Naviguer dans un environnement incertain

Salima Barragan

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Pour SYZ, la grande question pour 2019 est de savoir si l’économie globale se dirige vers une année plateau ou vers un scénario plus négatif.

Excepté l’économie américaine, le monde se trouve dans une dynamique cyclique de ralentissement de l’activité économique. Pour Fabrizio Quirighetti, CIO, Responsable de la gestion Multi-Asset et Adrien Pichoud, Chef Economiste, la grande question pour 2019 sera de savoir si l’économie globale se dirige vers une année plateau ou si un scénario plus négatif se profile. Une chose est sûre; les incertitudes persisteront encore plusieurs mois. En attendant une meilleure visibilité, SYZ Asset Management positionne les portefeuilles de façon plus défensive. Elle réduit son biais actions à neutre et privilégie une association de liquidités en dollar US et d’or.

Vers une perte de momentum global

Bien que le niveau de croissance absolu soit positif, les derniers indicateurs industriels et du commerce mondial dépeignent une dynamique en ralentissement. Le World PMI Manufacturing, toujours en territoire d’expansion, fléchit depuis les hauts du début de l’année. Est-ce que ces indicateurs se stabiliseront à un niveau inférieur à 2018 ou se dégraderont quitte à entraîner une récession? «Nous sommes constructifs, mais les risques de basculer sur un scénario plus négatif ont augmenté», estime Adrien Pichoud. Dans son scénario central, dont la probabilité s’élève à 60%, la stabilisation suit son cours alors que la possibilité d’une accentuation de la perte de momentum est estimée à 35%.

Les incertitudes sur la dynamique européenne persisteront,
suite à son net ralentissement en 2018.

Les Etats-Unis, dont le rythme de croissance est le plus élevé du cycle, ont connu un pic dû en partie aux réductions d’impôts. C’est le seul marché où les statistiques ont été en dessus des attentes. Ainsi, la normalisation de la Fed en cours, parfaitement justifiée en regard des indicateurs macro-économiques, devrait se poursuivre si la dynamique se maintient en 2019. Or, un durcissement des conditions financières pourrait impacter l’activité domestique. «Les conditions de crédit se resserrent, mais aucun élément semble inquiétant à court terme», souligne Adrien Pichoud qui estime tout de même que la vitesse de croisière ne pourra pas se maintenir à un tel rythme, et qu’elle devrait soit se stabiliser ou alors ralentir.

En Europe, le tableau semble moins optimiste. Les incertitudes sur la dynamique européenne persisteront, suite à son net ralentissement en 2018. Les éléments de réponses sur le front politique quant à un éventuel hard Brexit (qui impacterait les entreprises allemandes exportatrices), la problématique fiscale italienne (qui aurait une plus grande répercussion sur la zone euro qu’une petite économie comme la Grèce), la fragilité de la coalition en Allemagne ou encore les élections européennes prévue en mai, ne devraient pas être apportés dans immédiat. C’est sans surprise que les indicateurs de confiance sont orientés à la baisse. Vont-ils se transmettre à l’activité économique? «La demande domestique devrait être soutenue par le faible coût du financement, ce qui devrait stabiliser la croissance», estime Adrian Pichoud. Au centre, la Suisse se retrouve prise en otage avec un franc suisse soutenu par l’excédent de sa balance des paiements et des perspectives de l’euro.    

Enfin, en Chine, le commerce s’est bien tenu malgré l’épée Damoclès de la guerre commerciale. Son PMI Manufacturing, flirtant avec un niveau de contraction, n’a ainsi pas été provoqué par les échanges commerciaux mais par le resserrement des conditions financières et le désendettement forcé des entreprises chinoises. Les stimulus fiscal et monétaire devraient combattre le ralentissement, mais là encore, les incertitudes vont persister quelques temps.

Le retour des liquidités en dollar US

SYZ Asset Management réduit son biais actions à neutre. «Pour 2019, nous escomptons une croissance des bénéfices plus faible. Il est donc plus difficile d’établir le juste prix des actions», explique Fabrizio Quirighetti. Aussi, selon le spécialiste, les avantages traditionnels de la diversification devraient s’atténuer à mesure que les taux réels augmentent: «La dé-corrélation, qui évolue près de zéro, ne joue plus son rôle».

Dans l’éventualité où le dollar se détériorait à cause du
déficit jumeaux américain, l’or est sa meilleure couverture naturelle.

L’environnement devient nettement moins favorable pour le crédit corporate qui cache davantage de risques. «Je préfère le risque action que crédit. Nous voyons certains segments du marché crédit devenir moins liquides», estime Fabrizio Quirighetti qui évite les obligations à long terme dont les valorisation ne sont pas attrayantes et privilégie les émetteurs de bonne qualité. «Nous avons commencé l’année avec des hautes valorisations notamment dans la dette émergente et la dette subordonnée financière alors que la liquidité libellée en dollar US est devenue moins chère», explique-t-il.

Avec un rendement à 3% pour des papiers de qualité AAA à 3 ans, le profil risque/rendement a suscité un appétit pour cette classe d’actif. «Aujourd’hui, nous avons une alternative réelle car aux Etats-Unis la rémunération des liquidités rivalise avec l’inflation, le rendement du dividende, les spreads de crédit Investment Grade et sans risque de duration ou de crédit. Aussi, selon des études quantitatives, plus nous nous rapprochons de la récession, plus la volatilité s’intensifie», analyse Fabrizio Quirighetti. Dans l’éventualité où le dollar se détériorait à cause du déficit jumeaux américain, l’or, dont le risque de baisse devrait être contenu avec l’élévation des taux réels, est sa meilleure couverture naturelle. Ainsi, selon le CIO, détenir de la liquidité aujourd’hui pour racheter des actifs risqués demain à meilleur prix est propice pour naviguer dans un environnement incertain.

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