Gonet: l'actualité des marchés au 10 novembre

Jean Frédéric Nussbaumer, Gonet & Cie

4 minutes de lecture

Dow -1,95%, S&P 500 -2,08%, Nasdaq -2,48%, Russell 2000 -2,68%, SOX -3,14%, Eurostoxx -0,30%, SMI +0,71%.

C’est un cocktail plutôt douteux que goûtent les investisseurs hier, un cocktail fait d’absence de vague rouge, de quelques résultats de sociétés décevants et d’un vent de panique sur le marché des crypto-monnaies. Au chapitres des élections de mi-mandat aux Etats-Unis, les républicains restent en mesure de remporter les deux chambres, le décompte n’est pas terminé, mais on est déjà certain que la vague rouge annoncée n’a pas eu lieu. Hier le marché se met en mode «vendre les nouvelles». Il est probable que tout un chacun dans les salles de marchés ne goûte guère la lenteur du dépouillement ainsi que le partage des forces en puissance. La chambre des représentants va probablement tomber dans l’escarcelle des républicains dans les prochaines heures. En revanche, au sénat la situation est nettement plus confuse. Les démocrates ont 48 sièges et les républicains 49. Il en reste trois à pourvoir. Il faudra recourir à un second tour le 6 décembre en Géorgie, tandis que les duels sont trop serrés en Arizona et au Nevada pour déterminer un vainqueur pour l'instant. Bref, l’incertitude règne sur cette partie, ce que le marché abhorre. En parallèle, les résultats de sociétés penchent du côté décevant hier, avec des chiffres / prévisions mitigés de Walt Disney (DIS), Affirm Holdings (AFRM), CarGurus (CARG), Roblox (RBLX) et Upstart (UPST), dont beaucoup étaient d'anciens chouchous des valeurs de croissance lorsque les taux d'intérêt étaient à zéro.

Et puis il y a le super joyeux royaume des crypto-monnaies, où ça ne rigole mais alors plus du tout. L’excellent Anthony Bondain nous rappelle ce matin que «La complaisance vis-à-vis de l'univers des crypto-monnaies a atteint son apogée il y a un an presque jour pour jour, lorsque le bitcoin a flirté avec 69’000 USD. A cette époque, les grandes maisons de Wall Street et un certain nombre d'institutionnels avaient fini par se décider de prendre le train en marche: pas question de ne pas en être s'il y a de l'argent à se faire. Tout allait bien pour tout le monde puisque tout montait. Et puis le temps de l'abondance monétaire a tiré sa révérence et des montages pyramidaux grossiers ont commencé à s'écrouler. De petits poissons, puis des moyens, sont passés à la trappe. Puis de plus gros. Jusqu'à la plateforme FTX cette semaine, un empire qui s'effondre en quelques heures.» Hier matin nous apprenions que Binance est sur le point de racheter FTX, ce matin paf ! plus de Binance à l’horizon. Sam Bankman indique aux investisseurs de FTX qu’il a besoin d’une injection de liquidités, sans quoi sa firme devra déposer le bilan.

Et là tout s’emballe, tout un chacun se met à crier haut et fort, triste spectacle que celui d’investisseurs décérébrés tentant de sauter du bateau sans se mouiller. Le courtier Hidden Road exhorte ses clients à retirer leurs fonds de FTX, JP Morgan déclare qu’une cascade d’appels de marge pourrait faire chuter le bitcoin à 13'000 dollars (note à moi-même: revérifier le niveaux du XBT avant de publier la chronique au cas où ce dernier aurait perdu 3700 dollars dans l’intervalle). Le vendeur à découvert Jim Chanos prévient «qu’une répression réglementaire du marché est imminente», je pouffe…Evercore annonce que la contagion pourrait s’étendre à d’autres classes d’actifs et le DoJ (US Department of Justice) ouvre une enquête sur FTX. On apprend ce matin que les fonds Tiger, Third Point et Altimeter sont embourbés dans FTX, tout comme Tom Brady et peut-être votre voisin…On revient à Anthony Bondain, qui cite Emile Zola, qui écrivait en 1891 dans l’Argent que «Dans ces batailles de l'argent, sourdes et lâches, où l'on éventre les faibles, sans bruit, il n'y a plus de liens, plus de parenté, plus d'amitié».

