Vers l’objectif climatique 2050 grâce aux technologies de capture du CO2

Nicolas Thomas, Pictet Alternative Advisors

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Extraire le CO2 de l’atmosphère, le recycler en valorisant son potentiel puis le fixer durablement revêt un caractère essentiel si nous voulons gagner la lutte contre le changement climatique.

La politique climatique connaît un changement de paradigme. Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) des Nations unies a récemment indiqué que la seule réduction des émissions ne suffirait pas à atteindre l’objectif de l’accord de Paris. L’unique moyen pour que le réchauffement climatique demeure inférieur à 1,5°C est d’éliminer activement le CO2 de l’atmosphère, la réduction des émissions étant importante mais pas suffisante.

Jusqu’en 1850 environ, les forêts, les océans et l’atmosphère absorbaient l’intégralité du CO2 émis. Les «émissions nettes» étaient donc nulles. Depuis, les activités humaines émettent des quantités de gaz à effet de serre supérieures à la capacité d’absorption de la Terre.

Deux approches différentes

La capture et le stockage souterrain du dioxyde de carbone ont pour objectif de réduire le CO2 dans l’atmosphère. Deux méthodes existent, la capture atmosphérique directe DAC (Direct Air Capture) avec stockage du CO2 et l’utilisation et/ou stockage du carbone capturé (CCUS - Carbon Capture Usage and/or Storage).

La méthode DAC permet de collecter le carbone directement dans l’atmosphère, même lorsque la concentration est faible (0,04% ou moins). Le CO2 est filtré à l’aide de produits chimiques puis séparé. Le carbone peut ensuite être stocké dans des gisements de gaz ou de pétrole exploités, dans des couches de roche poreuses remplies d’eau salée ou dans le sous-sol marin.

Selon l’approche CCUS, on capture, stocke et réutilise le dioxyde de carbone des gaz d’échappement. Principale différence, les installations CCUS se situent à proximité immédiate d’émetteurs de CO2 comme les centrales à gaz, champs pétrolifères ou incinérateurs de déchets. Deuxième différence, l’exploitation économique du CO2 déjà présent dans l’atmosphère. Il peut p. ex. servir à produire des carburants. Ce processus est neutre en carbone. Des groupes pétroliers  ont annoncé d’importants investissements dans cette technologie.

Traduction des légendes:
- Polymère
- Protéine/produits chimiques/carburants à base d'algues
- Combustibles et produits chimiques
- Utilisation directe

 

Autre possibilité, plus écologique, utiliser le CO2 capturé pour fabriquer de nouveaux produits compétitifs, qui génèrent des revenus financiers rendant le procédé directement rentable.

Il existe aussi des approches naturelles capturant le carbone à l’aide de bois, d’algues, de roches siliceuses, via la reforestation ou une agriculture régénérative. Ces approches sont prometteuses mais pas encore rentables, avec une évolutivité limitée.

L’innovation vient des marchés non cotés

Certaines technologies de capture du CO2 dans l’air sont déjà rentables, d’autres demeurant encore tributaires de subventions. Les investisseurs intéressés par ces solutions innovantes chercheront du côté du private equity. Le graphique montre que les fonds investis dans les start-up CCUS ont dépassé le seuil des 200 millions de dollars en 2021. Climeworks et Twelve, p.ex., ont développé des solutions innovantes dans ce domaine.

Climeworks, entreprise zurichoise, utilise la technologie DAC pour filtrer le CO2 de l’air ambiant. Elle exploite la première grande installation commerciale à Hinwil et va en ouvrir une seconde en Islande. Ces installations aspirent l’air à l’intérieur du collecteur, avec un ventilateur. Puis l’air passe dans un filtre qui retient les particules de CO2. Quand le filtre est plein, le collecteur se ferme et la température monte autour de 100 °C. Le filtre libère ainsi le CO₂, qui peut être stocké. Parmi les entreprises actives dans le secteur, Climeworks est celle qui a reçu à ce jour le plus de fonds des investisseurs (787 millions de dollars).  

Twelve, en Californie, utilise la technologie CCUS. Le CO2 est extrait de l’air puis réutilisé comme matière première pour des produits finis. La société veut convaincre les plus grandes entreprises mondiales de remplacer l’utilisation de produits pétrochimiques par le CO2 pour leur production. Elle a conclu des partenariats importants avec des groupes comme Procter & Gamble, Microsoft et Mercedes Benz et peut déjà produire du carburant pour bateaux (eMarine), des lunettes de soleil, des détergents ou des pièces de rechange pour voitures.

Extraire le CO2 de l’atmosphère, le recycler en valorisant son potentiel puis le fixer durablement revêt un caractère essentiel si nous voulons gagner la lutte contre le changement climatique. Même si cela reste pour l’instant assez exigeant d’un point de vue technologique, plusieurs procédés existent.

A moyen terme, l’approche CCUS paraît plus intéressante financièrement vu la possibilité de générer un revenu supplémentaire avec les produits finis.

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