nouveau pour le sortir de cette ornière financière. La BNS a fait le travail cette nuit, la Banque Centrale Européenne (BCE) annonce sa décision sur les taux cet après-midi à 14h15, le marché attend 50 points de base mais Christine Lagarde et ses collègues ne peuvent en aucun cas ignorer la crise financière en cours. 25 points plutôt que 50 du coup ? La Fed est aussi dans le viseur des intervenants. Plus personne dans le marché ne s’attend à une hausse de 50 points de base le 22 mars, les Fed Funds s’attendent désormais à 66% de probabilités d’une hausse de 25 bps, dans la foulée ils prédisent une baisse du même ordre en juin ou juillet. La chance de Jerome Powell et ses sbires, c’est d’être actuellement en «quiet period». En d’autres termes ils n’ont pas le droit de s’exprimer jusqu’au 22 mars, ça leur laisse tout le temps pour élaborer un plan en cas de besoin, pour laisser retomber la poussière aussi.

Le marché obligataire a atteint un niveau de stress presque jamais vu dans son histoire. Prenez l’indice MOVE, qui mesure la volatilité de ce marché. L’indice clôture hier à 198.71 points, c’est proche du plus haut enregistré lors de la crise de 2008 (208.50 pts) et nettement supérieur au covid. Il semble que la liquidité du marché se soit considérablement asséchée ces derniers jours, même sur le marchés des Govies US, considéré comme extrêmement liquide et défensif. On observe le même phénomène sur les Bunds allemands. Les spreads s’écartent considérablement alors que les volumes d’échanges doublent, ce qui explique en grande partie les mouvements violents observés récemment, notamment sur le 2 ans US, qui chute hier de 4.40% à 3.70%, pour rebondir ce matin à 4.02%. L’un des facteurs à l’origine de cette agitation est le changement significatif, au cours de la semaine dernière, des perspectives de croissance et d’inflation au niveau mondial, reflétant les craintes que le désordre bancaire aux États-Unis et les problèmes en Europe ne signalent un ralentissement brutal à l’avenir.

La BNS déclare qu’il n’y a pas d’indications d’un «risque direct de contagion» pour les autres prêteurs suisses. Les fondamentaux de Credit Suisse restent solides. La question est de savoir s’il peut résister à cette tempête, écrit Paul J. Davies. En Californie,  First Republic explore des options stratégiques, y compris une vente, selon l’agence Bloomberg. Le prêteur est classé «junk» par S&P et Fitch. La FDIC demande aux banques intéressées par l’acquisition de SVB et de Signature Bank de soumettre leurs offres d’ici demain, selon Reuters.

Au menu macro-économique du jour, après les statistiques américaines des permis de construire et du chômage hebdomadaire (13h30), place à la décision de la BCE sur ses taux (14h15).

Siemens Energy lance une augmentation de capital de 1,3 milliard de dollars, pour financer le rachat de sa filiale Siemens Gamesa. Berkshire Hathaway achète de nouvelles actions Occidental Petroleum et porte sa participation à 23,1%. Leonardo signe un accord international pour le programme Global Combat Air. Avec l’ID.2, Volkswagen s’attaque au marché de l’électrique grand public. Holcim rachète HM Factory en Pologne. Telecom Italia fait monter les enchères sur son réseau fixe. Implenia remporte un nouveau grand projet de tunnel métropolitain à Oslo.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse, la nervosité reste ambiante. Tokyo recule de 0.8% à la cloche, Hong Kong abandonne 1.96%, Shanghai perd 1.12% et Séoul égare 0.08%. Le future SPX traite en très légère hausse et l’Europe est indiquée en rebond d’un peu plus de 1%.

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