La finance durable est-elle la solution?

Rosa Sangiorgio, Pictet Wealth Management

2 minutes de lecture

Les clients veulent que les banques relèvent les défis ESG. Cela a du sens dans l'investissement à long terme et celles-ci ne peuvent réussir que si la société et l'environnement sont stables.

Depuis des dizaines d'années, nous vivons à crédit en exploitant les ressources de notre écosystème. Cela se traduit notamment par l'altération des cycles du carbone et de l'eau et par la perte de biodiversité. En tant qu'investisseurs, nous savons bien que rien n’est gratuit, mais au lieu de payer la facture, nous continuons à demander des prêts. Et plus nous tarderons à payer ces dettes, plus les coûts augmenteront.

Aujourd'hui, notre planète nous envoie des injonctions de plus en plus pressantes, par exemple sous la forme d'événements climatiques extrêmes. Contrairement au monde financier, la nature ne peut s'adresser à une banque centrale. Aucune institution ne peut intervenir du jour au lendemain pour éliminer les gaz à effet de serre de notre atmosphère, pour injecter de l'eau là où elle manque ou pour assainir les terres polluées. Le défi auquel nous sommes confrontés aujourd'hui est de savoir comment, et à quel rythme, nous pouvons réussir la transition vers une économie plus durable.

Les gouvernements ne peuvent à eux seuls assurer une transition plus rapide, mais ils jouent un rôle clé dans la création de conditions-cadres qui encouragent les investissements durables, que ce soit par la fiscalité, la réglementation ou les subventions aux technologies propres.

Le secteur financier en tant que catalyseur dans le processus vers une économie durable

Si l'on examine de plus près le système financier, les banques sont en fait l'épine dorsale du système économique réel. La manière dont le capital est déployé - sous la forme d'investissements et de financements - détermine ce qui peut ou ne peut pas être réalisé. Lorsque les capitaux affluent vers des entreprises qui respectent les limites de la planète, notre société devient plus durable.

Mais pourquoi serait-il du devoir des banques de relever des défis sociaux tels que le changement climatique, la perte rapide de biodiversité et les futures pandémies?

Parce que les clients le demandent. Parce que cela a du sens dans une perspective d'investissement à long terme. Parce que les banques ne peuvent réussir à long terme que si la société et l'environnement sont stables.

Avons-nous tout ce qu'il faut pour réussir?

La disponibilité de données ESG (environnementales, sociales et de gouvernance) fiables sur les entreprises est essentielle pour prendre des décisions éclairées en matière d'investissement et de crédit qui tiennent compte des critères de durabilité. Malheureusement, malgré la multitude de sources de données, de fournisseurs de données et de recherches dans ce domaine, il existe toujours un fossé entre la quantité de données nécessaires pour prendre des décisions en matière de durabilité et les données disponibles.

Beaucoup a été fait à cet égard. Des initiatives volontaires telles que la Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD) ou la Task Force on Nature-related Financial Disclosures (TNFD) ont été lancées pour mettre à disposition des données plus pertinentes. Sur le plan réglementaire également, de plus en plus d'autorités s'engagent dans cette voie; pensons par exemple à la taxonomie de l'UE, à la directive sur les rapports de durabilité des entreprises (CSRD) ou aux règles proposées par la SEC sur la divulgation des données climatiques, qui exigent des entreprises qu'elles divulguent des informations et fournissent un cadre aux institutions financières et aux investisseurs.

Si les données sont d'une importance capitale, il est tout aussi important d'avoir la bonne perspective et le bon contexte pour les utiliser. Au sein de la communauté des investisseurs, dans les médias et en politique, les termes ESG et investissement d'impact sont souvent utilisés de manière interchangeable, alors qu'ils représentent des concepts très différents.

Ce qu'il faut avant tout, c'est de la coopération. A tous les niveaux

Coopération entre les entreprises et l'industrie financière; d'une part, pour générer, rapporter et collecter des données de manière efficace et, d'autre part, pour réduire la multitude de niveaux et de normes, permettant ainsi une mise en œuvre à long terme basée sur la science.

Coopération entre les régulateurs et l'industrie financière pour promouvoir des cadres alignés sur la recherche scientifique, pas trop idéalistes, réalisables dans la pratique.

Coopération entre les clients et l'industrie financière: les banques doivent comprendre les besoins des investisseurs, les sensibiliser en quantifiant les impacts positifs et négatifs de leurs investissements, les aider à réaliser que les investissements ne sont pas seulement des chiffres, mais qu'ils représentent l'économie réelle de demain.

Ce n'est qu'avec la collaboration de toutes les parties prenantes que les défis de notre époque pourront être véritablement relevés.

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