Marché haussier, année 2

Emmanuel Ferry, Evooq

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On peut s’attendre à plus de modération, plus de volatilité, des ratios de Sharpe dégradés et une plus grande dispersion.

Le marché Actions entre dans sa deuxième année de progression. Le S&P500 avait atteint son plus bas niveau le 23 mars 2020 lors de l’amplification de la crise de COVID-19, qui avait causé une dépréciation brutale de 34% en seulement 22 jours. Par la suite, le marché boursier américain a effacé les pertes dues à la pandémie en août 2020 et s’est apprécié au total de 75% en un an. C’est la plus forte progression sur 12 mois depuis 1936, dépassant celle observée en 2010 après la crise financière. Le retournement avait eu lieu seulement deux jours après la réunion de la Fed qui avait annoncé un programme d’achat d’obligations d’entreprises pour la première fois de l’histoire. 

Ce rebond post-pandémie constitue le meilleur départ jamais enregistré pour un nouveau cycle haussier sur les Actions. Il n'y a eu que cinq autres phases baissières de 30% ou plus depuis la Seconde Guerre mondiale. Sur la base d'observations historiques, le marché haussier qui en a résulté a été en mesure de délivrer à chaque fois des gains à nouveau lors de sa deuxième année, même si ces gains ont été plus modérés et plus volatil.

Nous restons globalement pro-risque sur un horizon de 6 mois, avec une allocation surpondérée sur les actions et les matières premières, une allocation neutre sur le crédit et une sous-pondération sur les obligations. Nous continuons de préférer les thèmes procycliques au sein de chaque classe d’actifs. Les actifs procycliques ne reflètent pas encore pleinement la forte reprise économique et la reflation que nous attendons. En effet, les autorités monétaires et budgétaires conservent leur biais très accommodant, dans un contexte économique d’accélération avec une réouverture plus large des économies et un rattrapage des services.

La révision en hausse des attentes devrait se poursuivre,
conduisant à une configuration de marché plus mature.

Le contexte macro-financier semble rester cohérent avec une approche constructive en matière de risque. La révision en hausse des attentes devrait se poursuivre, conduisant à une configuration de marché plus mature. La combinaison entre la croissance et l’orientation de la politique économique est toujours favorable. Étant donné que la hausse des rendements obligataires à long terme reflète uniquement l’amélioration des perspectives de l'activité et de l'inflation, cela ne doit pas être considéré comme un motif d’inquiétude. Ce ne sera plus le cas lorsque les taux d’intérêt plus élevés découleront de craintes concernant un retrait des liquidités et une inflexion des taux directeurs de la Fed. Les banques centrales sont attentives à l’évolution des taux d’intérêt à long terme. Leurs initiatives (interventions verbales et augmentation des achats d'obligations) permettent de freiner ce mouvement. Il est donc prématuré de revenir sur les actifs à duration longue. Il faudra attendre un signal clair de changement de sens de la politique monétaire de la Fed pour opérer un repli défensif.

Les 3 R

Nous avons identifié trois thèmes macro transversaux pour nos perspectives 2021, qui vont structurer nos choix d'investissement. Premièrement, la reflation continue de s'accélérer, soutenue par un soutien maximal du policy-mix, dans un contexte de liquidité maximale. Aux Etats-Unis, à la suite du plan de soutien de 1,9 trillion de dollars lié à la pandémie, le président Biden a présenté un plan de relance de 2 trillions de dollars axé sur les infrastructures, la R&D, le haut débit et les énergies propres. Sur le plan monétaire, les grandes banques centrales restent très accommodantes (la BCE a augmenté le rythme des achats d'obligations; la Fed reste patiente) et l'expansion de la liquidité continue de dépasser la croissance du PIB nominal mondial. Le soutien de la politique économique pourrait durer plus longtemps que lors des précédents chocs récessifs, apportant une certaine visibilité aux investisseurs, aux ménages et aux entreprises. La reflation actuelle, plus axée sur le soutien budgétaire, devrait être plus créatrice d’emplois et plus inflationniste que la reflation de 2008-09, qui était exclusivement monétaire.

L'impact économique du second confinement est plus modéré que prévu.

Le deuxième thème concerne la rotation, basé sur l'amélioration des anticipations de croissance macroéconomique. L'impact économique du second confinement est plus modéré que prévu. Les perspectives de réouverture des économies en 2021 avec des nouvelles positives sur les vaccins sont encourageantes. Le point mort d'inflation à 10 ans aux Etats-Unis a atteint un sommet de 7 ans à 2,3%, indiquant une rotation plus convaincante, entre les gagnants de la pandémie et les gagnants de la réouverture. Des taux d'intérêt réels plus élevés et une courbe obligataire plus pentue pourraient également soutenir la rotation des actions en matière de préférence régionale, de secteur et de style.

Enfin, le troisième thème concerne les actifs réels (matières premières notamment, mais aussi les dividendes). Ils devraient pouvoir apporter de la diversification dans un portefeuille traditionnel. Ces actifs sont considérés comme réels, dans la mesure où ils sont indexés sur la croissance du PIB nominal, ils ne présentent aucun risque de duration, ils offrent une prime d’illiquidité et une protection contre l'inflation et la dépréciation monétaire.

L'année 2 du cycle haussier post-pandémique pourrait donc encore être en hausse, mais avec plus de modération, plus de volatilité, des ratios de Sharpe dégradés et une plus grande dispersion. Les performances proviendront davantage de choix relatifs que de performances absolues sur les classes d’actifs.

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