Il ne faut pas craindre un nouveau «TaperTantrum»

Florian Roger, Exane Derivatives

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Jerome Powell connaît trop bien les erreurs à éviter et a des moyens pour atténuer la volatilité liée à la réduction des achats d'actifs de la Fed

De nombreux investisseurs s'inquiètent du risque d’un nouveau «taper tantrum» dans le courant de l'année. En effet, les valorisations des actifs risqués ont atteint des niveaux élevés, grâce à l'approche «quoi qu’il en coûte» adoptée par les décideurs politiques depuis mars dernier. Les «bulles» pourraient donc se dégonfler lorsque les décideurs politiques s’engageront vers une position moins accommodante, à commencer par la réduction des achats d'actifs par la Fed.

Nous pensons que ces inquiétudes sont exagérées, au moins pour cette année. Si une certaine volatilité est inévitable lorsque les banques centrales engagent la normalisation de leur politique, le risque est si bien identifié qu'il est difficile d'avoir vraiment peur.

Jerome Powell connaît trop bien les erreurs à éviter en ce qui concerne le «tapering». Il a été l'un des trois «amigos» du conseil des gouverneurs qui ont poussé Ben Bernanke à signaler un possible ralentissement des achats d'actifs en mai 2013. Il a fait valoir à l'époque que la Fed devait reprendre le contrôle des attentes du marché, car il estimait qu'une hausse du bilan de la Fed au-dessus d’USD5tr était trop risquée pour des raisons de stabilité financière et de politique. Quel changement depuis lors ! Le même Powell écarte maintenant toute inquiétude concernant les bulles et craint davantage de ne pas en faire assez que d'en faire trop pour les mêmes raisons politiques.

Il «fera savoir au monde» bien à l'avance quand la Fed voudra réduire ses achats d’actifs. La nervosité des marchés de ces derniers jours le rendra probablement encore plus prudent.

Il est important de noter que la Fed a un bien meilleur guidage des anticipations qu'en 2013. Elle réduira les achats d'actifs lorsque le marché du travail aura connu une amélioration substantielle, et non pas lorsque «les perspectives du marché du travail» se seront améliorées, comme en 2013. La différence est subtile, mais cela signifie que la Fed examinera les données et ne s'appuiera pas sur des modèles économiques incertains pour prendre sa décision. Cela devrait induire une moindre volatilité et une meilleure prévisibilité. En outre, la Fed peut renforcer son guidage sur les taux courts lorsqu'elle décide de réduire son programme d’achats d’actifs. En 2013, la hausse des anticipations de taux courts avait contribué à environ 30% de la hausse des rendements à long terme. Une telle augmentation ne devrait pas se produire cette fois-ci.

Enfin, rappelons que c'est le stock d'actifs détenus par la banque centrale qui agit sur la prime de terme. Tant que la banque centrale conservera ses obligations dans son bilan, elle continuera à faire baisser les taux longs.

À moyen terme, nous nous inquiétons davantage du risque d'une stimulation budgétaire excessive de la part de l'administration Biden. Même si le Congrès pourrait bien bloquer une grande partie du plan démocrate, une nouvelle expansion budgétaire de plus d'un trillion de dollars dans les prochaines années pourrait être excessive compte tenu de ce qui a été fait jusqu'à présent. L'économie américaine pourrait être en surchauffe dès 2023. Cela pourrait provoquer la nécessité d'un resserrement monétaire avant le resserrement budgétaire, l'exact opposé du policy mix optimal pour les marchés financiers.

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