Gonet: l'actualité des marchés au 21 juin

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Wall Street fermée, Eurostoxx +0,91%, SMI +0,33%.

Les places financières européennes font bonne figure hier, en l’absence de leur grande sœur américaine, qui commémore l’abolition de l’esclavage (Juneteenth Day). Le marché est encore et toujours en phase d’acceptation des différentes annonces de banques centrales autour du globe, qui referment toutes (ou presque) leur robinet monétaire et ont envoyé les courbes de taux d’intérêts au ciel. En Zone Euro, on n’avait plus vu de tels niveaux depuis 8 ans, mais la semaine passée, l’air de rien et dans une ambiance de capitulation boursière, on observe une certaine forme de retour au calme, notamment sur le spread entre le 10 ans BTP italien et le Bund allemand, qui revient de 241 points de base à 194 bps ce matin. Phénomène intéressant, le marché ne sourcille pas au discours de Christine Lagarde, qui confirme hier la trajectoire de hausse des taux d'intérêt présentée par le conseil des gouverneurs à l'issue de sa dernière réunion, le 9 juin. S'exprimant devant la Commission des Affaires économiques et monétaires du Parlement européen, la patronne de la Banque Centrale Européenne indique que la BCE compte relever ses taux de 25 points de base en juillet et d'au moins autant en septembre. Au-delà de septembre, des relèvements de taux «progressifs mais soutenus» devraient être appropriés, ajoute-t-elle.

Alors certes, les conditions de marché restent très compliquées, l’inflation n’a toujours pas atteint son pic, le prochain rapport important à ce sujet (indice américain des prix à la consommation pour le mois de juin), sort le 13 juillet. D’ici là, les ours ont tout loisir de lire quelques contes d’Andersen aux taureaux. L’épilogue annoncé de longue date du conte de fées «Wall Street au pays des liquidités sans fin» reste littéralement indigeste et la chaine d’approvisionnement globale reste perturbée, la guerre en Ukraine dure alors que la politique chinoise face au covid est problématique. Il faut bien comprendre que cette politique impacte l’économie domestique chinoise de plein fouet et, par ricochet, l’économie mondiale. Courant juillet débutera la saison des résultats de sociétés du deuxième trimestre, la grande question qui se pose est de savoir dans quelles proportions les bénéfices ont été altérés par le contexte qui nous occupe, le marché a-t-il intégré cela dans ses cours, là aussi un gros point d’interrogation est de mise.

Le résultat des élections législatives en France ne fait pas vraiment les gros titres du marché. L’euro remonte quelque peu contre le dollar et l’écart de rendement entre le 10 ans OAT et le  Bund allemand grimpe très légèrement, de 53 à 56 points de base. Quant à l’indice CAC40, il progresse un peu moins que ses pairs hier, mais il progresse. Le ressenti européen semble plutôt pencher vers l’idée que la France sort d’une bipolarité plutôt néfaste et rejoint le club des pays dirigés par des coalitions, tels que l’Allemagne ou encore l’Italie. L’avenir nous dira assez rapidement si la France est culturellement apte à progresser dans un tel contexte, le marché s’en soucie peu en l’état.

Ce mardi 21 juin semble démarrer calmement en termes de flux de nouvelles. Et pourtant c’est un sacré jour que celui-ci, il marque le début de l’été, c’est la fête de la musique en francophonie (qui célèbre ses 40 ans) et c’est étalement la journée internationale de la girafe…plus près du marché, les entreprises de tous bords communiquent moins, nous nous trouvons en pleine période calme, aux Etats-Unis on appelle cela la «black out period» durant laquelle les firmes tendent à ne pas communiquer, sauf des nouvelles importantes (par exemple un avertissement sur bénéfices). Dans un tel contexte, on a tendance à se pencher de plus près sur la situation technique du marché, qui n’est pas belle de prime abord, la plupart des indices d’actions a cassé ses supports et voit les prochains niveaux 3 à 4% plus bas. Par exemple, l’indice S&P500 (SPX) voit son principal support à 3500 points contre 3674 points en clôture vendredi. Mais si on regarde le marché des futures ce matin, un rebond se dessine, qui est probablement inspiré par la semaine passée, durant laquelle le SPX a vécu sa plus forte pression vendeuse depuis 1928, le marché a capitulé à nouveau.

Si les valorisations ont bien repricé (15,5x P/E – Price Earning Ratio - pour le S&P500), elles restent tout juste supérieures aux moyennes à 15 ans. La question est de savoir si le marché a déjà repricé le «E» du ratio et de nombreuses voix s’élèvent pour alerter sur le fait qu’une croissance des bénéfices par action de 11% est probablement un peu trop optimiste pour cette année. Rendez-vous dès la mi-juillet pour la réponse donc.

Le pétrole fait de la résistance, après avoir fait mine de décrocher sur les dernières séances et testé hier sa moyenne mobile à 50 jours, qui se situe actuellement à 109,55 dollars par baril de WTI Light Crude. Retour à 111,52 dollars ce matin, apparemment parce que la demande chinoise a repris et que les stocks de produits raffinés restent faibles à l'approche d'une saison gourmande en carburant dans l'hémisphère nord (US driving season).

James Bullard (membre votant du FOMC) prévient  que les anticipations d'inflation aux États-Unis risquent de «se désarticuler sans action crédible de la Fed», ce qui conduirait à des prix encore plus élevés et à une volatilité économique. «La situation macroéconomique américaine actuelle met à rude épreuve la crédibilité de la Fed» en ce qui concerne son objectif de prix, déclare le patron de la Fed St Louis.

L'avertissement sur bénéfices à venir lancé hier par le fournisseur de matériaux de construction Kingspan, en citant le ralentissement de la demande, a fait tomber les stocks de construction européens à leur plus bas niveau depuis novembre 2020. Le mouvement était-il excessif? L'indice Stoxx 600 Construction & Materials était déjà à la traîne au cours des trois derniers mois, et son RSI à 14 jours se négocie désormais sous 30 – en territoire survendu. À suivre…

Au menu macro-économique du jour, l'indice d'activité de la Fed de Chicago (14h30) et les chiffres de l'immobilier ancien aux Etats-Unis (16h00) animeront l'après-midi.

Adidas: Oddo BHF passe de surperformance à neutre en visant 204 euros. Hermès va racheter jusqu'à 500’000 de ses propres actions. JetBlue relève son offre d'achat de Spirit Airlines de 31,50 à 33,50 dollars par action (Anacott Steel ne commente toujours pas). Tesla est poursuivie par d'anciens employés suite à un «licenciement collectif».

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices rebondissent de belle façon, hormis Shanghai qui se replie de 0,47%. Tokyo gagne 1,84% à la cloche, Hong Kong avance de 1,31% et Séoul progresse de 0,75%. Le future SPX est en hausse de 1,2% et l’Europe ouvre en progression de 0,4%. La semaine passée a été brutale, l’actuelle démarre vraiment aujourd’hui avec le retour de Wall Street, dans une configuration de rebond technique d’un marché toujours en mode baissier, raison garder il faut donc, le chemin est encore long qui mène à un rebond pérenne, il passera inévitablement par le col de l’inflation.

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