L’économie locale compte sur son marché intérieur

Jean-Pascal Baechler, BCV

2 minutes de lecture

Entre résilience et incertitudes, les économies suisse et vaudoise se projettent de manière relativement positive vers 2024.

Au fil de leur publication, les statistiques confirment le ralentissement attendu de l’économie, mais aussi les incertitudes qui entourent l’activité dans le monde. Dans l’édition d’avril de ses Perspectives de l’économie mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) observe que les freins à la reprise restent nombreux et table sur un repli de la croissance mondiale de 3,4% en 2022 à 2,8% cette année et 3,0% l’an prochain. On observe, par exemple, que l’activité n’a progressé que de 1,1% aux Etats-Unis au premier trimestre 2023, contre 2,6% au quatrième trimestre 2022.

Cette tendance n’épargne pas les économies ouvertes sur le monde comme le canton de Vaud et la Suisse. Cependant, les dernières prévisions publiées par la Commission Conjoncture vaudoise soulignent que la solidité de l’économie domestique compense en partie les effets du ralentissement de l’économie mondiale. L’activité dans le canton de Vaud devrait croître de 1,2% en 2023 et de 1,5% en 2024, contre 2,6% en 2022. Des prévisions empreintes d’une certaine incertitude au vu des tensions géopolitiques, de la persistance de l’inflation et des effets de la hausse des taux d’intérêt, sans même parler de l’évolution du franc ou des risques énergétiques, voire de l’accroissement de l’endettement public dans les pays industrialisés. Sur le plan national, le Seco table sur une croissance de 1,1% cette année et de 1,5% l’an prochain, après les 2,1% de l’an dernier.

Indicateurs divergents

Le dernier Baromètre conjoncturel du KOF est passé en avril en dessous de sa valeur moyenne à long terme, signifiant ainsi que l’activité s’essouffle en Suisse. Pour sa part, les indices suisses des directeurs d’achats montrent une évolution contrastée: si l’indice manufacturier est dans le rouge, l’indice des services indique une poursuite de la croissance – à rythme toutefois mesuré. De son côté, l’indice de l’activité économique hebdomadaire du Seco stagne à un bas niveau, mais reste positif. Ces différents éléments illustrent le ralentissement de l’activité, mais aussi la résilience de l’économie suisse. Le scénario actuel n’est pas celui d’une récession, mais d’une croissance modeste.

L’indice du climat de consommation reste dans le rouge, mais ses composantes prospectives se sont légèrement améliorées par rapport à l’an dernier.

L’inflation a stagné en avril, à 2,6% en rythme annuel, et demeure supérieure aux objectifs fixés par la Banque nationale suisse (BNS). Si la hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation a continué de ralentir, celle des autres biens et services est restée stable. Malgré la persistance des tensions inflationnistes, les économies suisse et vaudoise peuvent compter sur la demande intérieure. L’indice du climat de consommation reste dans le rouge, mais ses composantes prospectives se sont légèrement améliorées par rapport à l’an dernier.

Manque de main d’œuvre

La demande intérieure est notamment soutenue par un marché de l’emploi solide. Le taux de chômage est descendu à 3,1% dans le canton de Vaud à fin avril 2023 (2,0% sur le plan national). D’ailleurs, sur ce marché asséché, plus d’une entreprise sur deux (52%) rencontre des difficultés à recruter, la situation est même plus critique dans l’industrie et dans les grandes entreprises, relève la dernière enquête conjoncturelle de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie (CVCI).

La main d’œuvre n’est pas la seule préoccupation des entreprises vaudoises. La situation économique générale inquiète près de 9 entreprises sondées sur 10. Cela dit, le monde économique vaudois reste relativement positif. Après les solides résultats enregistrés en 2022, les entreprises s’attendent globalement à un chiffre d’affaires et une situation bénéficiaire stable ou en hausse et prévoient même une légère hausse des investissements.

Situation contrastée entre les branches

Par branche, les indicateurs de la Commission Conjoncture vaudoise, sur le plan cantonal, comme les Enquêtes conjoncturelles du KOF, sur le plan suisse, montrent une baisse de la marche des affaires dans l’industrie ces derniers mois. De plus, les entrées de commandes diminuent, ce qui montre que l’affaiblissement de la conjoncture mondiale impacte les branches manufacturières. Dans la construction, les entreprises font état d’une marche des affaires stable, tant sur le plan vaudois qu’à l’échelle suisse. L’hôtellerie-restauration se remet pour sa part de la crise du COVID-19, avec une amélioration du chiffre d’affaires et de la rentabilité. A court terme, les acteurs vaudois de la branche sont un peu moins optimistes que la moyenne nationale. Quant aux sociétés actives dans les services, aux entreprises ou à la personne, et dans le commerce de détail, elles font état d’une amélioration ces derniers mois de la marche de leurs affaires.

Au niveau des prévisions, les plus optimistes concernent la chimie-pharma, le commerce de détail, l’hôtellerie-restauration, ainsi que les transports, postes et télécommunications. Ces branches devraient voir leur valeur ajoutée progresser sensiblement plus rapidement que la moyenne cette année et l’an prochain. Du côté des services publics et parapublics, la croissance qui se profile est en ligne avec celle du canton. En revanche, les perspectives sont mitigées pour l’industrie des machines, les fabricants d’instruments de précision et l’horlogerie, les services financiers, ainsi que les activités immobilières et les services aux entreprises, qui pourraient voir leur valeur ajouter stagner. Dans la construction, elle pourrait même fléchir.

A lire aussi...