Peu de répit pour les investisseurs avec des participants au marché qui réagissent à toutes les données.
L’une des tendances fiables est toutefois la hausse des rendements avec la vente des actifs risqués. Les rendements effectifs sur les obligations CLO notées BB et B, par exemple, se situent aujourd’hui à 12-13% et 16-18% (prix au comptant de 70-80 et 65-75). A ce niveau, le marché intègre dans les prix une sévère récession qui ne correspond pourtant pas aux prévisions des banques d’investissement et des agences de notation.
Jetons un œil à l’évolution possible de la performance du crédit dans un contexte de récession probable. Moody’s a récemment publié son étude sur les défauts de paiement qui présente les perspectives de l’agence de notation concernant les entreprises internationales de la catégorie spéculative. Si ces perspectives ne sont pas spécifiques aux prêts à levier, ces derniers (qui comprennent des pools de garanties des CLO) tendent à suivre la même tendance. Dans son scénario de base, Moody’s n’anticipe pas de récession. Selon l’agence, une combinaison d’inflation élevée, de ralentissement de la croissance et de resserrement quantitatif par les banques centrales aura un impact sur les marges, mais la liquidité des entreprises restera solide grâce aux conditions de financement très favorables dont elles ont bénéficié ces dernières années. Moody’s s’attend à ce que le taux de défaut à 12 mois des titres européens de qualité spéculative augmente à 2,8% d’ici fin 2022, à partir d’un niveau de 0,6% en juin, et grimpe à 2,9% d’ici mai 2023 (selon ses prévisions, le taux de défaut mondial devrait être de 3,3% à cette date).
Les deux scénarios englobent une récession principalement due aux facteurs suivants: une escalade du conflit russo-ukrainien, la persistance d’une inflation élevée conduisant à un durcissement des conditions de liquidité, une interruption potentielle de l’approvisionnement mondial de pétrole et une hausse du nombre hospitalisations dues au COVID-19 avec des retombées sur des secteurs spécifiques. Le premier scénario («prévisions modérément pessimistes»), anticipe un pic des taux de défaut à 5,9% en Europe, tandis que le deuxième («prévisions fortement pessimistes») table sur des taux de défaut à 9% en 2023 (contre 10,5% au niveau mondial, et toujours bien inférieurs au pic de 13,5% observé durant la crise financière mondiale). Dans le domaine de l’industrie européenne, Moody’s s’attend à ce que les secteurs les plus impactés par l’environnement actuel soient les containers, les emballages et le verre, l’hôtellerie ainsi que les loisirs et technologies.
Les prévisions modérément pessimistes de l’agence nous semblent les plus probables. Une partie des hypothèses de ce scénario modérément pessimiste s’est déjà réalisée, et l’étude repose probablement sur des données du mois de mai. Les banques d’investissement ne prévoient pas des taux de défaut aussi élevés, bien que nous soyons du côté de la prudence en tant qu’investisseurs obligataires. Nous avons par conséquent effectué un test de stress sur nos positions CLO notées B , en partant de l’hypothèse d’un pic du taux de défaut à 6,5% pour deux ans et d’une hausse dans les CCC également. Nous avons supposé que les gérants de CLO étaient capables de sélectionner des prêts à des prix réduits durant cette période, et avons exclu les titres qui sont déjà en dehors de leurs périodes de réinvestissement. Nous avons également laissé les titres courir jusqu’à l’échéance en partant du principe qu’ils ne sont jamais refinancés. Les résultats de cette analyse ne nous surprennent pas: aucun titre ne subit une perte du principal à maturité ou n’en est proche. Au vu des rendements actuels, il semble que le marché des CLO intègre déjà les «prévisions modérément pessimistes» de Moody’s en tant que scénario de base, notamment pour les tranches notées BB et B.
Dans l’environnement actuel, nous estimons donc qu’il n’y a pas besoin de rechercher le risque en descendant dans la structure du capital , et privilégions en ce moment les obligations BBB et BB; toutefois, pour les investisseurs moins sensibles à la volatilité au jour le jour et disposant d’un horizon de placement à long terme, les rendements potentiels ajustés du risque offerts par les obligations CLO sont très attrayants. Selon nous, ce sont les investisseurs en tranches equity des CLO qui devraient s’inquiéter que les taux de défaut ne dépassent les scénarios de Moody’s