Le titre a bondi suite à l’annonce de son inclusion dans l’indice phare des valeurs américaines. Est-ce justifié?
Un des principaux développements de la semaine passée est l’annonce par S&P Dow Jones de l’imminente inclusion du titre Tesla dans l’indice S&P 500. Le titre a d’ailleurs connu une nouvelle embellie boursière dépassant pour la première fois le cours des 500 dollars.
L’inclusion du titre dans ce qui est considéré comme la référence en termes de benchmark actions américaines était déjà à l’ordre du jour au mois de septembre. Mais la décision avait été repoussée malgré le fait que le fabricant de véhicules électriques ait rempli les critères de 4 trimestres consécutifs de bénéfices. La forte volatilité du titre était alors la raison invoquée pour la non-inclusion du titre. Mais suite à un 5e trimestre consécutif de profits, il a finalement été décidé que Tesla fera bel et bien parti du S&P 500, ce qui obligera de nombreux instruments réplicants les indices (par exemple les ETFs) à acheter le titre. Gageons que de nombreux fonds gérés de manière active feront de même.
Dès son entrée, Tesla sera l’une des plus grosses capitalisations boursières du S&P 500 et fera probablement partie du «Top 10» avec une pondération proche de 1%. C'est d’ailleurs la première fois qu'une entreprise de cette taille fait son entrée dans l'indice, incitant S&P Dow Jones à planifier une inclusion en deux étapes : une première tranche au 14 décembre et une deuxième au 21 décembre. On ne sait pas encore quel titre sera remplacé par Tesla.
du titre mais que cet effet s’estompe après une année.
Comme indiqué ci-avant, l’annonce a été accueillie avec enthousiasme par les investisseurs. En effet, le consensus pense que cette nouvelle aura un effet positif sur le cours de titre dans les mois qui viennent. La perspective de l’entrée de Tesla dans les principaux indices est d’ailleurs une des explications de l’extraordinaire performance boursière de Tesla au cours des 12 derniers mois: plus de 600% d’appréciation du prix alors que les ventes n’ont progressé «que» de 15%.
Rappelons que le monde académique (Fama) avait identifié dès 1970 le phénomène de hausse d’un titre suite à son entrée dans un indice comme l’une des rares «anomalies» de marché, contraire à l’hypothèse d’efficience qui stipule que l’ensemble des informations publiques est déjà inclus dans le prix d’un titre. Bennet, Stulz et Wang ont publié une étude approfondie sur ce sujet en juillet 2020 dans laquelle ils présentent l’analyse de performance des titres qui ont été intégrés à l’indice S&P 500 entre 1997 et 2017. Ils concluent que l’inclusion dans l’indice a un effet court terme positif sur la performance du titre mais que cet effet s’estompe après une année. Ils ont même constaté un effet long-terme qui est négatif en termes de performance relative. Parmi les facteurs qui expliquent pourquoi l’inclusion dans un indice augmente la probabilité de sous-performance sur le long-terme, citons entre autres l’effet taille (il devient plus difficile pour les gérants de créer de fortes surpondérations), des aspects de gouvernance (les gérants passifs suivent en général le vote des dirigeants lors des assemblées) et une érosion naturelle du rendement sur les actifs probablement due à un effet taille.
Volkswagen, Ford, Honda, Nissan/Renault et Hyundai cumulées.
Autre élément important mis en avant dans cette étude : alors que les gérants de portefeuilles pouvaient «exploiter» cette anomalie de marché avec un certain succès dans le passé, il semblerait que cette inefficience soit en train de disparaitre. En effet, les investisseurs – mieux informés – ont tendance à fortement anticiper les effets positifs liés à l’inclusion. Autrement dit, l’effet indice est plus ou moins intégré dans le cours boursier lorsque le titre est effectivement inclus dans le benchmark en question.
C’est potentiellement le cas du titre Tesla. En effet, une cohorte d’investisseurs a accumulé des titres ces derniers mois afin de pouvoir un jour revendre leurs positions à un prix nettement plus hauts aux fonds qui répliquent les indices (et donc dans l’obligation d’acheter le titre lorsqu’il en fera partie). Sans se prononcer sur l’avenir à moyen et long-terme du titre ou encore sur la pérennité de son modèle d’affaire, relevons toutefois que l’effet inclusion pourrait être déjà reflété dans le prix. Rappelons par exemple qu’avec une capitalisation boursière proche de 400 milliards de dollars, le titre Tesla se traite à plus de 18 fois les ventes et 950 fois les bénéfices. Avec 3% de parts du marché des voitures pour les particuliers (18% dans l’électrique), la capitalisation boursière de Tesla est supérieure à celles de Toyota, Volkswagen, Ford, Honda, Nissan/Renault et Hyundai cumulées, alors même que ces 6 groupes détiennent environ 40% des parts du marché automobile…
Autant d’éléments à prendre en compte pour les investisseurs qui souhaitent «jouer» l’effet S&P 500 sur le titre Tesla (TSLA).