Marchés émergents: l’opportunité

David Rees, J. Safra Sarasin Asset Management

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Les marchés émergents intègrent peut-être déjà en partie un nouveau ralentissement de la Chine.

© Keystone

Le «Powell Put» offre des opportunités sur les marchés obligataires des pays émergents. À court terme, le principal risque pour la classe d’actifs viendra probablement d’un nouveau ralentissement de l’activité en Chine. Mais au moins une partie des mauvaises nouvelles est peut-être déjà intégrée dans les cours, tandis que de plus en plus de signes indiquent que l’économie chinoise se stabilisera à la mi-2019, ouvrant la voie à une reprise progressive.

J. Powell insuffle une dynamique aux obligations des marchés émergents (ME)

L’allusion claire du président de la Fed, J. Powell, selon laquelle la banque centrale américaine marquera une pause dans son cycle de resserrement des taux au premier semestre offre une opportunité sur les marchés obligataires des pays émergents. Grâce au «Powell Put», les investisseurs se sont massivement repositionnés sur la classe d’actifs au début de l’année, alimentant de solides performances qui ont quasiment effacé l’ensemble des pertes accumulées en 2018.

Nous doutons que les spreads de crédit des obligations en devises fortes se resserrent considérablement. Après tout, ils n’ont pas atteint des niveaux particulièrement séduisants lors de la correction de l'année dernière, surtout sur le segment des obligations d’entreprises. Toutefois, même si les spreads devaient, ne serait-ce que se stabiliser, le niveau relativement élevé du portage, notamment sur le segment des obligations d’État à haut rendement, suffirait à générer de solides performances.

Une très forte compression des spreads est peu probable

Sources: Bloomberg, J. Safra Sarasin, 26.02.2019

Les obligations d’État en monnaie locale des pays émergents devraient également produire de bons résultats dans cet environnement. Depuis que de nombreuses banques centrales ont durci leur politique monétaire l’an dernier pour contrer les chocs extérieurs, plusieurs grands pays émergents comme l’Indonésie, le Mexique et la Russie affichent des taux d’intérêt réels élevés. Outre un portage attractif, ces pays pourraient bénéficier d’une appréciation des taux de change, dans la mesure où les devises émergentes regagneront encore une partie du terrain perdu si le dollar continue de se déprécier.

Les ME affichent des taux réels élevés en monnaie locale

Sources: Datastream, J. Safra Sarasin, 26.02.2019

Le fait que le revirement rapide de la Fed a ouvert une fenêtre d’opportunité pour les obligations des ME signifie que ces mêmes responsables politiques ont la possibilité de la refermer. Nous pensons toujours que l’œuvre de la Fed n’est pas achevée et que les taux américains seront encore relevés de 50 points de base au second semestre. Les obligations des ME pourraient ainsi subir à nouveau des pressions si les marchés commencent à anticiper un nouveau durcissement de la Fed. Cependant, une telle évolution pourrait mettre du temps à se concrétiser et à court terme, nous sommes plus optimistes sur la classe d'actifs.

Les cours intègrent-ils des mauvaises nouvelles de la Chine?

Parallèlement, la principale menace qui pèse sur les obligations des ME vient probablement de la Chine. À 6,6% en 2018, le rythme d’expansion annuel du PIB chinois n’a jamais été aussi lent depuis 1990. Nous prévoyons que l’économie continuera de ralentir au premier semestre de 2019. Bien que les tensions commerciales avec les États-Unis soient souvent citées pour expliquer la piètre performance de l’économie chinoise, selon nous, celle-ci est principalement imputable à l’effet retardé du resserrement des conditions de crédit sur la demande intérieure qui continuera de peser sur l’activité à court terme.

À terme, l’assouplissement de la politique monétaire devrait entraîner un redressement de l’économie chinoise

Sources: Datastream, J. Safra Sarasin, 26.02.2019

Un nouveau ralentissement de la croissance devrait se traduire par une politique anticyclique de plus en plus énergique de la part des autorités chinoises. Il est probable que cela prendra la forme de nouvelles réductions des réserves obligatoires pour les banques commerciales, permettant une baisse des taux d'intérêt. Une augmentation des dépenses d'infrastructure est également possible. Certains signes indiquent que les mesures déjà en place – en particulier l’assouplissement des conditions monétaires – suffiront à stabiliser l’activité économique en milieu d’année, ce qui ouvrirait la voie à une reprise au second semestre 2019, voire jusqu’en 2020.

Les craintes d’atterrissage brutal en Chine risquent néanmoins de persister un certain temps. Mais la bonne nouvelle est que les ME intègrent peut-être déjà en partie un nouveau ralentissement de la Chine. Nous estimons par conséquent que les investisseurs disposent d’une certaine marge de manœuvre, leur permettant de bénéficier d’un portage attractif à disposition sur les obligations des ME.

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