Le rôle des combustibles fossiles dans la transition climatique

Gaël Combes, Unigestion

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Malgré toutes les mesures annoncées pour lutter contre le changement climatique, la guerre en Ukraine nous a rappelé à quel point nous restons dépendants des combustibles fossiles.

Les dirigeants européens ont fait des pieds et des mains pour réduire les exportations russes, mais comme le gazoduc Nordstream reste fermé, les risques de pénurie d'énergie sur le continent augmentent.  

Se passer complètement des combustibles fossiles est une montagne encore plus grande à gravir. Le pétrole, le charbon et le gaz représentent toujours environ 85% de la consommation d'énergie et une réduction de 25 à 30% des émissions d'énergie est nécessaire d'ici à 2030 pour rester sous la barre des 2 °C de réchauffement de la planète.

Les investisseurs doivent décider de la manière d'aborder la transition énergétique requise, à la fois en termes d'exclusion et de soutien aux entreprises qui permettent la transition ou atténuent leur impact sur l'environnement.

Par exemple, nous excluons de nos portefeuilles d'actions les entreprises dont plus de 10% des revenus proviennent du charbon. Pour nos stratégies de l'article 9 (qui ciblent les investissements durables), les recettes provenant du charbon ne doivent pas dépasser 1% ou l'entreprise doit disposer d'un plan d'élimination accessible au public.

Les exclusions mises à part, il existe de nombreuses opportunités, même si les investisseurs doivent faire leurs devoirs. Par exemple, les deux tiers de l'énergie produite sont perdus en raison d'inefficacités, de sorte que les mesures d'efficacité énergétique présentent des opportunités importantes. Les bâtiments sont un choix évident pour une meilleure efficacité énergétique, puisqu'ils sont responsables de 39% des émissions mondiales, mais les rénovations se font à un rythme très lent.

Les énergies renouvelables, comme l'éolien et le solaire, sont très en vue. Cependant, elles ne représentent qu'une petite partie du bouquet énergétique, sont irrégulières et nécessitent des solutions de stockage de l'énergie et/ou des solutions de secours à partir de sources d'énergie gérables telles que l'hydroélectricité, le nucléaire, le gaz ou même le charbon.

Le stockage de l'énergie est un autre domaine intéressant. En 2020, la capacité de stockage par batterie s'élevait à 17 GW, mais l'AIE (Agence International de l’Energie) estime que le monde aura besoin de 600 GW de capacité de stockage par batterie en 2050.  L'hydrogène peut être utilisé pour stocker l'énergie mais nécessite de grandes quantités d'énergie renouvelable pour sa fabrication, que nous n'avons pas encore.

La transition énergétique est inflationniste par nature. Les machines à haut rendement énergétique nécessitent beaucoup de métal et dépendent de sources diffuses et erratiques comme le vent. L'AIE estime que nous devrons en gros doubler les investissements dans des domaines tels que la production d'électricité et les infrastructures d'énergie propre pour réduire les émissions, en supposant que nous puissions nous procurer la plus grande quantité de minéraux critiques nécessaires. Une voiture électrique typique, par exemple, nécessite six fois plus de minéraux qu'une voiture conventionnelle.

Ces défis signifient que notre dépendance à l'égard des combustibles fossiles continue de croître alors que nous recherchons la croissance économique. En outre, les pénuries signifient que nous sommes en concurrence les uns avec les autres pour assurer un approvisionnement suffisant alors que la transition énergétique a lieu et que la balkanisation du monde est en cours. La guerre en Ukraine ajoute une pression supplémentaire.

En outre, les prix de l'énergie agissent comme une taxe sur les consommateurs et sur l'économie nationale. En Europe, plus de la moitié du prix de détail des carburants repose sur des taxes, tandis que l'autre moitié est une «taxe» imposée par les pays producteurs de pétrole. Seule la première peut financer la transition énergétique nationale. Il est donc essentiel que le prix payé à la pompe reflète une taxe intérieure élevée (le prix du carbone) pour financer les investissements et décourager la consommation.

Les deux récents chocs pétroliers, couplés à la pression «verte» sur les groupes énergétiques, ont réduit les dépenses, augmentant le risque d'un choc d'offre. Ainsi, à moyen terme, il est primordial que l'offre de pétrole et de gaz reste suffisamment élevée pour que les prix restent bas si l'on veut poursuivre la croissance économique et donc financer la transition énergétique.

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