A nouvel environnement, nouvelles thématiques d’investissement

Frédéric Leroux, Carmignac

2 minutes de lecture

Le financement facile des déficits et de la dette américaine s’achève sous nos yeux et avec lui la Pax Americana qui régnait sur le monde depuis 1945.

Le nouvel environnement économique qui se met en place sur fond d’inflation pourrait créer des opportunités d’investissement dans l’industrie, les actions japonaises ou encore la dette émergente.

Une année se termine et une autre commence, le moment est propice pour partager nos réflexions d’investisseur sur les perspectives 2023. Comme évoqué à plusieurs reprises ces derniers trimestres, le retour du cycle économique oblige les investisseurs à s’adapter à la nouvelle donne économique mondiale qui sera durablement plus inflationniste que précédemment.

En effet, de nombreux facteurs rendent vraisemblable une inflation mondiale résiliente et des taux d’intérêt tendanciellement plus élevés: démographie mondiale, probable recul de la mondialisation au profit de relocalisations, choix en faveur d’une transition énergétique rapide ou encore fin de la Pax Americana. Nous sommes donc amenés à orienter nos investissements vers des thématiques capables de surperformer dans un environnement inflationniste tout en tenant compte de la cyclicité économique de court terme, qui revient en force et exige de l’investisseur une gestion proactive, capable de s’accommoder d’épisodes désinflationnistes, par exemple.

Notre gestion obligataire, après avoir été négativement impactée par la guerre en Ukraine, s’est attelée au redressement des performances avec la mise en œuvre d’une gestion résolument active, intégrant la perspective de rendements obligataires plus élevés. Certains investisseurs peuvent aussi être attirés par la dette privée qui fait l’objet d’une extrême défiance. Ses rendements intègrent un risque de défaut trop élevé eu égard aux fondamentaux économiques tels que nous les percevons.

L’équilibre économique que nous entrevoyons à moyen terme sous-tend lors du prochain rebond conjoncturel un dollar plus faible, ce qui pourrait aussi renforcer l’attrait de la dette émergente, où les banques centrales seront plus libres de mener les politiques monétaires qui conviennent. Libérées de la contrainte du dollar fort elles seront moins limitées dans leur volonté d’assouplissement monétaire.

Les transformations liées à la volonté de développer plus rapidement les nouvelles énergies créent des opportunités de long terme dans le secteur industriel.

Sur le front des actions, la perspective du retour par vagues de l’inflation peut inciter à explorer des sujets d’investissements qui étaient passés à l’arrière-plan ces dernières années.

Par exemple, reconnaissant la contribution de la transition énergétique aux pressions inflationnistes actuelles, nous considérons qu’elle ne peut se réaliser efficacement sans la participation des grands acteurs de la production d’énergies fossiles, très impliqués dans cette transition et comptant parmi les plus grands investisseurs en énergies renouvelables. Le pragmatisme peut donc encourager à travailler en bonne intelligence avec ces «transitioners» dès l’instant où ceux-ci sont résolument engagés dans une démarche en faveur des énergies nouvelles.

Suivant la même logique contrariante, le marché japonais des actions pourrait susciter l’intérêt. Délaissé par les investisseurs étrangers depuis plusieurs années, incapable de réaliser le potentiel boursier des actions nippones sous-valorisées suivant tous les standards de mesure de la valeur, ce marché n’attend qu’un déclencheur pour réaliser ce potentiel. Une remontée des taux japonais imposée par une inflation résiliente pourrait être ce déclencheur paradoxal en contribuant durablement à un renforcement du yen, à même d’attirer des investisseurs découragés par l’affaiblissement de la devise nippone depuis 12 ans. Dans cette hypothèse, le secteur bancaire serait à privilégier à-côté de secteurs profitant d’un regain de dynamisme de l’économie domestique.

Par ailleurs, la volonté de relocalisation de productions stratégiques après la découverte de nos dépendances à l’égard de pays étrangers éloignés depuis le Covid et les transformations liées à la volonté de développer plus rapidement les nouvelles énergies créent des opportunités de long terme dans le secteur industriel. L’Europe devrait en offrir de nombreuses dans ce domaine.

Mêler le renouveau de pans entiers de l’industrie et les concepts de market timing les plus fins pour tirer le meilleur parti de la cyclicité économique retrouvée nous semble une approche efficace pour nous accommoder au mieux du nouvel environnement économique international.

Le retour du cycle économique dans une ambiance plus inflationniste rebat les cartes sur les marchés financiers. Les sociétés et secteurs sous-valorisés du fait d’une longue période de croissance molle et peu volatile ont évolué à l’ombre des belles valeurs de croissance, jusqu’à se faire oublier. Elles seront, après le ralentissement désinflationniste qui s’installe, les gagnantes de la prochaine phase ascendante du cycle économique qui créera simultanément de belles opportunités pour les gestions capables de s’exposer négativement à la hausse des taux d’intérêt et positivement aux pays émergents.

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