Gonet: l'actualité des marchés au 14 octobre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

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Dow +2,83%, S&P 500 +2,60%, Nasdaq +2,30%, Russell 2000 +2,41%, SOX +2,94%, Eurostoxx +0,93%, SMI +0,28%.

Jeudi 13 octobre, 14h30, le marché se présente face à l’indice américain des prix à la consommation (CPI) KO debout. Wall Street recule depuis six séances, le sentiment des investisseurs est au plus bas, la volatilité règne sur les indices, on se dit dans les salles de marchés qu’un coup de pouce de l’inflation serait plus que bienvenu.

C’est un véritable uppercut que le CPI envoie au marché. Il augmente de 0,4% en septembre, contre 0,1% en août, c’est au-dessus des prévisions de 0,2%. Les prix à la consommation de base, qui ne comprennent pas les aliments et l'énergie, progressent de 0,6%, ce qui est supérieur aux attentes de 0,4% et inchangé par rapport à août. Le CPI avance de 8,2% en glissement annuel, soit un peu moins que le consensus de 8,3%, mais le chiffre de base progresse de 6,6%, contre 6,3%. Mis à part la baisse des prix des voitures et des vêtements, peu de choses dans le rapport indiquent que l'inflation est maitrisée.

La réaction des indices ne se fait pas attendre, ils plongent tous fortement à l’ouverture, ambiance de fin du monde sur les parquets de trading. Et puis quelque chose se produit, exactement 15 minutes après l’ouverture, qui provoque un retour en force des acheteurs. L’indice Dow Jones, qui perdait 500 points, les récupère et en gagne 800 à la cloche. C’est simple, cela ne s’était jamais produit auparavant. Le vénérable indice se paie même le luxe de récupérer le niveau de 30'000 points à la cloche, ont ressort les t-shirts. L’indice S&P500 (SPX) reculait de 2,4%, il en gagne 2,6% à la clôture, un différentiel de 5% historique. Notons ici que le bas du jour du SPX se situe à 3491 points, contre une clôture à 3669. Le support de 3525 – 3500 points a donc fonctionné à merveille et se trouve conforté dans son rôle.

Mais que s’est-il donc passé au plus très joyeux royaume des actions?

J’entends parler de révolte des acheteurs, restons sérieux. Avant toute chose, la hausse d’hier constitue en l’état un rebond technique dans un marché baissier, elle fait certes grand bien mais doit être confirmée à plusieurs reprises pour constituer un élément déclencheur à terme. Un rebond technique, car au plus bas du jour, le SPX retrace 50% du gain réalisé entre son bas du covid (mars 2020) et son sommet de janvier 2022. Il s’agit d’un niveau très important pour les chartistes, dès qu’il est atteint hier on observe le déclenchement d’une vague acheteuse. En parallèle, les indices reculant en tout début de séance, de nombreuses options put (option donnant le droit de vendre, qui prennent de la valeur lorsque leur sous-jacent recule) sont vendues par leurs détenteurs car les options entrent dans la monnaie et deviennent profitables. Ce phénomène entraine techniquement des achats dans le marché (les dealers veulent rester «market neutral»), ce qui pousse de nombreux intervenants à couvrir leurs positions shorts (vendues à découvert), une superbe boule de neige acheteuse se forme.

Au-delà de l’aspect technique, on peut envisager que le marché soit «déçu en bien» par les résultats de sociétés. Par exemple Delta Air Lines (DAL +4,01%) et Domino's Pizza (DPZ +10,47%) manquent les estimations de résultats mais trouvent d'autres moyens d'impressionner les investisseurs. Les résultats de Domino’s Pizza sont considérés comme moins mauvais que prévu et les ventes trimestrielles supérieures aux attentes rassurent les investisseurs vis-à-vis de l’inflation. De son côté, Walgreens Boots Alliance (WBA +5,29%) bat les attentes et maintient ses prévisions intactes. Le marché semble donc disposé à voir le verre à moitié plein. Ceci dit, pour chaque société comme Delta, une autre annonce de mauvaises nouvelles. Taiwan Semiconductor Manufacturing (TSM +4,16%) bat les attentes en matière de bénéfices mais met en garde contre une demande de puces plus faible. L'assureur Progressive (PGR +0,88%) parvient à clôturer dans le vert après avoir manqué les prévisions. Nous entendons ce que nous voulons entendre.

Et puis il y a les attentes du marché par rapport à la Fed. Les Fed Funds voient désormais les taux à 4,9%, c’est plus que ce que la Réserve Fédérale elle-même prévoit et cela indique une capitulation massive du marché à ce sujet, les investisseurs rendent les armes et acceptent que la Fed pourrait ne pas réduire ses taux avant longtemps et ça, c’est un sacré pas en avant. Il y a encore peu, tout un chacun dans les salles de marchés espérait que les taux cessent de grimper, pour redescendre aussi sec. Aujourd’hui, l’idée a fait son chemin qu’ils puissent rester en altitude un certain temps.

