La gestion active accompagne les grandes transitions

Hamid Amoura & Sara Bourhime, Mirabaud Asset Management

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Pionnier il y a plusieurs années, les évènements récents placent l’ISR au centre de la finance mondiale et l’imposent comme une pratique évidente.

Les récentes crises du covid ou de la guerre en Ukraine, ont mis en lumière l’ISR (Investissement Socialement Responsable) comme une approche pleinement alignée avec les enjeux économiques et financiers auxquels le monde est confronté ainsi qu’avec les mutations sociétales actuelles.

D’abord pointé du doigt comme pratique naïve ou potentiellement destructrice de valeurs, puis considéré comme dangereux car bouleversant les paradigmes établis, l’ISR s’impose finalement comme une évidence. De fait, l’application de ses principes offre un ticket gagnant qui conjugue les besoins d’une démarche responsable et durable avec l’attente de résultats financiers. Ce constat s’établit dans un monde en péril du point de vue de ses ressources naturelles mais toujours soumis aux injonctions de la loi du marché. L’ISR peut donc être considéré, à ce titre, comme une révolution étant donné les critères définis par et attribués à Schopenhauer (ridicule, dangereux, évident).

Le respect des critères extra-financiers par la gestion active

Cette révolution qu’implique l’émergence accélérée des pratiques ISR dans le monde de la finance, repose sur des critères où le financier et l’extra-financier s’enchevêtrent judicieusement. Le bénéfice financier escompté pèse autant que la qualité de l’entreprise et du projet sur le plan environnemental et social. Autrement dit, la capacité qu’offre la gestion active de cibler et choisir scrupuleusement les entreprises dans lesquelles investir est un atout primordial et un rôle clé exercé au service d’une société toujours plus respectueuse de l’environnement.

Elle se distingue en cela d’une gestion dite «passive», qui repose sur des instruments financiers répliquant des indices. La prise en compte de critères extra-financiers pertinents tout au long du processus d’investissement en est de ce fait limitée.

Depuis la COP21 à Paris en 2015, l’ISR suit une ligne «éditoriale» ayant pour objectif la lutte contre le changement climatique.

Dans le contexte actuel, nos sociétés étant par ailleurs amenées à revoir ses modes de production, il faut pouvoir évaluer les entreprises tout au long de la chaîne de valeur et au niveau de chacune des parties prenantes (fournisseurs, clients, employés, Etats, institutions, etc). Ce dernier point est un préalable indispensable que s’empressent d’inclure d’ores et déjà l’analyse ESG et l’approche ISR.

A ce titre, la finance se doit de tenir son rang de «driver of change», responsabilité qui lui incombe plus que jamais. La question de l’impact s’inscrit dorénavant au cœur de tous les processus de décision d’investissement. Là où une entreprise ne répondait par le passé qu’à un objectif économique, elle se doit de satisfaire également des objectifs sociaux et environnementaux. Les pratiques internes de l’entreprise, l’impact du processus de fabrication, les externalités positives et/ou négatives d’un produit ainsi que son cycle de vie, sont ainsi scrupuleusement passés au crible.

Objectif «transition climatique» et accompagnement du changement

Depuis la COP21 à Paris en 2015, l’ISR suit une ligne «éditoriale» ayant pour objectif la lutte contre le changement climatique. Certaines définitions et considérations se voient dans ce cadre évoluer dans le temps et il s’agit d’être sélectif sur le fait qu’une transition climatique est prévue ou non dans le plan de développement d’une industrie ou d’une entreprise à la recherche d’un financement ISR.

Le nucléaire par exemple, longtemps controversé, est depuis peu considéré comme une source d’énergie plus que crédible, en ceci, qu’elle émet très peu d’émissions de CO2. Malgré toutes les réserves et interrogations qui accompagnent cette activité, elle demeure aujourd’hui une solution incontestable dans la lutte contre le réchauffement climatique ainsi qu’une source d’approvisionnement locale assurée.

Quant aux énergies fossiles, sur lesquelles il est absolument primordial de porter un regard critique et une analyse lucide, le conflit en Ukraine et les tensions avec la Russie ont rappelé avec un sentiment d’urgence l’importance des considérations financières et liées aux réserves. Les pétrolières, portées par les prix vertigineux du gaz et du pétrole, retrouvent un attrait auprès des investisseurs et demeurent décisives pour le quotidien de tout un chacun. Mais plutôt que de s’en tenir à une position radicale, il nous paraît plus judicieux d’accentuer les discussions avec elles afin d’accompagner l’accélération de leur mutation en producteur d’énergies renouvelables à 100%.

La finance de demain sera durable et responsable, ou ne sera pas.

La ligne ISR pour laquelle nous avons opté, considère en effet qu’une partie des acteurs, qui aujourd’hui sont les producteurs d’énergies fossiles, seront demain ceux qui produiront les énergies renouvelables nécessaires au maintien d’une planète viable.

Cette notion clé de transition peut également être étudiée dans l’aviation. Générateur d’approximativement 2% des émissions de CO2, ce secteur se doit d’évoluer vers des solutions moins énergivores et plus durables. L’investissement dans des ‘Sustainable Aviation Fuels (SAF)’, des carburants durables incluant des résidus de déchets municipaux, agricoles et forestiers, permet de réduire les émissions de gaz à effets de serre de 80% par rapport aux carburants traditionnels. Les SAF n’étant, certes, qu’une solution intermédiaire jusqu'à ce qu’une technologie «nette zéro» soit développée, l’ISR permet néanmoins d’accompagner et d’accélérer cette évolution.

Lors des interactions avec les clients privés, il s’agit donc de prendre en compte, en plus des préférences de ces derniers, les intérêts extra-financiers en jeu. Ils constituent autant d’éléments de l’équation d’une bonne gestion de fortune, qui se veut bien sûr dans l’intérêt des clients tout en intégrant l’importance du «bien de tous».

L’ISR, une pratique évidente

Au final, si l’ISR se voulait pionnier il y a plusieurs années, les évènements à retentissement mondial de ces dernières années le placent au centre du village de la finance mondiale et l’imposent comme une pratique évidente.

Il apparaît en effet autant comme un levier financier, qu’un gendarme pour la planète; il représente par là même, un moyen privilégié pour accompagner le changement de paradigme sociétal, en faveur d’une écologie maîtresse de notre quotidien. La finance de demain sera durable et responsable, ou ne sera pas.

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