Hedge funds: quel positionnement pour 2024?

Cédric Dingens, NS Partners

3 minutes de lecture

Préférence aux stratégies macro, equity et credit long/short, mais prudence sur les plateformes multi-gérants.

Une année 2023 en demi-teinte

Alors que les actions ont connu une évolution positive dès les premiers mois de 2023, les hedge funds ont eu un démarrage plus contrasté. En effet, suite aux craintes d’un ralentissement économique global, les gérants equity long/short ont commencé l’année sur une note prudente, conservant une exposition nette au marché plutôt faible. De leur côté, les gérants global macro ont subi le contrecoup de retournements de tendances marqués, avec comme point d’exergue la baisse record du taux américain à 10 ans qui a suivi la crise bancaire régionale aux Etats-Unis et la faillite de Credit Suisse.

Enfin, après une année 2022 remarquable, les stratégies relative value, désormais dominées par les grandes plateformes multi-gérants, ont également marqué le pas et n’ont pas toutes pu accompagner la remontée du taux hors risque, qui est leur objectif minimal à atteindre. Mais en fin de compte - et il est vrai grâce aux deux derniers mois de l’année qui ont été particulièrement favorables, un portefeuille de hedge funds diversifié a pu afficher une performance nette à deux chiffres en 2023.

Qu’attendre de l’année 2024 au niveau macro?

Qu’en est-il de 2024? Nous nous trouvons actuellement à la croisée des chemins en termes de politique monétaire. De fait, à l’exception du Japon, les grandes banques centrales sont désormais prêtes, à plus ou moins brève échéance, à baisser leurs taux d’intérêt en fonction de l’évolution de l’inflation et de la croissance économique. Pour leur part, si les opinions des gérants macro varient sensiblement de l’un à l’autre, ils s’accordent d’une manière générale à penser que le marché espère une baisse de taux aux Etats-Unis plus rapide que ce qui pourrait se produire. Avec une volatilité sur les taux supérieure à celle des actions, les gérants ont donc réduit la voilure en termes d’allocation de risque.

Les gérants macro devraient être bien positionnés pour profiter de la volatilité sur les marchés des taux, devises et matières premières.

Certains thèmes, qui n’ont pas toujours payé en 2023, restent encore présents dans les portefeuilles, comme le pari sur les métaux liés à la transition énergétique, notamment le cuivre, sur la normalisation de la politique monétaire du Japon et sur les positions «longues» sur certains marchés émergents (taux au Brésil, Mexique, crédit). Après une année 2023 contrastée en termes de résultats, les gérants macro devraient être bien positionnés pour profiter de la volatilité sur les marchés des taux, devises et matières premières.

Un environnement stabilisé pour les gérants equity long/short

Le scénario de «soft landing» qui semble tenir la corde donne pour sa part un peu plus de sérénité aux gérants equity long/short, qui ont sensiblement augmenté leur exposition nette au marché au cours des derniers mois. Il ne faut toutefois pas se tromper: les bons gérants long/short globaux ont affiché des performances entre +15% et +20% en 2023 – à comparer avec un indice MSCI World en hausse de +21,8% - ce qui constitue une génération d’alpha positive, tout d’abord en raison de leur exposition au marché autour de +60% seulement et ensuite de leur sous-pondération aux 7 méga-valeurs technologiques qui ont tiré le marché. Même les gérants asiatiques ayant un biais sur la Chine ont obtenu des performances positives pour l’année écoulée, alors que l’indice MSCI China enregistrait une baisse de -13,2% en 2023.

En revanche, s’il est une stratégie qui affiche une cyclicité un peu plus marquée, c’est bien la stratégie equity long/short. A ce stade, nous sommes d’avis que nous nous trouvons encore dans un cycle de hausse de génération d’alpha. En outre, avec la normalisation des taux d’intérêt et le fait que l’on est enfin rémunéré pour shorter des titres, il nous semble qu’une sélection de bons gérants long/short constitue un bon complément à une allocation actions dans un portefeuille. Il est peut-être temps de diversifier un peu son allocation géographique en dehors des Etats-Unis.

Des questions autour des plateformes multi-gérants

Les plateformes multi-gérants ont été les grandes gagnantes de ces dernières années. Depuis 2017, elles ont ainsi vu leurs actifs sous gestion augmenter de +186% et les sept plus importantes d’entre elles, incluant notamment Citadel, Millennium, Point 72 ou Balyasny, représentent désormais plus de 60% de parts de marché de cette catégorie. Les approches et les expositions en termes de classes d’actifs varient de l’une à l’autre et il n’est donc pas toujours évident de les comparer. Cela étant, elles se livrent désormais à une guerre sans merci pour attirer les meilleurs traders, qui sont ainsi payés à prix d’or, ce qui a un impact sur les coûts.

Or, dans ces plateformes, un gérant performant peut recevoir des commissions de performance même si le résultat de l’ensemble est nul, voire négatif, ce qui se traduit par ce que l’on appelle un «risque de netting». Ce dernier peut se matérialiser plus rapidement si la performance des fonds est en deçà des attentes. Pour ces plateformes ayant connu une croissance rapide, il va falloir digérer les actifs et évaluer s’il n’y a pas une dilution de la valeur ajoutée dans le résultat final. D’autre part, avec des termes de liquidités qui sont devenus plus contraignants, il faut désormais être très sélectif.

Enfin, pour terminer notre tour d’horizon sur le positionnement à adopter en 2024, il nous semble que de bons gérants credit long/short devraient être à même de générer des performances intéressantes dans l’environnement de marché qui nous attend ces prochains mois.

En conclusion, l’important pour obtenir un résultat satisfaisant de son portefeuille de hedge funds est de bien en définir les attentes, car sa construction et son évolution vont en dépendre directement. Pour connaître le succès, il convient toutefois de garder à l’esprit deux facteurs importants: d’abord, effectuer une bonne sélection en amont et ensuite être contrariant dans la mesure du possible.

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