La génération future – Lettre d’investissement par ODDO BHF

Mourtaza Asad-Syed & Arthur Jurus, ODDO BHF

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Il est à craindre qu’à force de se focaliser sur les événements spectaculaires, on néglige les tendances de fond, qui seront source de véritables ruptures.

Les conséquences sur nos sociétés de la pandémie – dont la fin s’éternise – sont toujours au centre de l’attention. Tous les yeux et les esprits sont rivés à anticiper le monde «post-covid». Nous ne faisons pas exception, l’an dernier et encore récemment dans cette lettre. Nous anticipons principalement une accélération des tendances antérieures, comme celles de la digitalisation de notre vie économique et sociale, de la surveillance accrue de la collectivité sur les individus, ou de l’automation croissante des fonctions répétitives dans les services. A priori, il n’y aurait pas de rupture majeure, de bouleversement consécutif au COVID, malgré le caractère inédit de ce choc pour l’Humanité.

Néanmoins, le monde subit également d’autres évolutions majeures, dont le renouvellement générationnel. Il est moins visible car plus lent, mais il sera tout aussi impactant sur nos destinées. Il est à craindre qu’à force de se focaliser sur les événements spectaculaires, on néglige les tendances de fond, qui seront source de véritables ruptures.

Cette année, les adultes nés en 1991 auront 30 ans, ceux nés en 2001, auront vingt ans! Cette génération qui fait ses premiers pas dans la vie active, sera en responsabilité ces dix prochaines années. Cette génération est différente de la précédente en particulier dans l’OCDE. Elle n’a pas de référence à un monde séparé entre deux grandes puissances militaires, sa cellule familiale est pour moitié atomisée avec 40% de parents divorcés, pour elle l’Internet est pris pour acquis, ses langues universelles sont l’anglais et les emojis, :-).

Cette génération diffère fortement des précédentes dans ses rapports à l’économie, à l’environnement, au travail, à l’habitat, à la propriété, à la famille, et à la société. Par exemple:

  • L’usage prédomine sur la propriété: 28% sont propriétaires de leur logement contre 38% il y a 30 ans, tandis que le taux détention de véhicule est 10% inférieur à celui de la précédente génération au même âge.
  • Le réalisme l’emporte sur l’ambition. Face à la baisse de la durée de vie des grandes entreprises à moins de 20 années, l’aspiration de «carrière professionnelle» a disparu. Au contraire, le «nomadisme salarial» semble émerger, avec davantage de volonté d’entreprenariat (60% d’aspirants dès 25 ans) et le refus d’horaires contraints, sans parler du détachement au lieu de travail.
  • La conscience environnementale devient prégnante dans les choix personnels, au point d’infléchir le désir de procréation qui s’illustre à 7% de moins de 30 ans qui ne souhaitent pas d’enfants, contre 5% une génération plus tôt.

Il y a deux générations, les promesses de New Society du Président Johnson coïncidaient avec un bouleversement culturel et social partout dans les grandes démocraties de l’OCDE. La jeunesse contestait alors un ordre établi considéré trop rigide et autoritaire. 1968 deviendra ainsi l’année symbole pour cette génération, celle des «baby-boomers», qui allait progressivement prendre en main son destin et celui de ses enfants. La rupture était irréversible. En 2021, le Président Biden s’est principalement adressé à la jeune génération dans son discours de l’Union. Il nous parait possible que nous soyons à l’aube d’une telle révolution générationnelle.

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