Relance et rotation

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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L'adoption d'un nouveau plan de relance budgétaire par le Congrès n'est plus très loin.

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Il y a dix jours, la hausse des rendements du Trésor américain a monopolisé l'attention des investisseurs. Du coup, le rebond des actions mondiales s'est interrompu et la rotation des valeurs de croissance vers les valeurs décotées et les valeurs cycliques s'est poursuivie. En parallèle, le rendement nominal des bons du Trésor américain à dix ans a achevé la semaine en hausse de 11 points de base (pb), à 1,46%. A un moment donné, il a même atteint 1,61%. L'indice S&P 500 a cédé 2,4% et le Nasdaq 4,9%.

Dernièrement, la Recherche d’UBS affirmait que des fluctuations notables de variables clés telles que la pandémie du Covid-19, la relance budgétaire et l'inflation étaient susceptibles d'alimenter des accès de volatilité sur les marchés. Les récents événements montrent que cette dynamique continue de jouer.

Relance économique

L'adoption d'un nouveau plan de relance budgétaire par le Congrès n'est plus très loin. La Chambre des représentants a adopté le projet de loi présenté par l'administration Biden, qui prévoit une enveloppe de 1900 milliards de dollars. Les négociations au Sénat pourraient en réduire le montant mais on peut tabler sur une fourchette de 1500 à 1900 milliards de dollars.

On observe des signes d'embellie sur le marché de l'emploi, notamment les inscriptions hebdomadaires au chômage qui sont ressorties, il y a dix jours, à leur plus bas niveau depuis trois mois. La diminution du nombre d'hospitalisations pour cause de Covid-19 et les campagnes de vaccination suscitent l'optimisme quant à une normalisation de l'activité économique. Ces perspectives de croissance plus clémentes, conjuguées aux signes de regain d'inflation au printemps, ont fait grimper les rendements nominaux et réels aux Etats-Unis.

La hausse des rendements ne devrait pas faire
dérailler le rebond des actions.

Toutefois, la hausse des rendements ne devrait pas faire dérailler le rebond des actions car elle reflète le pari en cours sur la reflation. Point de situation.

  1. Hausse des rendements sur tous les fronts
    Historiquement, la hausse des rendements nominaux va généralement de pair avec la hausse des cours des actions. Sur les 25 dernières années, on recense dix périodes pendant lesquelles le rendement des bons du Trésor américain à dix ans a augmenté de plus de 100 points de base (pb) et, à chaque fois, les actions mondiales sont restées stables ou ont généré un rendement positif.
     
  2. Amélioration des perspectives de croissance
    La hausse des rendements réels est le fruit de l'amélioration des perspectives de croissance. En effet, les conditions actuelles rappellent celles observées en 2016, à savoir une politique accommodante qui laisse entrevoir une croissance plus forte et non la perspective d'un resserrement monétaire (qui occasionna le «taper tantrum» de 2013).
     
  3. Pas de resserrement de la politique monétaire
    La Réserve fédérale (Fed) a clairement indiqué qu'elle ne resserrerait pas de sitôt sa politique monétaire. Il y a dix jours, le président de la Fed, Jerome Powell, a répété que les taux d'intérêt resteraient bas. Il a ajouté que la Fed continuerait d'acheter des actifs à hauteur de 120 milliards de dollars par mois jusqu'à ce qu'elle enregistre des progrès substantiels vers l'atteinte de ses objectifs en matière d'emploi et d'inflation. Or elle en est encore loin.
     
  4. Pas d’excès dans la valorisation des actions
    La valorisation des actions n'est pas excessive au regard des taux d'intérêt. Avec un rendement de l'ordre de 1,45% pour les obligations à dix ans, la prime de risque des actions implicite reste supérieure à 300 pb, contre une fourchette de 285 à 470 pb depuis 2015.
Pic de volatilité

Par conséquent, la Recherche d’UBS pense que c'est la rapidité de la récente hausse des rendements, et non le niveau de ces derniers, qui a alimenté la volatilité. Depuis la crise financière mondiale, lorsque le rendement réel des bons du Trésor américain à dix ans augmente de plus de 40 pb en l'espace d'un mois, les actions enregistrent une performance moins bonne, voire négative. Or il est en hausse de 32 pb depuis le récent creux du 10 février. Il faut donc s'attendre à un regain de volatilité le temps que les actions s'ajustent au nouveau contexte.

La baisse des cours des actions était davantage le fruit d'un repositionnement
au détriment des titres qui surfent sur une croissance séculaire.

Il convient également de mettre en perspective le récent repli des actions. Aux Etats-Unis comme dans le reste du monde, les actions ont atteint des sommets historiques début février et, malgré la correction intervenue en fin de mois, les actions ont achevé ce dernier dans le vert. Les actions mondiales affichent une performance de 1,9% depuis le 1er janvier.

Dans la mesure où l’on considère que le récent revers subi par les actions est imputable à un pic de volatilité et non à un changement fondamental des perspectives de marché, la Recherche d’UBS recommande les stratégies suivantes.

  1. Parier sur les valeurs cycliques dans l'optique de la reprise
    Il y a dix jours, la baisse des cours des actions, dont la rapidité a perturbé le marché dans son ensemble, était davantage le fruit d'un repositionnement au détriment des titres qui surfent sur une croissance séculaire. La Recherche d’UBS estime que cette rotation est loin d'être achevée.
    Il est recommandé aux investisseurs de privilégier les titres susceptibles de profiter de l'accélération de la croissance économique et d'un redressement de la courbe des rendements obligataires, notamment les valeurs financières et industrielles, ainsi que celles issues du secteur de l'énergie.
     
  2. Tirer parti de la volatilité
    Les replis des marchés donnent aux investisseurs surexposés aux liquidités la possibilité, dans le cadre d'un plan financier rigoureux, de faire fructifier leur capital sur les marchés. Cela passe notamment par des achats échelonnés, des investissements structurés et, pour les investisseurs qui le peuvent, des stratégies sur options. Les ventes massives s'accompagnent souvent d'un regain de volatilité qui permettent de s'exposer aux marchés de manière plus avantageuse au moyen d'options.

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