Les stablecoins, objets de toutes les attentions

Manuel Valente, Coinhouse

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Chronique blockchain. Les stablecoins ont une place bien à part: comme leur nom l’indique, ils sont stables par rapport à un sous-jacent.

Sur le marché des cryptoactifs, les stablecoins ont une place bien à part: comme leur nom l’indique, ils sont stables par rapport à un sous-jacent, la plupart du temps le dollar. Depuis quelques années, les stablecoins sont devenus prépondérants sur le marché. Les volumes quotidiens d’USDT échangés sont ainsi largement supérieurs à n’importe quel autre actif, en particulier Bitcoin. Les États s’intéressent de très près à la question, les régulateurs en tiennent compte, et ils peuvent faire vaciller l’ensemble de l’écosystème crypto.

Pour rappel, un stablecoin peut garantir sa valeur de trois façons différentes: en conservant une réserve un pour un de l’actif qu’il représente, en conservant un actif dont la valeur est plus importante que la quantité du stablecoin donné en circulation, ou finalement en utilisant un algorithme qui fait varier la quantité disponible sur le marché pour en fixer le prix.

Le premier modèle, qui est celui de l’USDT, a pour avantage de garantir simplement le cours de l’actif, mais immobilise une quantité importante de capital pour pouvoir le faire. Les gestionnaires de stablecoins ont donc adopté des pratiques de la finance traditionnelle, qui visent à placer le capital sous-jacent dans des produits financier à très faible risque, comme des obligations d’état américaines.

Le deuxième modèle s’appuie sur des services de finance décentralisée. La valeur des stablecoins est garantie par des sous-jacents en cryptomonnaie, et implémente des sécurités en cas de baisse brutale du marché. Ce modèle, utilisé principalement par le projet MakerDAO et son stablecoin DAI, n’a pour l’instant pas connu de défaut de paiement grâce à ces systèmes de sécurité.

Le dernier modèle, qu’on appelle stablecoin algorithmique, est le plus risqué : en faisant varier la quantité du stablecoin disponible sur le marché en temps réel, le gestionnaire du projet essaie de faire en sorte que son cours reste stable, bien que ses réserves soient bien inférieures à la valeur en circulation. Le plus connu de ces stablecoins algorithmiques était UST, géré par le projet Terra (LUNA). Était, car le projet a connu une faillite retentissante au mois de mai 2022 et a démontré qu’un stablecoin algorithmique était une proposition dangereuse, en particulier dans un marché baissier.

L’échec de l’UST a d’ailleurs eu des conséquences majeures sur l’ensemble du marché des cryptoactifs et entraîné la faillite en cascade de plusieurs entreprises, notamment Celsius et Three Arrows Capital.

Les Etats commencent à s’intéresser de près à la question de stablecoins, avec comme idée principale de les réguler. On pourra se souvenir de l’échec total du projet Libra/Diem de Facebook, qui n’a jamais pu décoller faute de trouver un accord avec le législateur américain pour se lancer.

Aux Etats-Unis, le Congrès discute depuis quelque temps d’une obligation pour les entreprises émettrices de stablecoins de disposer d’une licence bancaire, notamment pour s’assurer des réserves correspondant aux montants en circulation.

L’Union Européenne elle aussi va légiférer sur ce point dans la réglementation MiCA qui vient d’être adoptée par le Parlement. Il est devenu évident pour les régulateurs qu’on doit traiter les stablecoins différemment des autres cryptoactifs comme Bitcoin, avec un degré accru de sécurité. L’UST a été un coup de tonnerre sur l’ensemble du marché qu’il faudra garder à l’esprit. D’ailleurs, tous les projets de stablecoins algorithmiques qui étaient en préparation ont disparu.

Le dernier point à considérer est celui des stablecoins gérés par les États ou les banques centrales, les monnaies numériques de banque centrale (MNBC). À peu près toutes les banques centrales sont en train de tester ou de préparer des projets autour de ce sujet. Un pays reste très en avance, la Chine, avec l’équivalent de plus de 14 milliards de dollars déjà  échangés en e-yuan.

Il est évident que si ces actifs gérés par les banques centrales étaient simples à utiliser et compatibles avec le reste des protocoles blockchain existants, le marché leur donnerait la priorité, principalement grâce à la sécurité qu’ils apporteraient. Seul point noir au tableau: si les conditions de l’utilisation des ces stablecoins étatiques obligent leurs utilisateurs à des longues procédures de vérification d’identité ou de l’origine des fonds, la plupart des personnes préfèreront continuer d’utiliser les stablecoins privés qu’elles connaissent déjà. Il faudra à ce moment observer de près à quel point les banques centrales chercheront à imposer leur actif face à ceux existants, et avec quelles méthodes.

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