Les avantages de détenir des actifs à long terme

Yves Hulmann

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Déborah Shire, Deputy Head d’AXA IM Alts, s’attend à ce que les investisseurs s’orientent vers des classes d’actifs plus défensives cette année.

Avec des actifs sous gestion de 817 milliards d’euros à fin septembre 2022, AXA Investment Managers (AXA IM) compte parmi les leaders de la gestion d’actifs en Europe. A l’intérieur de la société, l’unité spécialisée dans les investissements alternatifs en direct, AXA IM Alts, qui regroupe l’ensemble des activités d’investissement en immobilier, dette privée et les crédits alternatifs, le capital-investissement et les infrastructures ainsi que les hedge funds, pèse près du quart du total avec des actifs sous gestion dépassant les 188 milliards d’euros à fin septembre 2022. Quels sont les développements dans ces différents segments et comment ces différentes activités intègrent-elles les critères en matière de durabilité? Déborah Shire, Deputy Head chez AXA IM Alts, qui emploie plus 800 collaboratrices et collaborateurs sur les plus que 2500 employés que compte AXA IM, fait le point sur les tendances pour 2023.

Leader dans l’immobilier en Europe

Au sein d’AXA IM Alts, le segment de l’immobilier (Real Estate) représentait la part la plus importante avec plus de 117 milliards d’euros d’actifs sous gestion, à fin septembre 2022. Sur ce montant, près de 90 milliards étaient constitués d’immobilier direct, ce qui fait d’AXA IM Alts le premier gérant d’actifs dans le domaine de l’immobilier en Europe, selon le classement IPE Top 150 Real Estate Investment Managers datant de fin 2022. Comme c’est le cas pour d’autres segments d’activités, AXA IM Alts intègre d’emblée les critères ESG à chaque étape du processus de gestion et s’engage activement à décarboner le portefeuille immobilier. Comme le souligne le gérant d’actifs, le domaine de l’immobilier représente à lui seul près de 40% des émissions mondiales de CO2. L’objectif de la société est de construire un portefeuille immobilier à faibles émissions de CO2, cela tout en décarbonant son portefeuille existant constitué de plus de 2400 bâtiments. Cette stratégie s’inscrit dans le cadre de son objectif intermédiaire de réduction de 20% des émissions de CO2 d’ici à 2025 (comparé à 2019), avant celui du net zéro visé avant 2050. «En matière de durabilité, un des avantages des actifs privés est qu’ils permettent d’investir dans des projets très précis, par exemple le financement de projets d’isolation ou de rénovation de bâtiments. Il est ainsi possible de connaître très précisément l’impact ESG des capitaux que nous investissons», illustre Déborah Shire.

Les banques sont devenues beaucoup plus réticentes à accorder des prêts, donc les entreprises doivent se tourner vers d’autres sources de financement pour financer certains projets.
Les infrastructures, des actifs résilients en période d’inflation

Deuxième segment en termes de taille, celui constitué par la dette privée et le crédit alternatif (Private Debt & Alternative Credit) pèse plus 87 milliards d’euros d’actifs. Sur ce montant, la part du crédit alternatif représentait pour sa part environ 49 milliards d’euros d’actifs sous gestion à fin septembre 2022.

La dette privée est soumise à moins de volatilité que les actifs cotés en bourse mais elle est aussi moins liquide. Comment les investisseurs tiennent-ils compte de ces deux paramètres durant de longues phases de correction sur les marchés comme cela a été le cas en 2022? «Les investisseurs institutionnels ont la capacité de détenir des actifs à long terme. De ce point de vue, c’est un avantage d’être soumis à moins de volatilité. La valeur des actifs varie essentiellement avec la qualité de crédit fondamentale des actifs», met en perspective Déborah Shire.

Le capital-investissement et les infrastructures (Private Equity & Infrastructure) représentaient pour leur part des actifs sous gestion de plus de 11 milliards d’euros chez AXA IM Alts à fin septembre 2022. Pour Déborah Shire, le segment des infrastructures est attrayant dans le contexte actuel marqué par l’inflation. «Cela peut se faire soit sous forme réglementaire ou contractuelle – à savoir que les prix sont adaptés sur la base d’un contrat –, soit sous forme implicite grâce à des tarifs régulièrement réajustés en fonction de l’inflation», explique-t-elle. Par ailleurs, le secteur des infrastructures tire aussi parti de la transition énergétique, laquelle nécessite d’importants investissements, observe-t-elle.

Les entreprises ont besoin de sources alternatives de financement

De manière générale, quelles sont les tendances anticipées pour l’année en cours dans le domaine des investissements alternatifs? Déborah Shire s’attend à ce que les investisseurs s’orientent plutôt vers des classes d’actifs plus défensives. Pour la spécialiste, le fait que les conditions d’octroi de prêts des créanciers se soient durcies en 2022 peut aussi être une chance pour les investisseurs disposés à prendre des risques car ils bénéficient aussi de rémunérations plus attrayantes et de conditions de contrats de prêts favorables aux prêteurs. «Les banques sont devenues beaucoup plus réticentes à accorder des prêts, donc les entreprises doivent se tourner vers d’autres sources de financement pour financer certains projets. Cela peut être une opportunité pour les acteurs de la dette privée», considère-t-elle.

Anticiper correctement ses besoins en liquidités

Quant à savoir s’il est souhaitable de démocratiser l’accès aux placements privés pour tous les investisseurs, y compris pour les clients individuels, Déborah Shire estime que ceux-ci doivent être conscients des risques spécifiques qui sont liés au fait de détenir des placements moins liquides. «L’investisseur doit toujours se poser la question de savoir s’il investit à court terme ou à long terme. A court terme, il peut y avoir le risque que tout le monde cherche la porte de sortie au même moment, comme cela avait été le cas en 2008, même sur des actifs de qualité», compare-t-elle. Il est donc toujours nécessaire d’évaluer non seulement le risque encouru avec son investissement mais aussi de savoir bien anticiper ses besoins en liquidités, recommande Déborah Shire.

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