Les volumes d’échanges sont bons avec 13.25 milliards de titres traités sur le NYSE, la peur est portée disparue, du moins hier, la volatilité recule, le VIX perd 4,8% à 31,94, les produits structurés restent très attractifs. Tous les secteurs du SPX grimpent avec en tête les financières, l’énergie et la technologie. Attention aux financières, de nombreuses banques américaines rapportent leurs résultats aujourd’hui.

Dans le marché obligataire, le rendement du 10 ans US se met en orbite dès après le rapport sur l’inflation, pour atteindre 4,07%. Ce matin il évolue à 3,90%, la courbe des taux US se calme, le dollar s’est affaibli, notamment contre euro à 0,9773, l’or en profite qui rebondit à 1668 dollars l’once, le pétrole aussi, le baril de WTI Light Crude revient à 89,48 dollars.

Est-il besoin de vous dire que le marché accepte désormais pleinement une hausse de 75 points de base par la Fed le 2 novembre, puis 50 points de base supplémentaires lors de la réunion suivante?

Allez on le dit, ça fait du bien de voir des écrans tout verts n’est-ce pas? Ceci dit, je sais bien que nous sommes vendredi, qu’il fait presque beau à Genève et que le monde de Hans Zimmer m’attend ce soir, mais il faut savoir raison garder et prendre conscience que des mouvements boursiers d’une telle violence ne sont pas rares pour rien. Ils indiquent souvent un marché troublé, tout n’est pas résolu au un peu plus joyeux royaume des actions, la vigilance est de mise.

On quitte notre royaume préféré pour rejoindre celui de Benny Hill. C'est aujourd'hui qu'est censé prendre fin le programme de rachat de Gilts annoncé par la Banque d'Angleterre pour éviter des dégâts considérables pour le système financier britannique. Le chancelier Kwasi Kwarteng a quitté les réunions du FMI plus tôt que prévu pour rentrer à Londres, alors que Downing Street s'apprête à abandonner son projet d'un ensemble massif de réductions d'impôts à crédit. La directrice du FMI, Kristalina Georgieva, salue cette idée. «Lorsque la politique monétaire freine, la politique budgétaire ne doit pas appuyer sur l'accélérateur, ce qui rendrait le voyage très dangereux», déclare-t-elle. La BOE a intensifié ses achats d'urgence d'obligations hier, en achetant un montant record de 4,68 milliards de livres sterling la veille de la fin du programme. La livre sterling est revenue à 1,1265.

Sur les pattes arrière l’ami Jamie? Le CEO de JP Morgan déclare qu'il est peu probable que la Fed parvienne à un atterrissage en douceur, et que son instinct lui dit que les taux devront augmenter plus que les 4 à 4,5% prévus par de nombreux économistes. Jamie Dimon ajoute qu'il a toujours «une foi et une confiance totales» en Jerome Powell. Les principales banques de Wall Street lancent aujourd'hui la saison des résultats avec JPMorgan, Citi, Wells Fargo et Morgan Stanley. L'accent est moins mis sur le dernier trimestre – bien que le ralentissement des frais de banque d'investissement sera toujours un élément clé – et plus sur ce qui se prépare avec la hausse de la Fed. Les provisions pour créances douteuses, qui devraient s'élever à 4,56 milliards de dollars pour les six plus grandes banques, seront au centre de l'attention.

Au menu macro-économique du jour,  les ventes de détail de septembre (14h30) puis les stocks d'entreprises d'août et l'indice de confiance des consommateurs de l'Université du Michigan d'Octobre (16h00). L'inflation annuelle chinoise est ressortie à 2,8%, en ligne avec les attentes.

Kroger négocierait un rapprochement avec Albertsons. Mizuho Financial s'intéresserait à l'unité SPG de Crédit Suisse. United Airlines négocie l'acquisition de 100 gros porteurs, soit des A350 d'Airbus soit des B787 de Boeing. Netflix va lancer un service financé par la publicité à 7 USD par mois. Elon Musk visé par une enquête liée au rachat de Twitter. Schlumberger envisage de vendre son activité Valves aux Etats-Unis pour plus de 800 millions de dollars. Novartis doit payer 178 millions de dollars de dommages et intérêts après avoir perdu le litige sur le brevet Tafinlar aux États-Unis. Le groupe va par ailleurs supprimer 400 emplois en Irlande. Volkswagen investit 2,4 milliards de dollars pour une participation de 60% dans une nouvelle coentreprise chinoise avec Horizon Robotics. UPM relève ses prévisions annuelles. Apple lance un compte d'épargne à haut rendement avec Goldman Sachs.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en forte hausse, merci Wall Street. Tokyo gagne 3,25% à la cloche, Hong Kong avance de 1,90%, Shanghai progresse de 1,84% et Séoul monte de 2,30%. Le future SPX gagne 20 points et l’Europe ouvre en hausse de 1,8%.

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