Hausse de l’inflation et détente des taux

Andrew Craig, BNP Paribas Asset Management

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Les bons chiffres économiques de la semaine dernière aux USA et en Europe ont renforcé l'opinion des investisseurs selon laquelle la reprise cyclique s’affirme.

Covid-19 – La situation de dégrade

Les nouveaux cas de contamination quotidiens sont sur une tendance haussière à l'échelle mondiale avec 5,2 millions de personnes infectées la semaine dernière, selon les données de l'Université John Hopkins. La situation en Europe continentale, en Inde, au Brésil, et, plus récemment, aux États-Unis expliquent cette remontée.

La situation en Inde devient catastrophique avec un nombre record de cas et de nouvelles contaminations qui continuent à augmenter. La situation du Brésil continue de se détériorer conduisant à l'effondrement des systèmes de santé locaux et entraînant plus de 3 000 décès enregistrés chaque jour.

Malgré le récent rebond du nombre de cas de contaminations en Allemagne, les décès restent relativement limités, même si les hospitalisations sont désormais en hausse.

Malgré certains revers, les investisseurs sont rassurés par le fait que, dans les pays qui ont vacciné la plus grande partie de leur population, rien ne suggère que la vaccination ne finira pas par permettre de contrôler l’épidémie.

Les rendements obligataires baissent à mesure que l'inflation augmente

Dans la zone euro, l'indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) de mars a été globalement conforme aux prévisions, mais est passé au-dessus de 1% en glissement annuel pour la première fois depuis février 2020. La zone euro ne semble pas à l’abri du rebond de l'inflation mondiale qui devrait continuer à augmenter cette année, entraînant les anticipations inflationnistes à la hausse et ancrant ainsi davantage la probabilité que l’inflation reste plus élevée à plus long terme. Toutefois, les forces désinflationnistes sont bien présentes dans la zone euro, ce qui devrait ralentir la hausse.

Aux États-Unis, en dépit de données solides concernant l'inflation et les ventes au détail en mars, les rendements obligataires américains ont baissé de 3 à 7 points de base au cours de la semaine. Cela pourrait être dû au fait que le «reflation trade» est déjà pleinement intégré dans les prix, les investisseurs s’étant d’ores et déjà positionnés pour la reprise cyclique. Les chiffres élevés de l'inflation aux États-Unis (mesurée par l’indice des prix à la consommation) ont pu déclencher des prises de bénéfices sur les obligations nominales. Les obligations indexées sur l’inflation (TIPS) se sont également bien comportées, mais les swap spreads ont souffert, les banques ayant annoncé d’importantes émissions à venir à l’occasion de la présentation de leurs résultats trimestriels.

Un sommet virtuel sur le climat

Le président Biden devrait publier un décret sur le «Risque financier lié au climat» avant le sommet sur le climat qui réunira quarante dirigeants mondiaux les 22 et 23 avril. Ce sommet est une étape clé sur la voie de la Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26) qui se tiendra en novembre à Glasgow et vise à augmenter les chances de parvenir à des résultats significatifs sur l'action climatique mondiale lors de la COP26. Le décret devrait donner des orientations générales sur:

  1. Les risques liés au changement climatique pour le système financier;
  2. Examiner les perturbations potentielles liées au climat de la couverture d'assurance privée et les risques de poursuite des investissements en titres de combustibles fossiles;
  3. Limiter la capacité des gérants de fonds de pension à voter sur les propositions des actionnaires lors des assemblées annuelles;
  4. La divulgation par les fournisseurs fédéraux de leurs émissions de gaz à effet de serre;
  5. Les futures décisions d'achat au niveau fédéral tenant compte des coûts climatiques;
  6. L'intégration du risque financier climatique dans la souscription de prêts.
 La BCE se réunit cette semaine

Les responsables politiques de la Banque centrale européenne (BCE) ont été unanimes à soutenir une politique monétaire accommodante depuis le début de la pandémie. Lors de la réunion de politique monétaire de la BCE cette semaine, une réduction du programme d'achat d'obligations pourrait être débattue. Il est toutefois peu probable que qu’une décision quelconque intervienne avant la réunion de juin, au plus tôt.

