Gonet: l'actualité des marchés au 17 octobre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow -1,34%, SPX -2,37%, Nasdaq -3,08%, Russell 2000 -2,66%, SOX -4,46%, Eurostoxx +0,57%, SMI +0,99%.

La lueur d’espoir engendrée par le puissant rebond technique de jeudi est soufflée comme une vulgaire bougie vendredi par un marché aux aguets et qui n’apprécie guère l’annonce de la hausse des anticipations d'inflation qui se manifeste vendredi dans l'enquête sur le sentiment des consommateurs de l'Université du Michigan et pousse les rendements du Trésor à leurs plus hauts niveaux depuis 2008. Le rendement du 10 ans US remonte à 3,97%, c’est un peu beaucoup pour un marché qui était parvenu la veille à surmonter la nouvelle d’un indice américain des prix à la consommation plus élevé que prévu. L’indice S&P500 (SPX) réalise la «prouesse» de reculer de plus de 1% pour le 5e vendredi consécutif. Les indices boursiers devraient peut-être rester fermés le vendredi cette année, en prenant un peu de recul, on constate que 36% d’entre eux ont engendré des replis supérieurs à 1%, aucune autre année ne s’approche de cette performance assez folle. D’un point de vue technique, le SPX termine sa journée pile sur son niveau de support horizontal (zone 3574 – 3584, clôture à 3583 points). Le Nasdaq100 (NDX) quant à lui serait bien avisé de récupérer son niveau de 11'000 points sans trop tarder, histoire de ne pas laisser les ours s’enhardir. Clôture vendredi à 10'692 points.

Tous les secteurs du SPX reculent sur la journée, avec sur le podium des plus jolies glissades la consommation discrétionnaire, l’énergie et les materials. Les mastodontes de la cote sont délaissés (notamment AAPL, AMZN, TSLA, MSFT, NVDA, GOOG, META), difficile de réaliser une belle clôture dans de telles conditions. Je note que les volumes d’échanges dans l’ETF (Exchange Traded Fund) TQQQ explosent jeudi et vendredi. Cet ETF est une forme de «Silver Star» pour adultes, il vous permet de vous exposer à 300% de la performance du NDX. Le volume journalier moyen d’échanges sur le TQQQ est de 142 millions de titres, jeudi 414 millions sont échangés, vendredi 335 millions. En parallèle, les volumes de trading de vendredi se limitent à 10,2 milliards de titres traités, le marché s’est donc concentré sur la technologie jeudi, avec un effet de balancier vendredi. Les plaques tectoniques bougent donc, mais la volatilité semble avoir trouvé son camp de base, reste à savoir si elle s’apprête à redescendre en plaine ou à gravir un sommet. Le VIX clôture sa séance de vendredi inchangé à 32, la résistance de 35 semble si proche et si lointaine à la fois.

On le constate, la fin de la semaine passée a accouché de mouvements techniques puissants, voire violents sur les indices d’actions. Un enseignement que l’on peut retirer de cela est que Wall Street semble désormais avoir assimilé l’idée que la Fed fera bel et bien ce qu’elle dit, le marché s’attend à des taux directeurs qui culminent à 4,90% en avril 2023, c’est plus élevé que les 4,6% en moyenne pour 2023 prévus par le modèle de la Fed. Une hausse de 75 points de base le 2 novembre est totalement anticipée, alors que les Fed Funds s’attendent à 50 points de base lors de la réunion du 14 décembre. Il est indéniable que des mouvements tels que ceux observés jeudi et vendredi passés sont de nature à déstabiliser plus d’un intervenant, qu’il soit haussier ou baissier. Bespoke Investment Group s’empare du sujet et nous rappelle que des mouvements violents du type de celui de jeudi ne se produisent que très rarement (9 fois depuis 1983). Selon BI, ces fluctuations sauvages sont souvent suivies de périodes volatiles à court termes, mais indiquent bien souvent aussi l’approche de ce fameux plancher, que les taureaux recherchent avidement.

Quoi qu’il en soit, des opportunités existent, même dans le pataquès actuel, que ce soit sur la partie des obligations de très bonne qualité en vue d’un ralentissement de la croissance et de l’inflation en 2023, impactée par le fort resserrement monétaire actuel. Les rendements sont devenus intéressants à nouveau, même sur des signatures en francs suisses. Dans un autre registre, les produits structurés restent les stars du moment, qui offrent des coupons élevés bien souvent accompagnés de prises de risques tout à fait mesurées. Même au sein du marché des actions en direct, des opportunités émergent si l’on se concentre sur des firmes disposant notamment de solides cash-flows.

Du côté des méchants gouverneurs de la Fed, on continue de battre le tambour des «taux plus élevés pour plus longtemps». La présidente de la Fed de San Francisco, Mary Daly, indique que les taux vont probablement augmenter à 4,5%-5%, tandis qu’Esther George de la Fed de Kansas City déclare que les taux d'épargne plus élevés ont fourni un tampon à la Fed pour augmenter les taux à un niveau plus élevé que ce qui aurait été le cas autrement.

