Chronique blockchain. L’interopérabilité ou la capacité de différents systèmes d’échanger de l’information est un élément clé de leur succès.
L’univers digital dans lequel nous baignons continuellement est difficile à se représenter, ses contours sont flous. Pour nous forger une image, nous nous accrochons à quelques constellations bien connues, comme celle du GAFA dans la galaxie de l’internet de l’information. Une autre galaxie récemment découverte, celle de l’internet des valeurs, dont la forme est encore mal définie, est souvent décrite par son étoile phare, le bitcoin, l’astre le plus brillant de ce coin de l’univers.
A lui seul, le bitcoin émet près des deux tiers de la lumière de la galaxie et fait de l’ombre à d’autres étoiles montantes. Une des raisons pour laquelle il nous apparait si difficile de dessiner les contours de cette galaxie est que les constellations mineures ne sont pas connues.
tournent d’autres constellations plus petites.
La constellation des jetons de paiement dont le bitcoin fait partie est la plus fameuse. Elle rassemble les jetons qui ont pour vocation première de répliquer de manière digitale et décentralisée les attributs de la monnaie. Il y a également la constellation des jetons d’infrastructure dont chaque constituant est une plateforme, un système d’exploitation, à partir duquel des applications décentralisées sont construites. Dans cette constellation, l'ethereum est l’étoile principale. Autour de la constellation des jetons d’infrastructure tournent d’autres constellations plus petites comme celle des smart contracts1 et celle de la finance décentralisée (DeFi).
Une différence importante entre la galaxie de l’internet de l’information et celle des valeurs est l’interopérabilité, c’est-à-dire la possibilité de communiquer entre différents coins de la même galaxie, d’une constellation à l’autre. Dans l’internet de l’information, insérer une photo dans un SMS ou la publier sur un réseau social est réalisé simplement car ces mondes sont interopérables: ils arrivent à fonctionner ensemble, à échanger des données.
Il est évident que le succès de l’internet de l’information résulte en grande partie de l’interopérabilité. Il est fort à parier que Facebook n’aurait pas eu le succès qu’il connait actuellement s’il n’était pas possible de poster photos, vidéos et autres liens.
Partant de ce constat, nous pensons que le développement de l’interopérabilité au sein de la blockchain est un facteur clé pour une adoption large de la technologie et des jetons cryptographiques. Ces douze derniers mois, deux projets prometteurs ont vu le jour. Les projets Cosmos (ATOM) et Polkadot (DOT), opérationnels depuis 2019 et 2020 respectivement, proposent de connecter tous les points de cette galaxie et de pouvoir y naviguer facilement, rapidement et en toute sécurité.
et de vendre des devises sur un marché centralisé.
A titre d’exemple, si vous orbitez autour du bitcoin et que vous voulez faire un tour dans la banlieue de l'ethereum, il vous faudra vendre des bitcoins et acheter des ethers pour effectuer le voyage et ceci par l’intermédiaire d’une plateforme d’échange. Vous n’avez pas la possibilité de passer d’une chaine à l’autre de manière décentralisée, donc sans intermédiaire. Avec Cosmos et Polkadot, plus besoin d’acheter et de vendre des devises sur un marché centralisé, elles peuvent être transférées d’une chaine à l’autre (asset portability) ou échangées de manière atomique (atomic swap). Atomique signifie qu’un échange est réalisé soit entièrement, soit pas du tout, éliminant ainsi totalement le risque de contrepartie. Le voyage est ainsi sûr et peu coûteux.
Bien que l’exploration de la galaxie blockchain soit passionnante, vous pourriez vite vous y sentir à l’étroit. En effet, l’univers digital est plus large et les voyages intergalactiques devraient être encouragés. Pour naviguer entre l’internet de l’information, l’internet des choses et l’internet des valeurs, il faut un autre type d’interopérabilité. Le projet ChainLink (LINK) propose par exemple de relier tous les coins de l’univers digital et de les intégrer afin qu’ils puissent fonctionner ensemble2.
Si vous êtes perdus dans les étoiles, je vous propose de retourner sur terre pour constater les effets concrets d’une telle révolution cosmique car cette dernière permet entre autre de généraliser l’utilisation des smart contracts au monde réel. Par exemple, votre voiture connectée est stationnée sur une place de parc étroite. Un conducteur rate sa manœuvre et emboutit votre automobile. Votre voiture et celle du conducteur maladroit envoient un message contenant la localisation de l’incident, l’heure, la vitesse… (l'internet des choses) à leur assureur respectif. Ceux-ci vous contactent par email ou SMS (internet de l’information) et paient le montant de la réparation (internet des valeurs) directement à votre garagiste ou à vous-même. Plus besoin de remplir un constat ou de glisser, peut-être, entre l’essuie-glace et le parebrise un petit billet avec coordonnées et excuses.
L’interopérabilité ou la capacité de différents systèmes informatiques d’échanger de l’information est un élément clé de leur succès. A ce sujet, le lancement des blockchains Cosmos et Polkadot joue un rôle central dans l’attractivité de l’internet des valeurs. En outre, ChainLink, dont l’objectif est de faciliter l’interaction entre l’internet des valeurs et l'internet de l’information et des choses, contribue à la popularisation de la blockchain. Aussi, même si le bitcoin brille fort en ce moment, il n’est qu’une étoile parmi d’autres. Ne nous laissons pas éblouir.
2 Techniquement, Polkadot et Cosmos permettent aux blockchains d’échanger de l’information entre elles – au sein de l’internet des valeurs – alors que ChainLink est un oracle, c’est-à-dire un passeur qui prend l’information de l’internet de l’information et/ou des choses et la révèle – après avoir contrôlé sa véracité – aux blockchains afin qu’un smart contract soit exécuté.