La course des économies émergentes vers le «net zéro»

Michael Ganske, T. Rowe Price

2 minutes de lecture

La diminution de la pollution par le carbone est devenue un impératif mondial. Qu’en est-il pour les marchés émergents?

Le changement climatique pose un double défi aux économies émergentes. Elles risquent non seulement de ressentir de manière disproportionnée les effets des phénomènes météorologiques extrêmes, de l'élévation du niveau des mers et des sécheresses, mais elles doivent également trouver un moyen d'augmenter leur PIB tout en limitant leurs émissions de gaz à effet de serre.

Il semblerait que ces pays soient les plus touchés par la transition vers le zéro émission. Mais nous ne partageons pas cet avis, car les efforts croissants de décarbonisation créent des opportunités pour les marchés émergents.

Le passage au vert implique avant tout l’utilisation de métaux industriels. La demande de métaux tels que le lithium, le cobalt et les terres rares, qui sont des composants essentiels dans la production d'énergie renouvelable et des voitures électriques, devrait exploser au cours des prochaines années. De nombreuses économies émergentes pourraient donc en bénéficier. La Chine, l'Afrique du Sud, la Zambie, le Chili ou le Pérou sont en bonne position pour être bénéficiaires de l'appétit croissant envers les métaux clés.

De manière quelque peu contre-intuitive, leur infrastructure de départ donne aux pays émergents un autre avantage dans la course à la neutralité carbone. Lorsque vous construisez une ville depuis le début, vous pouvez être plus sensible à l'efficacité énergétique et à l'utilisation des ressources.

Cependant, le passage à des sources d'énergie plus propres coûte cher.  Et, l'accès aux sources de financement dans ces pays est plus complexe. Contrairement aux pays développés, les marchés émergents ont du mal à trouver des financements, que ce soit pour des raisons politiques ou structurelles.

Un autre aspect qui rend la transition vers des émissions «net zéro» pour les pays émergents est leur dépendance à l'industrie lourde. De nombreuses économies émergentes ont tendance à être moins orientées vers les services et plus axées sur la manufacture et l'énergie que les pays développés. Ainsi, le passage à des alternatives au pétrole et au gaz peut y être un défi encore plus important.

Un rappel à l'ordre

Aussi progressive que puisse être la transition vers des sources d'énergie durables, des chocs externes, telle la guerre en Ukraine, peuvent accélérer les choses. Une combinaison d'animosités politiques et de prudence pourrait changer la donne en ce qui concerne les efforts de décarbonisation dans le monde. Les gouvernements, en particulier en Europe, n'aiment plus l'idée d'être dépendants d'un Etat. Ils veulent avoir des alternatives, et c'est là que les marchés émergents entrent en jeu.

Nous assistons aujourd'hui à un changement structurel qui voit la Russie se couper définitivement du marché mondial de l'énergie. Il n'y a aucune chance que l'Europe dise «Oublions cette guerre et revenons à la normale». Cela ne se produira pas.

Au lieu de cela, les pays développés font appel à des pays comme le Venezuela et l'Iran afin de couvrir leurs besoins énergétiques. La position politique envers ces deux nations va changer. Ce sera un long processus et l'issue est loin d'être encore claire, mais on peut déjà voir les Etats-Unis reconsidérer leur position envers le Venezuela. Et l'Iran n'a soudain plus vraiment l'air d'un mauvais élève non plus.

Le fait d’évincer le pétrole et le gaz russes entraînera certainement une augmentation à court terme des émissions de carbone, car cela ralentira l'élimination progressive du charbon, servant d'alternative à court terme. Pourtant, la nécessité de trouver de nouvelles sources d'énergie va, selon nous, renforcer l'intérêt pour les énergies renouvelables, y compris sur les marchés émergents, à long terme.

De nombreux investisseurs pensent que le mouvement de décarbonisation affaiblit les opportunités d'investissement dans les économies émergentes, mais c’est faux. Il suffit d'adopter une approche beaucoup plus granulaire pour trouver les pays qui en bénéficient réellement.

A lire aussi...