Les perspectives de croissance s’annoncent inégales: il faut se montrer sélectif

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

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Après une année 2022 morose, le S&P 500 a clôturé très favorablement le mois de janvier. L’indice a progressé de 6% depuis le début de l’année.

© Keystone

La baisse de l’inflation et la relative résilience des données économiques ont insufflé un regain d’espoir en faveur d’un atterrissage en douceur de la conjoncture américaine. Lors de sa dernière réunion, la Réserve fédérale (Fed) a encore ralenti le rythme des hausses de taux, à 25 points de base (pb) contre 50 pb en décembre.

Toutefois, malgré un début d’année solide, l’incertitude quant aux perspectives de croissance et d’inflation reste vive. Décryptage.

La conjoncture américaine ralentit et le pire est sans doute à venir

Le PIB américain a progressé à un taux annualisé de 2,9% au quatrième trimestre 2022, légèrement au-delà des prévisions du consensus, mais il affiche un ralentissement par rapport à la croissance de 3,2% enregistrée au troisième trimestre.

Cependant, la croissance globale du PIB provient environ pour moitié de la hausse des stocks. En outre, la baisse des importations de biens y a contribué pour 0,7 point de pourcentage supplémentaire. Cela suggère que l’économie n’est peut-être pas aussi solide que le taux de croissance du PIB le laisse entendre. L’investissement dans l’immobilier résidentiel a reculé de 26,7%, soit le septième trimestre consécutif de décroissance.

Les dépenses de consommation sont restées soutenues. Cependant, il existe également des zones d’ombre, notamment dans le logement.

Des données plus récentes indiquent que la conjoncture américaine se dégrade à mesure que l’impact des 425 points de hausse des taux de la Fed en 2022 se fait sentir. Et la croissance devrait encore ralentir au cours des prochains mois.

L’indice des principaux indicateurs économiques du Conference Board a fortement reculé en décembre. L’indice composite S&P Global des directeurs d’achat (PMI) pour les Etats-Unis a continué de se contracter en janvier, à 46,6, contrairement à l’indice PMI de la zone euro qui est repassé au-dessus de 50.

Les bénéfices des entreprises restent médiocres

40% des sociétés de l’indice S&P 500 en termes de capitalisation boursière ont déjà publié leurs résultats pour le quatrième trimestre. Or ceux-ci restent inférieurs à la normale. Seules 64% des sociétés dépassent les estimations des bénéfices, contre une moyenne historique de 73%.

Les dépenses de consommation sont restées soutenues. Cependant, il existe également des zones d’ombre, notamment dans le logement, les biens, les ordinateurs personnels, la publicité digitale et les dépenses liées au cloud.

Dans l’ensemble, les bénéfices du S&P 500 dépassent les prévisions du consensus d’à peine 1%, ce qui est inférieur au chiffre normal d’environ 4%. En valeur médiane, les sociétés ont réduit de 2,1% leurs prévisions de bénéfice par action (BPA) pour le premier trimestre 2023. Par ailleurs, les analystes revoient leurs estimations à la baisse à un rythme légèrement supérieur à la moyenne historique. Les bénéfices des entreprises devraient rester sous pression au cours des prochains trimestres et on peut anticiper une baisse de 3 à 4% du BPA du S&P 500 en 2023, pour atteindre 215 dollars.

La moyenne mobile sur quatre semaines du chiffre hebdomadaire des nouvelles inscriptions au chômage est passée sous la barre des 200'000 pour la première fois depuis le mois de mai.
L’inflation s’atténue, mais le marché de l’emploi américain reste tendu

L’indice des dépenses de consommation personnelle de base (core PCE) a progressé de 4,4% en glissement annuel en décembre, soit sa plus faible hausse annuelle depuis octobre 2021. Mais si la pression des prix s’atténue – ce qui donne à la Fed la marge de manœuvre nécessaire pour ralentir ultérieurement le rythme des hausses de taux afin d’évaluer l’impact sur la conjoncture – les décideurs politiques auront probablement besoin de preuves supplémentaires d’une dégradation du marché de l’emploi pour apaiser les inquiétudes concernant les augmentations salariales.

Les dernières données publiées indiquent que la situation reste tendue. La moyenne mobile sur quatre semaines du chiffre hebdomadaire des nouvelles inscriptions au chômage est passée sous la barre des 200'000 pour la première fois depuis le mois de mai.

Le contexte reste donc, à ce jour, caractérisé par le ralentissement de la croissance et des bénéfices, par une inflation supérieure à l’objectif et par une politique monétaire restrictive. Jusqu’à ce qu’un creux pointe à l’horizon en ce qui concerne la conjoncture américaine et les bénéfices des entreprises à l’échelle mondiale, on peut s’attendre à ce que les marchés des actions soient volatils. Le ratio cours/bénéfice prospectif du S&P 500 atteignant environ 18, le rapport risque-rendement pour le marché général américain semble défavorable à court terme.

Privilégier la sélectivité

Par conséquent, la Recherche d’UBS reste sélective dans son positionnement. Concernant les actions, on préfèrera les secteurs de la consommation de base, de l’énergie et de la santé, les actions versant des revenus de qualité, ainsi que la valorisation à la croissance.

En outre, dans l’environnement actuel, l’éparpillement entre les régions géographiques et les secteurs devrait être élevé. Par exemple, le déconfinement de la Chine et l’hiver plus clément que prévu en Europe sont probablement sources d’opportunités dans les secteurs du marché susceptibles d’anticiper les points d’inflexion plus tôt que les autres.

Il s’agit notamment des actions allemandes et de celles des marchés émergents, des actions européennes de la consommation et de certaines sociétés de diverses régions qui devraient bénéficier du déconfinement de la Chine. On appréciera également les matières premières au sens large, les obligations des marchés émergents et le dollar australien.

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