La politique britannique et les vents contraires macroéconomiques retiennent également l’attention du marché. Le ministre des finances Kwarteng est limogé et remplacé par Jeremy Hunt. Dans le même temps, des membres du parti conservateur seraient en pourparlers pour remplacer Liz Truss par un «candidat de l'unité». Le marché des Gilts commence la journée de vendredi avec un rendement en baisse de plus de 25bps..... pour clôturer à +14bps! Liz Truss se battra pour sauver son poste de première ministre cette semaine, alors que les marchés financiers rendront un nouveau verdict sur son retour en arrière économique. La livre sterling rebondit ce matin à 1,1261 contre le dollar en raison du nouveau chancelier Jeremy Hunt, qui pourrait revenir sur son paquet de réductions d'impôts non financées. Il fera une déclaration aujourd'hui sur ses projets fiscaux. Le trading des gilts sera surveillé de près après que la Banque d’Angleterre ait mis fin à son programme de soutien vendredi.

La fin de la semaine passée est aussi marquée par le vrai départ de la saison des résultats de sociétés au troisième trimestre. Les bancaires américaines sont de sorties et cela se passe plutôt bien, à une exception près: C +0,65%, JPM +1,66%, MS -5,07% et WFC +1,86%, la grande nouveauté est l'énorme hausse des NII/NIM (Net Interest Income, Net Interest Margin) grâce à la hausse des rendements obligataires, tandis que les revenus hors intérêts chutent (mais pas autant que prévu). Morgan Stanley est le vilain petit canard du jour, en grande partie parce que le NII n’y représente pas une part aussi importante de son chiffre d'affaires. La qualité du crédit reste généralement très saine, bien qu'un léger affaiblissement se produise à la marge, tandis que la croissance des prêts reste robuste. L’industrie prévoit de meilleures perspectives pour l'année 2022 (mais pas pour 2023)

En conclusion, les indices boursiers vivent une semaine passée particulièrement volatile, tiraillés entre la hausse des rendements obligataires, les craintes de récession et les statistiques sur l'inflation américaine plus élevées que prévu, qui confirment la trajectoire de la Fed. En attendant les décisions de la Banque Central Européenne en fin de mois et celle de la Réserve Fédérale le 2 novembre prochain, l'attention devrait se tourner vers les publications de sociétés pour le troisième trimestre.

Xi Jinping a donné le coup d'envoi du congrès du Parti communiste chinois en réaffirmant l'objectif de réunification avec Taïwan et en défendant des politiques telles que la répression à Hong Kong et le Covid Zero. Il maintient un précédent de 20 ans en désignant le développement économique comme la principale priorité du parti – certains analystes s'attendaient à ce que Xi dise que la sécurité nationale était la nouvelle priorité principale.

Le début de semaine sera marqué par l'annonce de la première estimation de la croissance du PIB chinois au troisième trimestre (mardi). Suivront l'indice des prix à la consommation britannique de septembre (mercredi) et l'indice manufacturier américain «Philly Fed» (jeudi). James Bullard, l'un des membres de la Fed les plus en vue du moment, doit prononcer un discours dans la nuit de mercredi à jeudi.

Au menu macro-économique du jour, l'indice Empire Manufacturing américain d'octobre sera publié à 14h30.

Les principaux noms à publier leurs résultats trimestriels cette semaine seront Johnson & Johnson, Roche, Netflix, Tesla, Nestlé, ASML, IBM et L'Oréal. Le calendrier compte 59 entreprises de l'indice S&P500 américain et 34 de l'indice Stoxx Europe 600 européen.

News Corp et Fox Corp discutent d'un rapprochement. Broadcom espère une approbation rapide par l'UE du rachat de VMware pour 61 milliards de dollars. Vodafone et Altice signent un accord pour déployer la fibre en Allemagne. Goldman Sachs va combiner ses activités de banque d'investissement et de trading, rapporte le Wall Street Journal. Cevian a cédé la majeure partie de ses titres Vodafone jusqu'en juin dernier, selon le Financial Times. Apple gèle son projet d'utiliser les puces chinoises YMTC, indique Nikkei. L'activiste Starboard prend une participation importante dans Splunk. Temenos chute de 19% vendredi. Le groupe suisse révise en baisse ses objectifs 2022, dans des proportions qui étonnent les analystes. Apparemment, les clients du secteur financier ont repoussé leurs décisions d'investissement. Ces mauvais chiffres entraînent le départ du directeur commercial, arrivé depuis peu. L'actionnaire activiste Petrus Advisers étrille le management suite à la publication. Selon le Wall Street Journal, Goldman Sachs prévoit de combiner ses activités de banque d'affaires et de négociation en une seule unité. Ses divisions de gestion d'actifs et de patrimoine pourraient être regroupées dans une autre unité qui inclurait sa branche de services bancaires aux particuliers. Credit Suisse se prépare à vendre des parties de sa banque domestique pour tenter de combler un déficit de fonds propres d'environ 4,5 milliards de francs suisses, selon le Financial Times.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en ordre dispersé. Tokyo perd 1,16% à la cloche, Hong Kong recule de 0,15%, Shanghai progresse de 0,42% et Séoul grappille 0,32%. Le future SPX avance de 40 points et l’Europe ouvre en légère progression de 0,2%, elle a donc échappé à la punition de vendredi soir en l’état. Le dollar et l’euro se neutralisent, la paire évolue à 0,9737, l’or traite à 1652 dollars l’once et le pétrole a reculé à 86,51 dollars le baril de WTI Light Crude, probablement impacté par les craintes de récession.

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