Les compagnies d'électricité suscitent la controverse en raison de leur impact considérable sur le changement climatique. Face à cette situation, les investisseurs soucieux du climat pourraient être tentés de retirer les compagnies d'électricité de leurs portefeuilles. Pourtant, cela serait contre-productif. Priver ces entreprises de capitaux met en péril la transition vers le «net zéro».

En éliminant leurs propres émissions, les compagnies d'électricité peuvent jouer un rôle crucial dans la décarbonisation d'autres industries à forte consommation d'énergie, comme leurs clients des secteurs du transport, de la fabrication et de la construction qui, à leur tour, pourront en faire autant.

Certaines des entreprises les plus progressistes se donnent beaucoup de mal pour décarboniser leurs propres activités. Nombre d'entre elles augmentent également leurs investissements dans les énergies renouvelables et les réseaux électriques. Ces changements ne sont pas seulement bénéfiques pour l'environnement. En effet, le passage à un modèle d'entreprise à faible émission de carbone peut également être rentable.

Les entreprises de services publics qui s'engagent pleinement dans la décarbonisation peuvent bénéficier d'une augmentation de leurs bénéfices lorsque les perspectives de croissance des énergies renouvelables s'améliorent. En outre, les entreprises qui abandonnent progressivement les centrales thermiques traditionnelles évitent de devoir déprécier la valeur des actifs liés aux combustibles fossiles devenus obsolètes.

Tout cela signifie que les actions du secteur des services publics pourraient devenir une ressource importante de la transition durable dans les années à venir.

Le monde dépend beaucoup de la décarbonisation du système électrique mondial, qui, associée à l'électrification des transports routiers et des bâtiments, pourrait permettre de réduire de moitié les émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Nous constatons que, dans de nombreux cas, les compagnies d'électricité répondent aux attentes concernant leurs plans de transition, voire les dépassent.

En Europe, par exemple, une entreprise de services publics a augmenté sa part d'énergies renouvelables à 80% de sa capacité nette en 2023, contre 42% en 2016. Elle prévoit également de réduire progressivement ses activités liées au charbon et au nucléaire dans les années à venir. D'ici à 2030, tous ses revenus devraient provenir de sources non fossiles.

Un géant américain des services publics a quant à lui plus que triplé sa capacité de production d'énergies renouvelables telles que l'énergie éolienne et solaire au cours des cinq années précédant 2022.

Il a engagé en moyenne 78 milliards de dollars dans des projets verts d’ici à 2025, ce qui inclut également le stockage de batteries et d'hydrogène. En outre, l'entreprise prévoit d'éliminer toutes les émissions de carbone dans l'ensemble de ses activités d'ici à 2045, sans coût supplémentaire pour ses clients, afin de profiter de la décarbonisation de l'économie américaine, qui représente, selon elle, une opportunité de marché de 4000 milliards de dollars.

Ces deux entreprises ne sont pas des exemples isolés.

L'amélioration de la situation économique et l'importance accrue accordée au développement durable par les consommateurs et les investisseurs incitent les entreprises actives dans les services publics à abandonner les sources d'énergie fossiles pour la production d'électricité.

Le nombre de services publics et de producteurs d'électricité indépendants engagés dans l'initiative Science Based Targets (SBTi) - une organisation qui valide les objectifs d'entreprises en matière de consommation nette zéro - a été multiplié par six au cours des trois dernières années seulement.

L'évolution de la dynamique du secteur des services publics a des implications importantes pour les investisseurs.

A mesure que leurs activités deviennent plus «propres», les entreprises pourront bénéficier d'une croissance plus élevée et réduire les risques liés à la transition, ce qui peut conduire à une surperformance.

Secteur hautement réglementé avec des contrats à long terme, les services publics ont traditionnellement été associés à des rendements stables, défensifs et similaires à ceux des obligations. Mais elles offrent aujourd'hui de plus en plus un élément de croissance, grâce à l'accélération des investissements dans les énergies renouvelables.

De plus, leurs stratégies sont souvent en phase avec les priorités gouvernementales, ce qui leur permet de bénéficier d'incitations financières supplémentaires et d'investir encore plus pour le long terme.

En d'autres termes, certaines entreprises de services publics permettent aux investisseurs de tirer parti de la croissance du secteur des énergies renouvelables tout en garantissant des flux de trésorerie stables et une visibilité à long terme sur les bénéfices.