Retour au joyeux royaume des actions, qui fait donc grise mine hier. L’indice S&P500 (SPX) repasse en-dessous de la barre des 3800 points ainsi que de sa moyenne mobile à 50 jours, dans des volumes d’échanges corrects, 11,13 milliards de titres sont traités sur le NYSE. La volatilité récupère 2%, le VIX revient à 26,09. Les indices terminent tous au plus bas du jour, ambiance… Le breadth, l’écart entres les titres clôturant en hausse par rapport à ceux en baisse, est déplorable avec 6% de positif sur le Nasdaq100 (NDX) et 8% sur le SPX. Au chapitre des secteurs, notons que l’énergie se prend littéralement les pieds dans le tapis avec une chute de près de 5%. Le pétrole n’y est pas étranger, le baril de WTI Light Crude se replie à 85,40 dollars. Les actions de croissance / spéculatives sont les plus attaquées, notamment les véhicules électriques, les crypto et les actions chinoises cotées à Wall Street. Les shorts, à l’odeur alléchés, se jettent dans la mêlée.

Le marché semble oublier que ce qui compte vraiment, ce sont la Fed et ses taux d’intérêts. À ce propos, le ô combien important indice des prix à la consommation américain sera publié cet après-midi à 14h30. Le marché pense de plus en plus que la méchante inflation est en train de s’essouffler, mieux vaudrait que cela soit confirmé cet après-midi. Le rendement du 10 ans US recule à 4,19%, le dollar reste plutôt faible, il traite à parité contre l’euro. L’or revient à 1709 dollars l’once.

L’agence Bloomberg pense que la croissance du CPI a probablement ralenti à 7,9% en glissement annuel en octobre, tout en s'accélérant à 0,6% en glissement mensuel. Une lecture plus élevée pourrait inciter la Fed à relever ses taux le mois prochain. Le chef sortant de la Fed de Chicago, Charles Evans, déclare que le FOMC devrait commencer à ralentir son cycle de resserrement, car il tient compte des délais d'impact de la politique.

Les démocrates ont eu une «nuit forte» et ont dépassé les attentes lors des élections de mi-mandat, déclare Joe Biden. Il prévoit de se représenter en 2024, même si une décision officielle ne sera probablement pas prise avant le début de l'année 2023. Donald Trump qualifie les résultats du vote de «quelque peu décevants», le GOP n'ayant pas obtenu la vague de victoires qu'il avait prédite.

Le retrait prévu de la Russie de la ville de Kherson est la preuve des «problèmes réels» auxquels son armée est confrontée, déclare Joe Biden. Vladimir Poutine ne participera pas au sommet du G20 en Indonésie la semaine prochaine. Le Royaume-Uni fournit à l'Ukraine un millier de missiles sol-air supplémentaires, annonce le ministre de la Défense Ben Wallace.

Credit Suisse devra payer un prix élevé pour obtenir les fonds nécessaires à la mise en œuvre de ses vastes plans de restructuration. La banque commercialise son obligation en dollars à taux fixe-variable sur 11 ans avec un rendement d'environ 9%, un niveau conforme aux niveaux de négociation actuels pour la dette «junk». Le CDS de Credit Suisse est fortement remonté, à 345 points de base, c’est inquiétant.

Au menu macro-économique du jour, aux Etats-Unis les inscriptions hebdomadaires au chômage et les chiffres de l'inflation d'octobre seront publiés à 14h30.

Allianz dépasse les prévisions de bénéfices trimestriels et affiche des perspectives plus favorables pour 2022. AstraZeneca: les prévisions annuelles sont relevées. Deutsche Telekom relève à nouveau ses perspectives pour l'exercice 2022. Generali: les objectifs 2024 devraient être atteints. Merck KGaA: les bénéfices dépassent le consensus grâce aux équipements de laboratoire et aux ventes de médicaments. L'accord d'Allianz pour vendre ses opérations en Russie est retardé par l'autorité de régulation. Robinhood n'a pas d'exposition directe à FTX, dit le CEO.

Cette nuit et ce matin en Asie, les indices traitent en baisse, Tokyo recule de 0,98% à la cloche, Hong Kong abandonne 2,04%, Shanghai rend 0,39% et Séoul perd 0,91%. Le future SPX traite à l’équilibre et l’Europe ouvre en repli de 0,6%, tout le monde sur le pont à 14h30 pour la statistique sur l’inflation!

A lire aussi...