L'intensification par la BCE de ses activités d'achat d'obligations via le programme d'achat d'urgence face à la pandémie (PEPP) a contribué à maintenir les coûts d'emprunt à un faible niveau pour les gouvernements, les entreprises et les ménages de la zone euro. Ayant multiplié par deux le volume du programme d'achat d'obligations d'urgence l'an dernier, la BCE a encore près de la moitié de l'enveloppe totale de 1850 milliards d’euros pour le PEPP à utiliser. Le plan initial consistait à poursuivre les achats nets jusqu'en mars 2022 au moins et à ne cesser qu'une fois la pandémie jugulée. Toutefois, certains membres du Conseil ont suggéré qu'elle devrait commencer à limiter ses achats d'obligations le plus tôt possible. Nous nous attendons à ce que ces discussions soient repoussées pour l'instant, le Conseil des gouverneurs de la BCE exprimant un optimisme prudent sur l’amélioration de la conjoncture européenne au second semestre.

Pendant ce temps, à la Réserve fédérale américaine

La semaine dernière, le président de la Fed, M. Powell, a fait des commentaires et le vice-président Clarida a prononcé un discours détaillé qui, pour les investisseurs, ont eu le même effet: l’idée s’impose que la Fed n'a rien à dire sur les perspectives de politique monétaire à court terme et reste fermement concentrée sur la réalisation des objectifs de son mandat plutôt qu’en discuter à tout propos. Cela signifie également que la Fed n'est pas prête à signaler le début, ni même à indiquer des seuils dont le franchissement amènerait à commencer le processus de «tapering» (réduction des achats de titres).

L'absence de nouvelles à ce sujet la semaine dernière a fait refluer quelque peu les anticipations d’une remontée des taux directeurs contenues dans les marchés à terme (de 10 pb environ pour les hausses attendues jusqu’en 2023, dans le sillage de la progression des marchés obligataires).

Par ailleurs, la période de «blackout» avant la prochaine réunion du comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) des 27 et 28 avril a commencé.

Perspectives

Les résultats préliminaires des enquêtes auprès des directeurs d’achats (PMI) indices préliminaires seront publiés en fin de semaine pour les grands pays développés. La semaine dernière, les solides indicateurs économiques et les probables prises de bénéfices sur les positions vendeuses sur les bons du Trésor américain ont créé un environnement positif pour les devises du G10 à fort bêta qui ont rebondi. Si les indices PMI montrent une nouvelle accélération de l'activité, l'appétit pour le risque devrait rester intact et propice à des gains supplémentaires. En outre, l’adjudication de titres du Trésor américain à 20 ans sera un test pour l'appétit du marché pour la duration. Une adjudication réussie pourrait déclencher un nouveau rally du marché obligataire américain.

Aux Etats-Unis, l'indice PMI manufacturier pour avril devrait rester élevé – le consensus table sur une légère hausse par rapport à mars. La situation en avril semble assez comparable à celle de mars où les entreprises du secteur manufacturier ont été confrontés à des contraintes sur les produits et pièces détachées en amont de la production alors que les commandes ont continué à augmenter. Les deux premières enquêtes régionales sur l'activité manufacturière américaine pour avril se sont améliorées alors que les indices en mars étaient déjà élevés.

Alors que les interrogations sur les valorisations des marchés actions se poursuivent, nous avons tendance à penser que les niveaux actuels de liquidité devraient soutenir la demande et doper les bénéfices, soutenant ainsi les valorisations. En outre, la hausse de l'inflation devrait continuer de soutenir le pouvoir de fixation des prix des entreprises et donc les bénéfices. Néanmoins, la poursuite de la hausse des actions dépend de la poursuite des révisions à la hausse des bénéfices.

La dispersion de la performance des actions reste élevée entre les secteurs et les marchés - les valeurs américaines et dans leur ensemble et les valeurs technologiques américaines étant les plus performantes. Les secteurs sensibles aux perturbations induites par l’épidémie restent les moins performants. La style «value» devrait surperformer si bien que la valorisation des actions européennes, davantage orientées «value», pourrait rebondir à mesure que les programmes de relance et de vaccination européens gagneront du terrain aux deuxième et troisième trimestres 2021.

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