Vers un changement de cap des marchés au deuxième trimestre 2022

Florian Roger, Exane Solutions

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Les marchés financiers sont chahutés par les tensions géopolitiques et inflationnistes.

Les surprises sur le front de l’inflation ont nourri les craintes que les principales banques centrales accélèrent et amplifient leur durcissement monétaire en début d’année 2022. En conséquence, les taux se sont tendus des deux côtés de l’Atlantique, les primes de risque payées sur les actifs obligataires ont nettement augmenté (que ce soit pour les obligations souveraines périphériques de la zone euro ou pour les obligations d’entreprises) et les marchés actions ont traversé une zone de turbulence, notamment les valeurs dont les multiples de valorisation sont élevés. Ainsi, aux Etats-Unis, le Nasdaq a chuté de près de 15%. 

Les tensions géopolitiques autour de l’Ukraine ont également été pénalisantes pour les actifs risqués. En provoquant une flambée des prix du gaz et du pétrole, elles ont hypothéqué les perspectives de demande. Les secteurs cycliques ont logiquement pâti le plus de la montée de ce risque.  

Vers une stabilisation des rendements obligataires au deuxième trimestre 2022.

Les marchés financiers pourraient connaître des dynamiques bien différentes au printemps. En effet, après avoir franchi un pic au voisinage de 8% en mars, l’inflation américaine devrait significativement refluer (baissant de plus de 3% au cours du T2 2022), du fait de la réduction des tensions sur les chaînes de production et des effets de base sur les prix des biens durables et des matières premières. Etant donné ces perspectives de désinflation, les statistiques économiques moins porteuses en début d’année (baisse de la confiance des ménages, ventes de détail en berne), les difficultés persistantes de l’administration Biden à exécuter sa politique budgétaire (avec le blocage du plan Build Back Better au Sénat) et l’absence de désancrage des anticipations d’inflation, la Fed pourrait choisir de ne relever ses taux directeurs que de 25 points de base en mars et de ne pas accélérer l’agenda sur la réduction de la taille de son bilan (prévue pour le second semestre). 

Vers une surperformance des profils GARP et des valeurs cycliques d’investissement.

Si tel est le cas, au regard des prévisions actuelles du marché (attentes d’une hausse des taux Fed funds de plus de 150 points de base en 2022), les rendements obligataires devraient se stabiliser. Cela pourrait amener les investisseurs à reconsidérer certaines valeurs de croissance qui viennent d’être délaissées. Le deuxième trimestre de l’année pourrait ainsi être le théâtre d’une nette surperformance des profils d’entreprises de type GARP (Growth At Reasonable Price). 

Un apaisement des tensions autour de l’Ukraine serait également un facteur de rotation important sur les marchés financiers. Elle engendrerait vraisemblablement une diminution des primes de risque sur les prix des matières premières et une amplification de la phase de désinflation mentionnée précédemment. Cela rassurerait les investisseurs quant aux prévisions de croissance pour 2022 et pourrait engendrer un fort rebond des valeurs cycliques, notamment celles profitant d’une reprise de l’investissement des entreprises. En effet, si dans le même temps, le variant Omicron, qui a entrainé des records de contaminations dans les pays développés avec nettement moins de formes graves (grâce notamment à une vaccination de masse), met fin au caractère pandémique de la COVID-19 et éloigne le spectre de nouvelles restrictions sanitaires, la visibilité sur les perspectives de demande va nettement s’améliorer. Or, cette dernière constitue le principal déterminant des décisions d’investissements des entreprises, dépenses qui semblent aujourd’hui indispensables au regard du retard accumulé lors des dernières années et des défis que posent à la fois la digitalisation et la transition énergétique.

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