Se concentrer sur les leaders de la transition climatique

Yves Hulmann

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Arnaud Bisschop, associé-gérant chez Thematics Asset Management, sélectionne des sociétés présentant des profils variés, indépendamment de leurs domaines de spécialisation.

Un nouveau fonds dédié à la thématique du climat a été lancé fin novembre par Thematics Asset Management, qui vient s’ajouter à la gamme d’investissements thématiques de la filiale de Natixis Investment Managers. Actuellement, Thematics Asset Management (Thematics AM), dont les encours sous gestion s’élevaient à 2,8 milliards d’euros au 30 septembre 2022, compte déjà cinq fonds spécifiques dédiés à des thèmes relativement différents – à savoir la sécurité, l’intelligence artificielle et la robotique, l’économie des abonnements, le bien-être ainsi que l’eau. S’y ajoute encore un fonds de type «Meta» qui combine les différentes stratégies de l’expertise Thematics en un seul véhicule et qui équipondère ces cinq thèmes, explique Arnaud Bisschop, associé-fondateur et gérant chez Thematics Asset Management.

Un screening quantitatif et qualitatif

Pourquoi lancer un fonds sur le thème du climat, alors que l’offre de solutions d’investissement en rapport avec l’environnement est déjà très importante actuellement? «S’agissant du nouveau fonds consacré à la thématique du climat que nous avons lancé fin novembre, il s’agit d’une sélection d’entreprises exposées aux cinq thèmes ci-dessus, et qui sont déjà positionnées de façon à ce qu’elles soient alignées sur l’objectif de Net Zéro défini sur la base de l’Accord de Paris. Nous nous appuyons donc sur les ressources existantes en matière de recherche pour nos différents fonds afin d’identifier les sociétés qui ont déjà anticipé une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.» Pratiquement, comment le processus de sélection est-il organisé? «Nous combinons à la fois un screening quantitatif et un screening qualitatif. Sur l’aspect qualitatif, nous accordons notamment de l’importance au fait que la rémunération du management des entreprises sélectionnées soit ajustée en fonction de la réalisation ou non d’objectifs clairs sur le plan climatique», poursuit-il.

Ne pas être aligné sur le Net Zéro aujourd’hui, cela signifie qu’il faudra tôt ou tard rattraper son retard

La sélection des sociétés s’effectue en s’appuyant sur les ressources existantes.

Parmi les critères ESG, il peut arriver que l’évaluation d’une société varie considérablement selon que l’on tient compte des critère environnementaux, sociaux ou de gouvernance.

«Nous ne partons pas complètement de zéro. Nous disposons en effet d’un univers de sociétés que nous avons déjà identifiées comme bénéficiant de la croissance séculaire des différents thèmes dans lesquelles elles opèrent. L’aspect clé est que les sociétés sélectionnées pour le fonds Climat doivent être leader en termes de transition climatique, et cela quels que soit leurs domaines de spécialisation ou leur secteur d’activité. Nous préférons en effet investir dans les sociétés qui sont alignées avec les exigences du Net Zéro, car cela va leur donner un avantage compétitif vis-à-vis de leurs clients, qui vont progressivement se focaliser sur leur «Scope 3» d’émissions de gaz à effet de serre, c’est-à-dire qu’ils vont notamment chercher à réduire les émissions de leurs sous-traitants. Ne pas être aligné aujourd’hui, cela veut dire devoir tôt ou tard rattraper le retard sur ce plan, et supporter les coûts afférents.

Un univers d’investissement très concentré

Dans un environnement de marché très volatil, l’évolution de la valorisation des sociétés dépend non seulement de facteurs endogènes – qui dépendent de l’entreprise elle-même –, mais aussi de multiples facteurs exogènes, à l’exemple des taux d’intérêt. Comment est-il possible pour Thematics AM d’intégrer ces aspects externes dans le processus d’analyse? «Lorsque nous définissons un thème, nous cherchons à identifier des leviers de croissance séculaire, qui vont lui permettre de traverser les cycles macro-économiques. Nous attachons une grande importance à la diversification au sein de l’univers d’investissement, notamment au regard de ces facteurs macro-économiques. Toutefois, nous ne voulons pas d’univers trop larges – l’objectif est d’avoir des univers de 200 à 300 sociétés, pas davantage. Une fois ces univers définis, nous y restons fidèles; ils peuvent bien sûr évoluer progressivement avec le temps, mais pas en permanence avec le contexte macro!», met-il en perspective. «Nous avons aujourd’hui un portefeuille très concentré de 49 titres. La taille de la position dépend, d’une part, du degré de conviction des gérants et, d’autre part, du niveau d’engagement climatique des entreprises concernées. Notre objectif est de garder un portefeuille concentré», souligne-t-il.

Au sein des portefeuilles, pour les titres dans lesquels la société investit, Thematics AM tient certes compte de facteurs exogènes tels que l’impact de la hausse des taux d’intérêt, le ralentissement conjoncturel en Chine ou encore l’évolution des prix de l’immobilier, par exemple quand il s’agit d’augmenter ou de réduire ses positions dans un titre donné. En revanche, Thematics AM n’essaie pas d’établir des scénarios conjoncturels ou macroéconomiques, nuance Arnaud Bisschop.

L’engagement autour du climat est toujours le critère de sélection déterminant

Parmi les critères ESG, il peut arriver que l’évaluation d’une société varie considérablement selon que l’on tient compte des critère environnementaux, sociaux ou de gouvernance. Comment arbitrer dans ce cas? «Il est nécessaire de mettre en balance ces différents critères. Et ce n’est pas toujours simple. Prenons l’exemple de Tesla, qui n’est pas dans notre univers d’investissement, mais bien connu de tous. On peut considérer qu’avec une flotte 100% électrique, le constructeur automobile américain contribue à la réalisation des objectifs de Net Zéro. En revanche, la société dirigée par Elon Musk peut apparaître discutable du point de vue des critères de gouvernance», cite-t-il à titre d’exemple. Malgré tout, l’engagement d’une société autour du climat sera le critère le plus déterminant lors du choix d’inclure ou non une société dans le portefeuille «Climate Selection» – à condition que celle-ci passe les critères d’exclusion de Thematics AM (non-exposition à certains produits tels que les armes non conventionnelles, le tabac ou la production électrique à base de combustibles fossiles; niveaux de controverses limités).

Au final, de quelle manière la solution de placement axée sur le climat qui est proposée par Thematics AM se différencie-t-elle d’autres fonds environnementaux ou ESG? «Une différence importante est que nous ne mettons pas nécessairement l’accent sur des entreprises qui apportent des solutions spécifiques sur le plan environnemental, comme par exemple des fabricants de panneaux solaires. Ce fonds n’est pas un fonds Climate Solutions. Notre fonds inclut des entreprises de tous les secteurs économiques mais qui démontrent un leadership sur leur stratégie climat. C’est donc un fonds action diversifié de conviction, qui a pour ambition de faire mieux que son indice de référence sur le long terme», résume-t-il.

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