Produits structurés: une solution quel que soit le marché

Nicolette de Joncaire

3 minutes de lecture

Incertitude, hausse des taux, crise géopolitique; autant de raisons de structurer un produit ad hoc. Avec Eun-Kyul Koh de Vontobel.

Construits à partir d’actions, d’obligations, de FX, de commodities ou même de CLN, les produits structurés offrent une étonnante versatilité qui leur permet de répondre à toutes sortes de conditions de marché, en correspondant à des objectifs bien précis de protection des portefeuilles ou d’amélioration des résultats. Tour d’horizon avec Eun-Kyul Koh, Head of Structured Solutions and Investments chez Vontobel.

De quelle manière les produits structurés répondent-ils à la structuration d’un portefeuille privé? Peuvent-ils constituer une bonne protection contre les aléas de marché?

Les produits structurés sont cross-assets et offrent une très bonne diversification du rendement; en cela ils répondent adéquatement à la structuration d’un portefeuille privé. Mais tout dépend des préférences du client et du contexte de marché. Le client cherche-t-il à optimiser son rendement, désire-t-il une protection, veut-il un levier? Par exemple, si les taux sont élevés et la volatilité faible, l’investisseur va chercher à protéger son capital ou se tourner vers le marché obligataire. Dans tous les cas de figures, la première étape du conseiller est d’analyser le portefeuille existant avant de proposer un ou plusieurs produits structurés.

Ces produits sont généralement introduits en appoint. Jusqu’à quels niveaux?

Actuellement ils représentent environ 3 à 4% des portefeuilles mais nous essayons de cibler une pénétration de 5 à 6%.

Optimisation du rendement, levier, protection du capital, participation, quels sont les produits qui rencontrent le plus de succès auprès de votre clientèle?

Cela dépend des années et de l’état des marchés. 2021 fut une année record pour les produits d’optimisation du rendement. 2022, dominé par la géopolitique a rendu les investisseurs frileux. Ils hésitaient à investir. 2023 est l’année de la hausse des taux. En conséquence, les produits d’optimisation du rendement représentent à peu près 52% du total alors que les années précédentes cette proportion n’était que de 30% environ. Les produits visant la protection du capital sont, pour leur part, passés de 5 à 15%. La majorité des sous-jacents reste sur les actions (55%) mais nous voyons monter la part obligataire, le FX et les commodities. Nous observons également une augmentation de l’intérêt pour les credit linked notes (CLN) et les Certificats gérés activement (AMC ou Actively Managed Certificates) qui exigent néanmoins un investissement minimum entre un et deux millions de francs suisses et qui proviennent essentiellement de stratégies de gérants externes pour lesquelles Vontobel assure l’exécution.

 «En octobre un nouveau produit a été lancé, basé sur la Data Intelligence, qui couvre un spectre encore plus vaste avec un focus sur les actions qui sont financièrement robustes avec une bonne valorisation.»
Vos clients cherchent-ils souvent à mettre en place des convictions à l’aide de produits structurés thématiques? Pouvez-vous nous en donner des exemples?

Vontobel a un focus très clair sur les produits basés sur les convictions et en lance trois à quatre structures thématiques par an. En tout, nous en avons déjà émis environ septante. L’un des thèmes actuels est l’intelligence artificielle, lancé en mai avec des actions un peu niches, pour élargir le spectre des portefeuilles clients déjà très investis sur les blue chips comme Nvidia. En octobre un nouveau produit a été lancé, basé sur la Data Intelligence, qui couvre un spectre encore plus vaste avec un focus sur les actions qui sont financièrement robustes avec une bonne valorisation. Un autre thème est l’European travel basket qui capitalise sur la reprise des voyages post-Covid car les consommateurs ont encore beaucoup d’argent après s’être privés pendant trois ans.

Quel type de client pour quel produit?

La typologie est très variée. Nous voyons des gérants affichent une préférence marquée pour une ou plusieurs actions et cherchent à protéger leur capital avec des produits très conservateurs pour neutraliser leurs positions. A l’opposé, d’autres sont très «bullish» avec de fortes convictions et préfèrent les produits à levier long ou short. D’autres encore cherchent à couvrir les positions déjà en portefeuille, contre les risques de change par exemple. Et puis certains gérants créent leurs propres stratégies complexes et nous leur construisons des AMCs.

Avec la hausse des taux, les Credit Link Notes sont devenues très populaires. Expliquez-nous de quelle manière vous les utilisez?

Les CLN que nous commercialisons sont émis par Vontobel et structurés à partir de Credit Default Swap (CDS). Ils sont plus intéressants qu’une obligation dans trois cas: le premier est quand le CLN donne accès à un sous-jacent qui autrement n’est pas disponible, le second est quand la liquidité est insuffisante et que le CLN en créée, et le dernier est quand son coupon est supérieur à celui du bond. Le CLN peut être émis sur un émetteur ou un emprunt Investment Grade ou High Yield.

Votre équipe s’est beaucoup renforcée dans les deux dernières années. Qu’en est-il à Genève?

Notre équipe compte en tout dix-huit personnes. Nous avons décidé d’affecter trois personnes en permanence à Genève. Elles sont respectivement chargées des activités relatives aux AMC, des produits structurés et de la relation client. Nous continuons à recruter à Genève en fonction des opportunités pour nourrir les projets d’expansion à venir.

Prochaines étapes?

2022 a été difficile. Nous avons joué sur l’internationalisation, et surtout attachés à fournir un service stable et des idées hebdomadaire basée sur les évènements du marché: une sur la Suisse, une sur la macro, une sur nos portefeuilles existants et une sur un thème spécifique. Ces idées étaient envoyées aux clients par email puis suivies par des conversations. 2023 s’est montré différent et très intéressant pour les structurés grâce au changement de dynamique dont la hausse des taux mais aussi des défis comme la baisse de la volatilité. L’outlook de 2024 comprendra deux nouveaux thèmes: les CLN automatisés et l’immobilier et plus particulièrement l’immobilier commercial lié à l’inflation. Un sujet négligé pour l’instant mais pour lequel l’intérêt grandit.

A lire aussi...